L’annonce des difficultés de Kosc Telecom n’a pas manqué de créer des remous parmi les opérateurs alternatifs. Beaucoup se sont montrés inquiets de la situation de l’opérateur d’infrastructures et des conséquences que cela pourrait avoir sur eux s’il ne parvenait pas à se refinancer.

« Kosc Telecom bataille depuis trois ans pour ouvrir le marché de la fibre en faisant émerger un marché de gros pour les opérateurs alternatifs à des conditions techniques et commerciales équitables, témoigne Laurent Silvestri, directeur des opérations d’OpenIP. J’espère qu’ils pourront poursuivre leur activité en restant neutres et indépendants sans quoi la digitalisation des PME pourrait s’en trouver fortement ralentie ».

En réalité, c’est surtout la croissance des opérateurs alternatifs tels que OpenIP et ses homologues Adista, Unyc (ex-ServeurCom)… qui pourrait s’en trouver pénalisée, les grands opérateurs (Orange, SFR, Bouygues et Free) n’ayant jamais joué le jeu des ventes en gros. Alors que Kosc n’est en mesure de livrer que depuis janvier dernier, le FTTH représente d’ores et déjà près de la moitié des ventes ADSL d’OpenIP, assure Laurent Silvestri.

Certes, l’offre de connectivité FTTH en gros ne risque pas de se tarir, comme le souligne Damien Watine, président d’Unyc, les opérateurs intégrés et les opérateurs de réseaux d’intérêt public ayant commencé à embrayer le pas à Kosc en lançant leurs propres offres FTTH de gros. Bouygues en a une depuis quelques mois, SFR s’apprête à lancer la sienne et Orange se lancera dès que l’Arcep le lui permettra. Mais Kosc a été le premier et surtout se positionne sur un modèle 100% wholesale (vente en gros), celui qu’affectionne le plus les opérateurs alternatifs car c’est celui que prend le mieux en compte leurs besoins.

C’est donc au moment où les ventes décollent que l’Autorité de la Concurrence décide de dédouaner SFR dans le litige qui l’oppose à Kosc, en estimant qu’aucun élément ne permet de caractériser le non-respect par Altice France de ses engagements relatifs à la cession du réseau DSL de Completel dans le cadre du rachat de SFR. Et c’est apparemment en apprenant – un peu en amont – cette décision de l’Autorité de la Concurrence que la Banque des Territoires a décidé de ne pas participer à la nouvelle levée de fonds de 10 M€ que Kosc s’apprêtait à réaliser, plongeant ce dernier dans la crise. Sans doute que la Banque des Territoires a estimé que le tribunal de commerce risquait de s’appuyer sur cette décision pour exiger de Kosc qu’il paye les 15 M€ qu’il doit encore à Altice pour le transfert de l’infrastructure Completel et que Kosc bloque au motif du préjudice subi lié au retard de livraison. Une injonction de paiement qui fragiliserait encore plus Kosc.

Car Kosc n’a pas caché qu’il avait utilisé ces fonds pour poursuivre son activité. « Le fait est que Kosc a récupéré une infrastructure qui continue de perdre beaucoup d’argent et que le cash commence à manquer », persifle un concurrent. Mais ce dernier se veut rassurant : « on ne disparaît pas dans ce métier. Kosc sera nécessairement repris et la continuité des opérations sera assurée ». Un avis que partage Laurent Silvestri.

Mais, comme l’écrit Kosc Telecom dans un communiqué paru ce jour dans lequel il récuse la décision rendue par l’Autorité de la Concurrence et annonce saisir le Conseil d’État, l’opérateur « devient la cible privilégiée d’une acquisition hostile de la part d’opérateurs intégrés souhaitant renforcer leurs positions sur le marché des entreprises ». Une issue qui n’arrangerait pas les opérateurs alternatifs, qui perdraient là l’un de leurs meilleurs soutiens. À suivre donc.

Note du rédacteur : cet article a été révisé à 16h18 le 10 septembre pour nuancer et préciser certains points.