Ainsi que le reconnaissait récemment Pierre-Yvon Mechali, DGA d’Ingram Micro, les grossistes subissent de plus en plus la concurrence des sites marchands. Mais leur relation est plus ambigüe qu’il n’y paraît.

Le problème des prix d’achats revendeurs plus élevés que les prix publics des sites marchands s’amplifie. Dernier exemple en date pioché sur le site de la Communauté des revendeurs informatiques : celui d’un portable Asus (réf : F5RL-AP336C) dont le prix public conseillé est 599,39 € TTC. Après comparaison des tarifs de deux grands grossistes généralistes, le meilleur prix revendeur pour ce produit était de 458,12 € HT le 21 octobre, soit 547,92 € TTC hors frais de port. Or ce même produit était proposé simultanément à 539 € TTC sur Pixmania (en passant par Clubic) et à 569 € TTC sur LDLC.

Les sites marchands disposent de plates-formes logistiques comparables à celles des grossistes

Cet écart de prix, qui n’est pas spécifique à Asus et qui se retrouve sur un grand nombre de marques, illustre parfaitement la situation de la distribution informatique. Les grossistes traditionnels sont de plus en plus concurrencés sur leur propre terrain par les sites marchands qui disposent désormais de plates-formes logistiques comparables voire plus performantes que les leur. Une concurrence frontale dont des sites comme LDLC, Pixmania ou Cdiscount ne se cachent plus : en créant des équipes dédiées aux professionnels, c’est aussi les revendeurs informatiques qu’ils tentent de rallier à eux. Avec de plus en plus de succès du reste, comme l’attestent LDLC et Pixmania, pour qui le BtoB progresse plus vite que le BtoC.

Les plus agressifs sont Pixmania et Cdiscount

Il y a toutefois des nuances importantes entre les différents sites en termes de politiques commerciale. Les plus agressifs sont incontestablement Pixmania et Cdiscount qui jouent la carte du discount. LDLC, dont l’activité BtoB pèse 35% du chiffre d’affaires global, reste fidèle à son positionnement qualitatif en faisant en sorte de mieux respecter les prix conseillés des marques. De fait, ce dernier assure conserver d’excellentes relations avec les grossistes dont il reste un client important. Ce qui n’est pas le cas des autres qui se sont affranchis de leur tutelle en s’appuyant sur les centrales d’achat de leur groupe respectif (DSG/Dixons pour Pixmania et Casino pour Cdiscount).

Les revendeurs entre le marteau et l’enclume

Du côté des revendeurs, on est partagé sur la conduite à tenir. Faut-il soutenir coûte que coûte les grossistes, quitte à perdre des clients, ou faut-il aller au plus offrant, quitte à scier la branche sur laquelle ils sont assis ? Le débat continue de faire rage. De fait, en passant leurs commandes directement auprès des sites marchands, ils contribuent à faire grossir les ogres qui risquent de finir par les manger. « En rendant accessible n’importe quelle référence en quelques clics, les sites marchands ont incontestablement réduit le nombre de revendeurs », analyse Gauthier Picquart, PDG de RueDuCommerce.

Les grossistes victimes consentantes ?

A l’inverse, Raphaël Marlier, directeur commercial de LDLC, en charge de l’activité Pro, ne s’estime pas du tout concurrent des grossistes traditionnels. Il fait remarquer à cet égard que les clients revendeurs qui commandent chez LDLC sont souvent de très petits revendeurs avec lesquels ne travaillent pas les grands grossistes. Il relève également que, dans la plupart des cas, les cotations spéciales dont bénéficient les sites marchands de la part des marques et qui leur permettent de vendre moins cher, transitent par les grossistes. En clair, les grossistes sont « partie prenante voire à l’origine » des deals qui permettent ensuite aux sites de les concurrencer.

Des relations bien ambigües dont les revendeurs s’accommodent mal si tant est qu’ils ne sont pas tout simplement les dindons de la farce.