Quand la demande dépasse l’offre, le terrain devient propice à la contrefaçon. Plusieurs experts estiment que la pénurie mondiale de puces va accélérer l’entrée de semi-conducteurs contrefaits sur le marché.

« Je ne pense pas du tout qu’il y ait une prise de conscience dans l’industrie », déclare Michael Pecht, fondateur de CALCE (Center for Advanced Life Cycle Engineering), à notre consoeur de ZDNet. « Les entreprises pensent trop à répondre aux demandes du calendrier et pas vraiment à la question des contrefaçons. Je suis particulièrement préoccupé par les industries médicales et militaires, toute activité liée à la sécurité – y compris l’automobile. »

« Si la semaine prochaine, vous devez vous procurer 5.000 puces électroniques sans quoi votre ligne de production devra s’arrêter, vous serez dans une situation de détresse et aurez tendance à baisser la garde », ajoute Diganta Das, chercheur en contrefaçon électronique au CALCE, et également interviewé par ZDnet. L’expert surveille régulièrement des bases de données de signalement des contrefaçons comme l’ERAI. Il est convaincu que le nombre de signalements va augmenter au prochain semestre, quand des entreprises se rendront compte qu’on leur a vendu des pièces illégales.

Les risques liés à l’usage de puces contrefaites, notamment la panne, ne doivent pas être sous-estimés.

S’il est peu probable que le problème touche les géants technologiques qui tendent à acheter directement leurs composants auprès des fabricants de puces, en revanche, les PME font souvent appel à des distributeurs tiers. Qu’ils soient franchisés ou indépendants, ces distributeurs sont un élément central de la chaîne d’approvisionnement des semi-conducteurs. Le cabinet d’analystes McKinsey estime qu’ils gèrent près d’un quart des revenus de l’industrie des semi-conducteurs à l’heure actuelle.

Diganta Das conseille d’être vigilant lors de l’achat : vérifier les registres du distributeur qui vend les composants et effectuer des tests approfondis sur les pièces reçues. Selon M. Pecht, les entreprises n’auront d’autres choix que de procéder systématiquement à ces contrôles préalables, quel que soit le temps que ça prend. Cela peut aller d’une simple radiographie pour vérifier les dimensions internes du produit à l’usage de technologies spécialisées pour s’assurer que la surface de la puce n’a pas été grattée et regravée.

Ce ne serait pas la première fois que des perturbations de la chaîne d’approvisionnement en composants électroniques déclenchent une vague de produits contrefaits. En 2010, en plein boom de la demande de PC, une affaire de faux processeurs agitait le milieu de la distribution de composants aux Etats-Unis.

Selon Steve Calabria, fondateur du distributeur indépendant PC Components et membre de l’Independent Distributors of Electronics Association (IDEA) : « Quand une petite entreprise dispose de quantités importantes de pièces en période de pénurie, ce qui semble trop beau pour être vrai est effectivement trop beau pour être vrai ».