Les faits reprochés paraissent bien légers au regard de la sanction infligée au PDG de HP. En réclamant de porter sa rémunération à 100 M$ en trois ans, ce dernier n’est-il pas subitement devenu encombrant ?

 

L’industrie IT continue de s’interroger sur les véritables motifs qui ont provoqué la chute de Mark Hurd. En effet, peu nombreux sont ceux qui arrivent à croire que la perte de confiance du conseil d’administration de HP vis-à-vis de son PDG puisse être uniquement due à la falsification de quelques notes de frais et au versement de rémunérations indues – sommes aux montants anecdotiques que Mark Hurd s’était du reste proposé de rembourser. On ne risque pas de telles répercussions négatives pour si peu.

Dans un e-mail adressé au New York Times, Larry Ellison, qui se présente comme un ami proche de Mark Hurd, a ainsi déclaré qu’en se séparant de lui, le conseil d’administration de HP n’avait pas agit dans le meilleur intérêt des employés, des actionnaires, des clients et des partenaires. « Il s’agit de la pire décision dans le domaine de l’IT depuis l’éviction de Steve Jobs d’Apple », a-t-il ajouté.

Beaucoup s’étonnent par ailleurs que le conseil d’administration ait jugé utile de révéler les accusations de harcèlement sexuel dont faisait l’objet Mark Hurd alors l’enquête diligentée en interne avait montré que le délit n’était pas constitué et surtout qu’un arrangement avait été trouvé avec la plaignante, la désormais fameuse Jodie Fischer.

D’ailleurs, toujours selon le New York Times, citant un proche de Mark Hurd, la question de la révélation de cette affaire s’est avéré être le principal point de désaccord entre Hurd et le conseil d’administration lors de la négociation qui a précédé l’annonce de son éviction, Hurd ne comprenant pas que HP veuille absolument rendre l’histoire publique. Apparemment, HP aurait tout simplement eu peur que l’affaire sorte quand même, ce qui aurait eu un impact encore plus désastreux en terme d’image qu’en jouant la transparence.

Reste que les faits incriminés paraissent bien légers au regard de la sanction prononcée. Du coup chacun spécule sur les véritables raisons qui ont convaincu HP de se doter d’un nouveau PDG. Le Wall Street Journal révèle ainsi que, juste avant sa disgrâce, Mark Hurd était en train de renégocier son salaire, exigeant 100 millions de dollars garantis sur trois ans. Des prétentions qui n’auraient pas eu l’heur de plaire au conseil d’administration et qui auraient précipité sa chute.

De son côté, Computerworld suggère que HP cherchait tout simplement un nouveau profil pour intégrer les dernières acquisitions et relancer la croissance après l’ère Hurd consacrée à couper les coûts et à rationnaliser l’entreprise.

Un nouveau visage pour incarner la nouvelle stratégie d’un conseil d’administration de toute façon seul maître à bord, comme s’est plu à le suggérer à plusieurs occasions Cathie Lesjak, la directrice financière du groupe, nommée PDG par intérim, notamment en déclarant vacharde que l’entreprise n’aurait pas à souffrir du départ de Mark Hurd, ou que s’il avait été un bon manager, c’est l’organisation que le soutient qui prenait les initiatives.

Toujours est-il que le départ de Mark Hurd ne fait pas que des malheureux : autant le patron de HP était célébré par Wall Street, autant il avait mauvaise presse auprès des salariés qui se réjouissent ostensiblement de sa démission sur les nombreux forums consacrés à ce thème. Il suffit de lire à cet égard le billet publié sur le site de Voice of HP Workforce. Peut-être que le ras-le-bol des salariés n’est tout compte fait pas sans rapport avec l’éviction de Mark Hurd.

C’est en tout cas la conviction d’un chercheur de Stanford, Chuck House, cité par Information Week, qui explique que les salariés « se sont sentis violés par Mark Hurd lorsqu’il a mis un terme au principe de partage des bénéfices en vigueur depuis soixante-cinq années au sein de l’entreprise au profit de bonus indécents pour lui-même et pour ses cinq mignons préférés ». Une opinion qui reflète en tout cas celle de beaucoup de salariés exprimées ici et là.