L’édition 2013 de Solutions Linux a été marquée par l’intervention en ouverture de Microsoft, venu évangéliser l’écosystème français sur sa stratégie Open Source. Réactions recueillies sur place.


Si IBM, Red Hat et Linagora, des cadres de l’écosystème de l’Open Source, ont boudé cette édition 2013 de Solutions Linux, un éditeur a quant à lui brillé par une présence affirmée : Microsoft. L’éditeur de Redmond, sponsor Gold de l’événement, a ainsi souhaité expliquer à l’éco-système Open Source, réuni à Paris pour l’occasion, son approche, qu’il veut emprunte d’ouverture. Et pour décrypter sa stratégie, il a assuré le discours d’inauguration de la manifestation. Aux côtés certes de Suse, avec qui l’éditeur a passé un accord – très controversé à l’époque – il y a maintenant 7 ans.

Microsoft, qui comparait autrefois Linux à un cancer et était désigné comme la bête noire du monde de l’Open Source, mène depuis plusieurs années une stratégie hybride en distillant, méticuleusement, des briques issues de l’Open Source dans son équation. Investissement dans les organismes de standardisation, relations privilégiées avec certains éditeurs, contributions majeures au noyau Linux, politique d’interopérabilité des environnements Windows avec les outils Open Source, ouverture d’une division Open Source (Microsoft Open Technology), participation au projet OpenDayLight au sein de la Linux, ouverture d’Azure aux VM Linux, etc…. les initiatives et les engagements de l’éditeur envers le monde de l’Open Source sont nombreuses, raconte Frédéric Aatz, en charge des questions d’ Open Source et d’interopérabilité chez Microsoft France et qui avait pour mission d’ouvrir l’événement. «Nous menons une stratégie Open Source depuis des années, a-t-il expliqué, qualifiant d’importante la nécessité à collaborer» avec les logiciels ouverts. D’ailleurs, l’éditeur est présent à Solutions Linux depuis 2004. «C’est une histoire qui dure», insiste-t-il, même si l’on se souvient que l’éditeur a été quelque peu chahuté lors de précédentes éditions de l’événement.


Aujourd’hui, Microsoft veut officiellement se fondre dans le paysage, comme un membre à part entière de l’écosystème Open Source. Et a priori, cela passe plutôt bien auprès des acteurs présents à l’événement. Même si le chemin est encore long.

Un signe du maturité de l’éco-système Open Source


«Ils oeuvrent beaucoup sur l’interopérabilité des solutions Open Source avec les environnements Microsoft. Dans le monde PHP, par exemple, il y a des liens très forts à tisser avec le monde Microsoft», explique Véronique Torner, la co-président de la SSLL Alter Way, rappelant qu’il existe désormais de fortes connexions entre les deux mondes. Surtout, «ne pas composer avec Microsoft serait une erreur» et enverrait au marché un signal faussé en ce qui concerne l’Open Source. Voir Microsoft prendre la parole à Solutions Linux met ainsi en valeur la maturité de l’Open Source : « Nous sommes arrivés à un point de maturité qui nous permet de dire que Microsoft peut s’exprimer sur ces sujets parce que le marché existe. Le fait de pouvoir montrer que l’on peut vivre à côté de Microsoft est un signe de maturité». La crainte que Microsoft puisse étouffer le marché avec sa force de frappe semble donc révolue. Même si le débat reste très tendu dans les administrations françaises, notamment avec la publication de la circulaire Ayrault.

De là à en faire un élément clé de l’éco-système ? Oui et non, note Sylvain Garcia, expert messagerie collaborative chez Blue Mind, qui édite une solution Open Source de messagerie et de collaboration alternative à Microsoft Exchange, IBM Notes ou VMware Zimbra – Blue Mind a été créé à Labège par les ex-fondateurs d’AliaSource, à l’origine d’OBM, suite à des « divergences » avec Linagora après son rachat d’AliaSource, N.D.L.R- . «Microsoft n’est pas forcément influent dans la communauté Open Source mais présent sur certains développements, comme le noyau Linux. Il y est présent par souci de compatibilité avec Linux et avec d’autres technologies Open Source , mais ils ont toujours un problème d’ouverture. Ils ont certes publié leurs spécifications, mais leurs produits restent quand même propriétaires, sans trop d’ouverture. Se pluguer sur un Exchange reste encore difficile», lance-t-il, ajoutant que finalement, Microsoft contribue surtout «sur des problématiques liées à la compatibilité des environnements Windows».

Un poids ultra-léger du secteur


François Gruyer, directeur technique Skill Center CSD Services chez Capgemini s’accorde sur ce point. Si en tant qu’intégrateur, Microsoft est «une cible inévitable, car même les plus férus d’Open Source ont Windows sur leurs postes de travail», il apparait toutefois que « les initiatives de Microsoft sur l’Open Source sont quand même très limitées». «Pour le moment, Microsoft n’apporte pas beaucoup de valeur au monde Open Source. Ce n’est pas le coeur de leur stratégie. Cela tient davantage à de la coexistence pacifique». Microsoft est certes un membre de la communauté avec lequel il faut composer, mais ne constitue pas un poids lourd de l’éco-système, en somme. « IBM a plus donné au monde Open Source avec Eclipse que ne l’a fait aujourd’hui Microsoft», poursuit-il.

Mais il reste, encore une fois, des efforts louables. François Gruyer pointe par exemple du doigt la volonté de Microsoft d’opter pour une approche d’ouverture par rapport au Cloud. « Leur discours est intéressant lorsqu’ils disent que l’on peut sortir de leur cloud. Et avoir la liberté de faire des transferts entre le on-premise et le cloud. Un discours original par rapport à des Salesforce ou des sociétés qui verrouillent leur cloud. Microsoft a pris parti d’avoir un vrai choix d’ouverture en la matière pour ses clients «hébergés». C’est une réalité, ils le font».

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