The Green Grid – qui regroupe les principaux acteurs impliqués dans la mise en place de datacenters – lance EDE (Electronics Disposal Efficiency), la première métrique pour aider les organisations IT à mesurer leur gestion responsable des actifs TIC déclassés.


LeMagIT : Quelle est en quelques mots l’action de The Green Grid ?

André Rouyer : Green Grid est en fait un consortium international créé il y a six ans aux Etats-Unis et qui regroupe désormais plus de 100 sociétés dans l’informatique et les communications. Historiquement, nous travaillons sur l’efficacité énergétique des datacenters mais plus largement sur l’ensemble des infrastructures IT. Green Grid développe des métriques et crée de la « matière » à partir de projets mis en place en fonction des sujets qui émergent autour de l’efficacité des ressources au sens large (énergie, eau mais également carbone). Aujourd’hui, nous nous intéressons à l’ensemble du cycle de vie IT, bien au-delà du datacenter. Green Grid s’est également donné pour mission d’assurer un rôle d’interface avec les régulateurs, les états et les organismes de normalisation.


LeMagIT : The Green Grid se propose désormais de suivre avec précision les circuits de recyclage ou de gestion des déchets IT. Quel est la finalité de l’EDE, l’indicateur créé dans ce cadre ?

A.R : Il s’agit d’une nouvelle métrique qui étend notre approche dans la mesure où au départ, nous nous concentrions plutôt sur les seules opérations liées aux datacenters. Notre réflexion nous a cependant peu à peu conduits à regarder le cycle de vie global en matière d’infrastructures IT, de l’éco design au recyclage. Nous avons donc élargi notre vision sur la base d’un livre blanc portant sur l’analyse de la consommation du datacenter. Ce qui nous a conduits à créer l’EDE qui consiste à mesurer les niveaux de produits recyclés par rapport à un poids total de produits obsolètes, qui ne sont plus utilisés. Plus précisément, cela va permettre de déterminer le pourcentage de déchets produits par un établissement, en fonction du nombre d’unités ou du poids (matériel informatique), qui est mis au rebut par le biais d’entités responsables. L’EDE examinera également comment le matériel informatique est réutilisé, soit partiellement, soit dans son intégralité, et considèrera de manière impartiale si les composants ont été correctement recyclés.

Il ne s’agit pas de comparer les sociétés entre elles quant à leur comportement mais bien d’améliorer la manière dont sont gérées les fins de vie des produits. Si une partie de la gestion de la fin de vie du matériel IT, notamment en entreprises, peut être cadré par des règlements nationaux ou internationaux, il était indispensable de mettre en place une métrique pour évaluer les évolutions.

LeMagIT : Avec les crises et l’émergence de nouvelles technologies comme le cloud computing ou le Big Data, on a le sentiment que le Green IT est passé au second plan. Qu’en est-il exactement dans les entreprises ?

A.R : En fait, ce sont des choses difficiles à appréhender. Effectivement, d’un point de vue médiatique, cela « buzz » moins mais en Europe par exemple, la Commission européenne continue de travailler sur ces sujets pour imposer des standards et travailler à la normalisation dans un contexte de discussion consensuelle. Il faut tout de même noter que ces processus de décision prennent 3 à 5 ans. Donc entre le début du discours, lorsque l’on voit émerger les concepts, et les résultats concrets, il y a nécessairement du temps. C’est d’ailleurs impératif si l’on travaille sur le fond. Au final, l’important ce n’est pas tant d’en parler que de travailler sur la pression des institutions et sur la capacité à harmoniser les politiques afin d’avoir une véritable efficacité. Avec l’EDE, chez Green Grid, nous essayons d’avancer un peu plus loin et de proposer un support métrique aux organismes de normalisation. Les sujets doivent être travaillés, nourris, remontés vers les décideurs pour qu’un consensus se dégage dans un contexte de forte hétérogénéité au niveau des acteurs.

LeMagIT : Y a-t-il une accélération de l’obsolescence des équipements ou au contraire, dans une logique de coût et de meilleure qualité, les cycles de vie des produits ont-ils tendance à s’allonger ?

A.R : En fait, jusqu’à présent la vitesse du renouvellement technologique était le fait de l’offre et de l’évolution du portefeuille produit disponible. Aujourd’hui, on sent cependant un ralentissement de cette tendance. Dans ce contexte, la consommation énergétique et la performance sont des critères importants dans le choix du renouvellement. En rajoutant une métrique globale, cela permet également d’observer que parfois le renouvellement crée du rejet de matériel, mais pour une conséquence globalement positive du point de vue de la consommation de ressource globale. Ca peut valoir la peine de produire des serveurs beaucoup moins gourmands, quitte à accélérer certain remplacement. Cette vision globale du cycle de vie est réellement novatrice et positive. Sur ce sujet, il est à noter que l’Europe est innovante et en avance, notamment dans l’approche globale intégrant déchets, production de carbone et gestion des énergies. Le sujet avance, mais le niveau d’ambition et de complexité fait que l’on est sur un rythme un peu lent, correspondant à la vitesse du consensus qui doit se dégager.

LeMagIT : Quelles sont aujourd’hui les filières mises en place pour recycler voire réutiliser les infrastructures IT et quelle est l’implication des fournisseurs d’une part et des pouvoirs publics d’autre part ?

A.R : Les grandes entreprises sont investies dans un cadre de responsabilité globale. Du coup, elles adoptent facilement l’idée et mettent en œuvre des process pour le recyclage. Il existe depuis des années des sociétés de recyclage engagées sur l’IT. Aujourd’hui, si l’on étend à la techno au-delà de l’IT, le marché est énorme.

Dans les années à venir, l’idée, c’est vraiment d’avoir un indicateur de type PUE. Il faut pouvoir suivre ce ratio simple en proposant aux sociétés d’adhérer. Toute une organisation va se mettre en place à commencer par les grandes sociétés. L’évolution dans le temps est importante pour pouvoir progresser. Ce type d’indicateur permet de l’auto-motivation sur des objectifs de développement durable. Les 3 pôles : consortium, normalisateurs, gouvernement doivent travailler ensemble pour pousser aux bonnes pratiques en la matière.

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