C’est un cas d’école. Créée en 2012, la startup Snowflake Computing, éditrice d’une base de données analytique SQL, a annoncé la semaine dernière une levée de fonds pour le montant faramineux de 450 millions de dollars. À elle seule, cette levée de fonds serait déjà à inscrire dans les annales si elle n’avait été précédée de plusieurs tours de table tout aussi vertigineux portant à plus de 920 millions de dollars le cumul des sommes soulevées par la startup à ce jour.

L’effet de sidération est d’autant important que la société reste encore relativement modeste avec ses 400 collaborateurs et son chiffre d’affaires évalué à moins de 90 M$ (source Owler). Certes. Mais sa croissance est très rapide et la demande pour ses solutions est très forte, assurent ses promoteurs. Trois ans après avoir démarré la commercialisation effective de son offre, la société revendique plus de 1.000 clients actifs. Leur nombre a triplé au cours de l’année 2017 et le volume de données que ces derniers lui ont confiées a quadruplé. Alors, qu’est ce qui inspire tant les investisseurs et les clients chez Snowflake ?

Son principal argument, c’est probablement sa solution pensée nativement pour le Cloud. Sur un marché des entrepôts de données passablement encombré, l’avènement du Cloud est en train de redistribuer les cartes. Avec sa technologie d’entrepôt de données géré sous forme de service, Snowflake semble bien parti pour en profiter et tirer les marrons du feu à lui, comme Salesforce ou ServiceNow avant lui sur leurs marchés respectifs.

L’éditeur a conçu une architecture décorélant stockage et traitement des données qui lui permet de tirer avantage des capacités quasi illimitées du Cloud. « Grâce à cette architecture, qui permet de lancer de multiples entrepôts de données virtuels à la volée, il est possible de décupler le nombre d’utilisateurs simultanés et le nombre de requêtes sans nuire aux performances », explique Thibault Ceyrolle, président de Snowflake Europe (photo). Au passage, l’infrastructure cloud permet de réduire considérablement les tâches d’administration et de maintenance.

De fait, Gartner salue dans son dernier Quadrant magique consacré aux solutions de gestion de données analytiques, paru en février dernier, la facilité de mise en œuvre, la flexibilité de déploiement et les performances de la technologie Snowflake. À la clé, une satisfaction mesurée des clients nettement au-dessus de la moyenne et un taux d’attrition proche de zéro. Classé en tête du carré des challengers, Snowflake se distingue également par sa forte progression en termes de capacité d’exécution d’une année sur l’autre, puisqu’il était encore classé dans le carré des acteurs de niche dans l’édition 2017.

On signalera également que Snowflake est désormais multicloud, puisque sa solution tourne aussi sur Azure depuis peu alors qu’elle était uniquement disponible sur AWS jusque-là. Cette ouverture à Azure va lui permettre d’élargir son marché potentiel et son portefeuille de services (avec par exemple une offre de réplication multicloud en préparation).

De même que le nombre de ses clients, la taille de son écosystème augmente rapidement. L’éditeur revendique désormais près d’une soixantaine de partenaires technologiques avec lesquels il s’interface directement. Parmi eux, des éditeurs de solutions de chargement, tels que Talend, Informatica ou Matillion, et des éditeurs de solutions de visualisation (Tableau, Looker, Power BI, Microstrategy…). Côté intégrateurs la liste s’allonge rapidement en France, où l’éditeur est installé depuis fin 2017. Il compte ainsi parmi ses partenaires actifs des sociétés comme Keyrus, KPMG, VO2 Group, Eulidia, Jems Group… À noter la signature toute fraîche d’Infeeny, premier partenaire de l’écosystème Azure à le rejoindre.

Fort des capitaux levés, Snowflake va s’attacher désormais à développer ses forces commerciales et marketing. Un an et demi après avoir entamé son internationalisation, l’entreprise de San Mateo (Californie) est aujourd’hui représentée dans huit pays – le neuvième, l’Espagne, ouvre dans les prochains jours. L’objectif affiché est d’atteindre 20 pays l’année prochaine, avec notamment des implantations en Asie/Pacifique où elle est encore absente. Un centre de développement doit également ouvrir en Europe. Et l’entreprise prévoit d’étendre sa présence dans les datacenters des grands fournisseurs de Cloud. Elle est ainsi sur le point de s’installer sur la plaque Azure d’Amsterdam pour le plus grand bénéfice de ses clients européens.

En France, où l’entreprise compte déjà une équipe d’une vingtaine de personnes, Snowflake table sur le recrutement d’une trentaine de collaborateurs supplémentaires au cours des douze prochains mois. Le nombre de partenaires devrait aussi continuer à augmenter même si le programme de certification récemment mis en place devrait avoir pour effet de limiter les recrutements opportunistes.