Après 9 mois de rebondissements, la commission a donné son feu vert au rachat de Sun par Oracle. Farouchement opposé à la fusion, le créateur de MySQL espère à présent un véto de Pékin ou de Moscou.

 

Bruxelles n’aura pas attendu la date butoir du 27 janvier pour rendre un avis définitif sur le rachat de Sun par Oracle. Comme on s’y attendait depuis la mi-décembre, lorsque la Commission avait jugé constructives les propositions faites par l’éditeur, cet avis est positif.

« Je suis convaincue que la concurrence et l’innovation seront préservées sur l’ensemble des marchés en cause. Le rachat de Sun par Oracle est susceptible de redynamiser des actifs importants et de donner naissance à de nouveaux produits innovants », a déclaré Neelie Kroes, Commissaire à l’Agenda numérique qui, après un premier mandat, vient d’être confirmée à ce poste.


« Bien que MySQL et Oracle soient en concurrence sur certains segments du marché des bases de données, elles ne le sont pas directement sur d’autres. C’est le cas, par exemple, pour le segment haut de gamme, » peut-on lire dans la déclaration officielle qui par ailleurs lève les doutes concernant l’avenir de Java, Oracle n’ayant « aucun intérêt à restreindre l’accès de ses concurrents aux droits de propriété intellectuelle liés à Java, car cela compromettrait les bénéfices résultant de la large adoption de cet environnement. »


La pétition lancée par un des fondateurs de MySQL, Michael Widenius et par son ancien bras droit, Florian Mueller, contre cette fusion n’a donc pas atteint son but.


La Commission y a répondu de manière indirecte en affirmant qu’une autre base de données ouverte, PostgreSQL, était considérée par les tenants du logiciel libre « comme une alternative crédible à MySQL et pourrait dans une certaine mesure remplacer la force concurrentielle que cette dernière représente actuellement sur le marché des bases de données ». Elle a par ailleurs estimé que des «forks» (logiciels basés sur le code de MySQL), « pourraient également être développés à l’avenir et exercer rapidement une pression concurrentielle suffisante sur Oracle ».


PostgreSQL : une alternative peu crédible ?


Ces propos ont provoqué la réaction outrée de Florian Mueller. Ce dernier a envoyé un mail à plusieurs confrères américains dans lequel il affirme que PostgreSQL n’ayant jamais réussi a percer sur le marché ne peut constituer une alternative crédible et que par ailleurs les « forks » n’ont aucune chance de menacer le monopole d’Oracle.


Les responsables de la croisade anti-Oracle tournent à présent tous leurs espoirs vers la Russie et la Chine qui doivent elles aussi donner leur feu vert. Il y a peu de chances toutefois que ces pays se laissent impressionner par les 35.000 signatures recueillies par la pétition.


D’ailleurs Larry Ellison considère ces assentiments comme acquis. Il a ainsi convié les journalistes à une conférence de presse fleuve (5 heures) le 27 janvier pour dévoiler la feuille de route de la fusion. Si l’on en croit l’invitation qui évoque l’intégration de tous les composants des offres Oracle et Sun ainsi que la poursuite des investissements dans SPARC, Solaris et Java, l’éditeur n’a pas l’intention de se défaire d’une once de produit.


Vaste projet. Pour le réussir il lui faudra rassurer à la fois les clients de Sun qui, ainsi que le démontre la perte abyssale de ce dernier au 3ème trimestre (120 millions de dollars), fuient vers la concurrence et un réseau découragé par les incertitudes qui ont pesé sur l’avenir du constructeur. Il faudra aussi remotiver les salariés inquiets par les rumeurs de licenciements. Un analyste de Bloomberg n’évoquait il pas récemment le départ de la moitié du personnel ? D’ailleurs, si une chose semble bel et bien acquise, c’est une nouvelle coupe sombre dans les effectifs.