La guerre des lettres se poursuit entre Xerox et HP. Après la missive du premier menaçant de lancer une OPA hostile sur le second, celui-ci répond par une lettre signée par Enrique Lores (CEO) et Chip Bergh (membre con conseil d’administration), lettre par ailleurs consultable sur le site de l’entreprise. Les deux hommes estiment que la proposition reçue ne peut pas servir de base de négociation et s’inquiètent de la santé financière de ce qu’il faut désormais qualifier d’adversaire. « La capacité de Xerox à augmenter la partie en espèces de la contrepartie proposée demeure incertaine. Nous avons de même des inquiétudes quant au fardeau de la dette surdimensionnée qui en résulte sur la valeur des actions de la société combinée, même si le financement était obtenu. Par conséquent, votre proposition ne constitue pas une base de diligence raisonnable ou de négociation », écrivent-ils.

« Nous pensons qu’il est important de souligner que nous ne dépendons pas d’une combinaison avec Xerox. Nous avons une grande confiance dans notre stratégie et dans les nombreuses opportunités offertes à HP pour générer une valeur durable à long terme, notamment le déploiement de notre bilan solide pour un rachat accru de nos actions fortement sous-évaluées et des fusions et acquisitions créatrices de valeur », ajoutent-ils, critiquant ensuite les termes agressifs de la proposition destinée à proposer une fusion « sur des bases opportunistes et sans fournir d’informations adéquates ». « Lorsque nous avons eu des entretiens privés avec vous en août et en septembre, nous avons soulevé nos questions à plusieurs reprises. Vous n’avez pas répondu à ces questions mais vous êtes reparti, choisissant de poursuivre une approche hostile plutôt que de continuer sur une voie plus productive. Mais ces questions fondamentales demeurent et votre souhait désormais public d’accélérer pour parvenir à un accord, toujours sans répondre à ces questions, ne fait que renforcer notre inquiétude face à votre entreprise et à vos perspectives. »

Ils rappellent par ailleurs que Xerox a généré des revenus inférieurs aux prévisions au cours de quatre des cinq derniers trimestres et qu’entre juin 2018 et juin 2019, le chiffre d’affaires est tombé de 10,2 milliards de dollars à 9,2 milliards de dollars, une tendance qui selon eux devrait se poursuivre.

« Étant donné que votre activité repose en grande partie sur les revenus contractuels, nous sommes préoccupés par la baisse de la valeur totale des contrats des clients, supérieure à celle des produits, ce qui suggère que vos revenus pourraient diminuer encore plus rapidement dans les années à venir. Nous notons que la TCV (valeur totale du contrat) des signatures d’entreprises (y compris les renouvellements) en 2018 était en baisse de 13,9% en monnaie constante et que votre taux de désabonnement pour 2018 était de 18%, deux données que Xerox a cessé de fournir publiquement depuis la fin de 2018 », poursuit la lettre.

Suit une interrogation sur la réalité des synergies résultant d’un rapprochement. « Notre examen des synergies basées sur les informations publiques et les informations limitées que vous avez partagées ne démontre pas l’ampleur des synergies réalisables que vous suggérez, et il semble que vos hypothèses incluent des économies importantes déjà incluses dans les plans de réduction des coûts annoncés de manière indépendante par chaque société. »

Selon Enrique Lores et Chip Bergh, en cédant sa participation dans la coentreprise Fuji Xerox, Xerox a hypothéqué son avenir en contrepartie d’une injection de fonds à court terme. « Nous craignons que cette sortie ne laisse un trou stratégique important dans le portefeuille de Xerox. En outre, nous sommes préoccupés par l’état des ressources technologiques, du pipeline de recherche et développement de Xerox, des futurs programmes de produits, ainsi que de la continuité et des capacités de l’approvisionnement ». Et de frapper à nouveau un grand coup. « Enfin, nous notons que Xerox a besoin d’accéder à la région Asie-Pacifique dont la croissance est la plus rapide. Le conseil d’administration de HP s’est engagé à servir les intérêts des actionnaires de HP, et non de Xerox et de ses actionnaires. HP dispose de nombreuses opportunités pour créer de la valeur pour ses actionnaires de manière autonome. » Et les deux hommes de conclure « Nous ne laisserons pas des tactiques agressives ou des gestes hostiles nous distraire de notre responsabilité qui consiste à suivre le chemin le plus créateur de valeur. »

La réponse de Xerox ne devrait pas tarder.