On peut dire que Mark Hurd, le coprésident d’Oracle, a marqué les esprits en venant à Paris le vendredi 24 novembre. Avec quelque 300 clients présents, il a fait salle comble et a ravi les participants en leur servant un discours visionnaire, très cloud oriented, qui a permis de faire oublier temporairement les sempiternelles discussions sur sa politique de licences.
Au-delà de leur intérêt pour les innovations d’Oracle et pour les changements induits par le Cloud, les clients ont été semble-t-il particulièrement séduits que Mark Hurd paye de sa personne. Une démarche en rupture par rapport aux habitudes de Larry Ellison qui a toujours été avare de ses apparitions en France.
Un discours ambigu sur le IaaS et le PaaS
Mais si l’accueil été très chaleureux côté cour, côté jardin il a été plus mitigé. La veille Mark Hurd a en effet personnellement présidé le French Partner Advisory Board, un cénacle d’une dizaine de partenaires de premier plan, qu’Oracle réunit trimestriellement pour partager sa stratégie et échanger sur les problématiques du channel. Point positif, les partenaires ont apprécié la forme. «Même si le personnage n’est pas particulièrement sympathique, on peut l’interrompre, discuter. Il y a une véritable interaction», souligne un participant.
En revanche, sur le fonds, le patron d’Oracle a semble-t-il été moins convaincant. Mark Hurd a énormément parlé SaaS, pour souligner la profondeur et la pertinence de l’offre d’Oracle, mais n’a rien dit ou pas grand chose sur le PaaS et le IaaS, c’est-à-dire sur la disponibilité de ses outils d’infrastructure (notamment sa base de données) et de son middleware en mode souscription sous forme de service. Deux sujets pourtant capitaux pour la majorité de ses partenaires qui identifient une vraie demande non satisfaite.
Les licences Oracle ne sont toujours pas virtualisables
« Le problème fondamental auquel nous sommes confrontés aujourd’hui est celui des licences, qui ne sont légalement pas virtualisables, explique un partenaire. Par exemple, on ne peut pas mutualiser des infrastructures Oracle, ni même mettre des produits Oracle sur un cloud privé mutualisé ou un cloud public. On ne peut donc pas vendre de services Cloud sur la base des technologies Oracle. Seule exception possible pour être conforme : acquérir une machine OVCA (Oracle Virtual Compute Architecture) et poser dessus les licences requises pour chaque client. »
Les partenaires savent néanmoins que l’arrivée d’offres IaaS et PaaS est inéluctable. S’il est resté ambigu sur le calendrier, Mark Hurd y a fait abondamment référence – au risque de paraître déconnecté du terrain et de ses troupes qui n’ont rien d’autre à pousser que les licences traditionnelles. Mais les partenaires craignent par-dessus tout qu’Oracle limite la disponibilité de ses offres en mode PaaS à son propre Cloud. Ces dernières seraient probablement accessibles à la revente pour ses partenaires mais ceux-ci se demandent quelle pourra être leur valeur ajoutée à relayer un service opéré par un tiers.
Oracle prêt à concurrencer ses partenaires sur le PaaS ?
« Mon métier c’est de vendre des bases de données, de les installer et de développer des interfaces entre ces bases de données et les progiciels des clients. Si demain Oracle commence à vendre des bases de données en mode souscription hébergées dans son Cloud, cela me posera des problèmes car Oracle me concurrencera sur mon métier », déplore un gros VAR de l’éditeur. Il se rassure néanmoins en se disant que le marché ne va pas basculer du jour au lendemain et, quand bien même l’adoption serait plus rapide qu’escompté, il resterait toujours des besoins spécifiques non couverts et des problèmes opérationnels à résoudre.
Du reste, ce dernier est conscient que tous les partenaires d’Oracle sont logés à la même enseigne, y compris les géants des services tels Atos, Capgemini, Accenture, qui se plaignent tous du raccourcissement des projets lié à la montée en puissance de SaaS. Le SaaS, dont les ventes – c’est l’une des informations de l’intervention de Mark Hurd – se comptent désormais en milliards de dollars et représente le double de la valeur ajoutée du on-premise.