Une page se tourne pour Digora. Plus de 23 ans après avoir co-fondé la société avec Gilles Knoery, Renaud Ritzler a décidé de quitter son poste de président de Digora et de céder toutes ses parts. C’est EBRC, la filiale opérateur de datacenters du groupe luxembourgeois Post, qui les a rachetées. Déjà détenteur d’un petit tiers du capital depuis 2017, EBRC voit sa participation monter à 66,2%, Gilles Knoery conservant les 33,8% restants.

Côté gouvernance, c’est Gilles Knoery, jusque-là directeur général, qui reprend la présidence de la société. Pour reprendre la gestion opérationnelle de l’activité, il a demandé à son frère Hervé, directeur d’activité au sein du groupe Eiffage, de le rejoindre en mai au poste directeur général délégué aux opérations. Thierry Loubes, qui avait rejoint Digora en 2018 en tant que directeur de l’activité cloud, hérite de la direction du développement, rôle qu’assumait jusque-là Gilles Knoery. Avec Bruno Flandrin, directeur France, ils forment le nouveau conseil d’administration du groupe.

La mise en place de nouvelle direction ne remet pas pour autant en cause la stratégie de la société qui tend depuis quelques années vers la gestion de la donnée. Une stratégie qui va au-delà de son positionnement historique d’expert des technologies Oracle. La société continue de fournir de l’expertise autour des bases de données et des applicatifs Oracle, mais elle intervient aussi de plus en plus dans la cybersécurité, les bases de données noSQL, la valorisation des données, le pilotage des ressources cloud, les applications de santé (avec Dedalus DXCare)…

Surtout, les services infogérés ont pris une part prépondérante de son activité, puisqu’ils sont en passe d’atteindre 50% de son chiffre d’affaires et qu’ils assurent l’essentiel de sa croissance. Pour qu’ils continuent à croître, Digora estime qu’il doit accélérer leur industrialisation. C’est le rôle de Hervé Knoery, qui dirigeait une entité du groupe Eiffage fournissant des services de maintenance sur des composants sensibles pour des clients du secteur de l’énergie. Il sera notamment chargé de mener à son terme le processus de certification ISO 27001, entamé fin 2019 et qui doit se prolonger jusqu’au début du deuxième semestre 2021. Une fois cette certification structurante acquise Digora pourra viser l’agrément hébergeur de données de santé sur la partie infogérance et PCI-DSS.

Autre axe de développement pour Digora : les services Finops Cloud, autrement dit le pilotage des ressources cloud consommées par les clients. Une tendance de fond, associée au pilotage de la performance (des bases de données et des applications) dont la société a fait une de ses marques de fabrique. Digora s’est fixé pour objectif de structurer des offres standardisées et une équipe identifiée d’ici à la fin de l’année.

Après un exercice 2019 marqué par un léger recul (-4,1%) de ses facturations à 23 M€ – dû au ralentissement de son activité négoce – mais aussi par une croissance de 13% de ses services infogérés et de 230% de son résultat d’exploitation, Digora tablait sur une dynamique de croissance comparable cette année, du moins sur ses activités de services. Mais la crise Covid l’a obligé à réajuster son budget à la baisse et l’empêche toujours d’établir des prévisions fiables.

Plusieurs facteurs devraient néanmoins permettre à l’entreprise de tirer son épingle du jeu. En mars, elle a remporté conjointement avec Computacenter le marché Oracle de l’Ugap. Un marché au périmètre élargi par rapport au marché hardware Oracle dont elle bénéficiait jusque-là (toujours avec Computacenter) puisque l’Ugap a décidé cette fois de réunir les volets software et hardware, portant le montant estimé du marché à environ 40 M€ par an. Digora, attributaire de la composante services du marché, pourrait ainsi voir ses revenus en provenance de l’Ugap multipliés par trois en vitesse de croisière.

Autre facteur de confiance pour l’entreprise : elle a obtenu un prêt garanti par l’Etat de plusieurs millions d’euros. Un prêt que Gilles Knoery interprète comme une marque de confiance de ses partenaires financiers. Si elle n’a pas eu besoin de toucher à ces fonds jusqu’à maintenant, l’entreprise n’exclut pas de les utiliser pour sécuriser sa trésorerie en cas de rebond de l’épidémie, pour sécuriser son besoin en fond de roulement lié au marché Ugap, voire pour financer les éventuelles opérations de croissance externe qui se présenteraient.