L’information a de quoi surprendre. Alors que groupe Solutions 30 est coté en bourse, que son activité est en développement rapide (+19,4% en 2020 dont +14% en organique) et que sa situation financière est parfaitement saine (trésorerie de 152 M€ à fin juin 2020), trois de ses filiales, représentant au total environ 140 collaborateurs, font actuellement l’objet d’une procédure de redressement judiciaire. Il s’agit des sociétés Telima Infoservices (TIS), Telima Professional Services (TPS) et Telima Onsite (TOS).

Ces sociétés font partie de l’unité d’affaires du groupe dédiée au secteur IT. Elles réalisent via des techniciens itinérants des interventions sur site de maintenance ou de remise en service de matériels IT dans le cadre de contrats de maintien en condition opérationnelle. L’une de ces sociétés, Telima Professional Services, est issue de la reprise en 2017 par Solutions 30 de l’activité de support informatique de proximité de Fujitsu France.

« Ces trois sociétés sont en grande difficulté depuis des années, justifie Nathalie Boumendil, directrice de la communication du groupe. Elles évoluent sur un marché qui s’est fortement transformé ces dernières années. Lorsqu’un matériel tombe en panne, les clients demandent de plus en plus qu’on remplace leur matériel – et éventuellement qu’on le répare en atelier – et non plus qu’on le répare sur place. La mission des techniciens de terrain a donc changé. Cette prestation est moins rémunératrice. D’où les pertes d’exploitation récurrentes des sociétés qui les emploient ». De fait, les trois sociétés font des pertes conséquentes sur leur exercice 2019 (dernier publié), représentant jusqu’à 57% du chiffre d’affaires dans le cas de TPS. Sur son exercice 2020, Solutions 30 a constaté un recul de 12,5% de son activité IT en France.

Après les avoir « longtemps soutenues » et avoir entrepris « de nombreux efforts pour les pérenniser », Solutions 30 s’est donc résolu à placer ces trois entités sous la protection du tribunal de commerce début novembre dans le cadre d’une procédure de sauvegarde. Une procédure qui a été convertie en redressement judiciaire le 15 mars dernier.

« Pourquoi cette procédure collective, s’étonne un salarié de TPS ? Le groupe est boni et enregistre de confortables revenus. S’il s’agissait d’organiser un plan de sauvegarde de l’emploi, il n’était pas nécessaire d’enclencher une telle procédure au risque de faire supporter les indemnités de licenciement des salariés par la collectivité ». Le même salarié met en doute les motivations économiques de Solutions 30. « On nous dit qu’il y a moins d’interventions et qu’il n’y a plus d’argent. On pense que le chiffre d’affaires est en réalité toujours là mais qu’il est dispatché à d’autres entités du groupe. Lors du transfert de son activité support informatique de proximité à Solutions 30 mi-2017, Fujitsu s’était engagé à lui assurer plus de 50 M€ de contrats sur 5 ans, soit 10 M€ par an. »

Et de pousser son raisonnement : « À l’époque, Solutions 30 avait besoin de nous pour assurer la continuité des contrats Fujitsu. Nos salaires et nos âges élevés n’étaient soi-disant pas un problème. Le groupe nous reprenait pour nos compétences et notre savoir-faire. On devait incarner la valeur ajoutée du groupe. En réalité, on a formé des salariés d’autres entités du groupe sur nos contrats ainsi que des auto-entrepreneurs travaillant pour le groupe. Et maintenant, ils veulent se débarrasser de nous. »

Au cours de la procédure de sauvegarde, l’administrateur judiciaire a tenté d’améliorer la structure de bilan des trois sociétés en proposant des baisses de salaire dans le cadre d’un accord de performance collective. Une proposition refusée par près de 90% des salariés concernés chez TPS : les salaires proposés étaient juste au-dessus du Smic, soit autour de 1.500-1.600 € brut par mois, assortis d’un variable à définir, alors que la plupart gagnent actuellement entre 2.500 et 3.000 € brut par mois et ont 20 à 35 ans d’ancienneté.

Une nouvelle consultation relative à des réductions des salaire, organisée cette fois par la direction, a été lancée mi-avril. Le résultat sera connu début mai et sera débattu lors d’une nouvelle audience au tribunal fin mai.