Pourquoi Microsoft s’est-il mis en tête de développer sa propre tablette tactile au risque de froisser ses partenaires constructeurs ? Pour créer l’émulation nécessaire à la réussite de Windows 8, répond Pierre François, le pdg de Vascoo.


L’annonce de Surface a surpris. D’abord parce que Microsoft s’était jusqu’à présent appuyé sur des partenaires pour le développement du matériel. Ensuite parce que le produit présente des qualités remarquables qui en font une réelle innovation. Mais pourquoi avoir choisi de le développer en interne ?

Les raisons sont clairement énoncées au sein de Microsoft même si nous ne pouvons pas citer nos sources. L’éditeur veut et doit dépasser Apple et Google avec Windows 8 et s’emparer du marché des tablettes. Pour cela il lui fallait non seulement développer un OS intrinsèquement supérieur à ceux qui existaient, ce qui est fait avec Windows 8, mais aussi s’assurer que les tablettes adaptées arrivent bien sur le marché.

Compte tenu de l’enjeu, Microsoft ne pouvait pas prendre le risque que ses partenaires constructeurs (HP, Dell, Lenovo, Asus, Toshiba, Acer, etc…) ne soient pas prêts à temps ou que les produits soient décevants. Surface l’a aidé à se prémunir contre ces risques en jouant le rôle de lièvre et de catalyseur à l’égard des constructeurs. Ce faisant Microsoft leur a adressé ce message :

-« Il est possible de développer une tablette très supérieure à l’Ipad. Surface est aux tablettes ce que le concept-car est à la gamme d’un constructeur automobile : la preuve par l’objet. À vous de faire aussi bien et si possible mieux. »

-« Si vous ne sortez pas des tablettes à temps, Microsoft peut devenir constructeur même s’il ne le souhaite pas. »

Le message est passé et l’annonce de Windows 8 le 26 octobre prochain va être synchronisée avec la mise en vente par la plupart des constructeurs de tablettes performantes, innovantes et…. désirables.

Surface va être diffusé de façon confidentielle par le réseau des boutiques Microsoft (notez qu’il n‘y en a pas en France) ou en ligne. Il n’y aura ni marketing ni promotion spectaculaire. Il faut souligner que lors de la WPC de Toronto en juillet dernier, qui regroupait 15.000 partenaires, Surface n’a été ni présenté ni même mentionné. Microsoft savait déjà que son pari était gagné.

Paradoxalement cela va peut-être faire de surface un succès commercial. Cette tablette a d’autant plus de chances de devenir un « must have » qu’elle ne sera pas si facile à acheter….

À propos de l’auteur :

Ancien élève puis maître de conférence d’HEC Paris, Pierre François est aussi un créateur d’entreprises, avec 21 créations à son actif depuis 1982, essentiellement dans le secteur des TIC et des ressources humaines.

Il collabore étroitement avec Microsoft depuis 1993, dont il a été pendant trois ans membre de l’Advisory Board à Seattle et qui, depuis 2008, lui a confié le développement du PDC (Partner Development Center) pour le monde francophone.

À ce titre, il accompagne des entreprises de 100 à 10.000 personnes dans leurs phases de mutation et de changement de business model.

Sa connaissance de l’écosystème Microsoft et son indépendance vis-à-vis de l’éditeur en font un observateur et un commentateur avisé de ce secteur. Retrouvez ses articles et ses analyses sur le blog de sa société.