La hausse du coût de l’énergie devient un enjeu pour toutes les organisations. Nicolas Aubé, président de l’opérateur Celeste, décrypte les tenants et aboutissants de cette inflation sur les acteurs du Cloud et de l’hébergement.

Channelnews : le groupe Celeste est-il confronté à la hausse généralisée du coût de l’énergie ?

Nicolas Aubé : Oui. Nous avons déjà subi une augmentation de 21% de notre facture d’électricité en 2022 et son tarif devrait encore être réajusté à la hausse au 1er janvier. À l’instar des autres exploitants de centres de données, l’électricité représente une part significative des charges du Groupe Céleste : de l’ordre de 2 M€ de ses 125 M€ de chiffre d’affaires. Mais, elle pèse à elle seule environ un quart de la facture totale de notre activité hébergement.

Channelnews : Cette hausse de l’électricité constatée en 2022 a-t-elle eu impact sur vos propres tarifs d’hébergement ?

Nicolas Aubé : Oui. Nous avons été contraints d’augmenter nos tarifs de 5%.

Channelnews : Quelle devrait être la hausse du tarif de votre électricité au 1er janvier ? Et quelle répercussion cela devrait avoir sur vos propres tarifs d’hébergement ?

Nicolas Aubé : Nous ne serons fixés que dans les prochains jours mais nous anticipons une hausse comprise entre 50 et 100% du coût de notre électricité. Et encore, nous bénéficions d’un contrat assez protecteur en partie indexé sur le tarif régulé. Dans ce contexte, on pense que les prix de nos services d’hébergement vont être amenés à augmenter d’au moins 10 à 15%.

Channelnews : Avez-vous pris des mesures pour réduire votre consommation électrique ?

Nicolas Aubé : Oui. C’est du reste l’une de nos préoccupations permanentes en tant qu’exploitant de centres de données. Au cours de l’année écoulée, nous avons rationalisé notre parc de centres de données. Nous en avons fermé cinq, les plus petits et les moins efficaces, pour nous concentrer sur les trois plus importants, ceux de Marne-La-Vallée [le centre de données historique], d’Albi et de Nantes [hérité du rachat d’Oceanet en 2021].

Nous avons également rationnalisé les différentes plateformes cloud issues des opérations de croissance externes des dernières années. Nous avons migré tous nos clients sur une plateforme unique baptisée Cloud by Celeste. Cette plateforme, basée sur une architecture VMware et des serveurs Dell, est à la fois plus moderne, plus robuste, plus mutualisée et consomme moins d’énergie.

Depuis septembre, nous avons également relevé la température de consigne dans nos centres de données de 23 à 27 °C. Ce qui devrait nous permettre de réduire en vitesse de croisière notre consommation électrique de l’ordre de 5 à 10%.

Je rappelle enfin que le système de refroidissement par air que nous avons mis au point dans notre centre de données de Marne-la-Vallée nous permet de nous passer de climatisation plus de 80% du temps.

Channelnews : Vous évoquez une hausse de 10 à 15% du prix de vos services d’hébergement en 2023. Est-ce que cela ne risque pas de vous dépositionner par rapport à vos concurrents ?

Nicolas Aubé : Je ne pense pas quand je vois les augmentations qu’on nous annonce pour l’hébergement de nos quelque 234 points de présence [ces infrastructures réparties sur tout le territoire qui permettent aux clients de Celeste de se raccorder à son réseau fibre, ndlr]. Et ces augmentations sont sans commune mesure avec celles que l’on observe en Suisse où nous sommes également implantés. Notre facture électrique devrait y être multipliée par quatre ou cinq au 1er janvier, soit un surplus de près de 1 MF sur un chiffre d’affaires de l’ordre de 25 MF. Les choix que nous avons faits en matière énergétique se révèlent donc pertinents jusqu’à maintenant et nous donnent plutôt un avantage concurrentiel.

Channelnews : Vous reste-t-il des marges de manœuvre pour réduire encore votre consommation énergétique ?

Nicolas Aubé : Bien-sûr. Nous avons par exemple décidé d’installer des panneaux solaires sur les toits de nos centres de données. On va commencer par notre centre de Marne-la-Vallée. Cet investissement devrait couvrir environ 10% de sa consommation électrique. Et on espère encore de meilleurs rendements à Albi.

Channelnews : Vous êtes récemment monté au créneau pour mettre en garde les entreprises contre de possibles coupures de courant. Pourquoi ?

Nicolas Aubé : Les experts le disent, l’hiver 2022-2023 pourrait être marqué par des coupures de courant. Il est important de comprendre que les réseaux télécom ne seront pas épargnés par ces coupures. Tous les réseaux sont potentiellement concernés : analogique, ADSL, fibre et même les réseaux mobiles. Le message que l’on souhaite faire passer à cette occasion, c’est que nous assurerons la continuité de service de notre réseau fibre pendant une durée de quatre heures en cas de coupure. Ceci grâce à des batteries installées dans tous nos points de présence. Même chose pour nos centres de données, qui sont conçus pour résister encore plus longtemps. [Orange a indiqué que ses réseaux ADSL et fibre tomberaient instantanément en cas de coupure].