Seule en lice, l’offre de l’opérateur Altitude Infrastructure pour la reprise des actifs de Kosc Télécom a finalement été validée par le tribunal de commerce de Paris. Le président d’Altitude Infrastructure, David El Fassy, a accepté de répondre à nos questions sur les circonstances de cette reprise et les motivations d’Altitude.

Channelnews : Vous venez d’être choisi par le tribunal de commerce de Paris pour reprendre l’opérateur Kosc en plan de cession. Cette reprise intervient après des mois de tractations en coulisse entre les créanciers et les actionnaires. Parmi les créanciers : SFR qui a joué un rôle central dans la défaillance de Kosc. Ne pensez-vous que SFR a voulu éliminer Kosc et qu’Altitude pourrait en faire les frais à terme ?

David El Fassy : Non, je n’ai pas l’impression que SFR ait voulu tuer Kosc. L’un et l’autre avaient un réel différent. Kosc reprochait à SFR de ne pas lui avoir livré le réseau qui lui revenait dans les délais et les conditions attendus. SFR réclamait d’être payé et a bloqué le cash de Kosc au moment il en avait le plus besoin, le mettant dans une mauvaise posture. Peu importe ! Nous avions pris la précaution de trouver un accord avec SFR avant même de lancer le deal sur Kosc. Accord qui n’a finalement pas eu lieu d’être puisque, au lieu d’un plan de continuation, nous sommes finalement partis sur un plan de cession, sans reprise du passif. Mais on a déjà entamé les discussions avec SFR pour étendre le réseau fibre de Kosc dans les zones AMII, où il n’avait accès jusqu’ici qu’au réseau Orange.

Channelnews : Bien que vous ne repreniez pas le passif, vous avez accepté de revoir votre offre initiale et de payer 14 M€ pour emporter l’affaire. Pourquoi cette somme ?

David El Fassy : On croit très fort au modèle Kosc. Il y avait une offre concurrente et plusieurs marques d’intérêt. On voulait être sûr de l’emporter. On voulait aussi ne pas se mettre à dos les fournisseurs de Kosc – notamment Orange et SFR – qui l’ont aidé pendant la période d’observation. Cette somme va aussi permettre à ses actionnaires qui lui ont prêté de l’argent, toujours pendant cette période, de se rembourser. Enfin, une partie devrait aller au remboursement du passif.

Channelnews : Pourquoi jeter votre dévolu sur Kosc ?

David El Fassy : On fait un peu le même métier. À la différence qu’eux sont positionnés sur les zones denses [ou AMII pour appel à manifestation d’intention d’investissement] et très denses [ou ZTD] et qu’ils sont exclusivement tournés vers le segment entreprise alors que nous sommes sur les zones peu denses [ou ZMD pour zones moins denses] à plus de 85% sur le segment des particuliers. Pour autant, nos clientèles se recoupent quasiment à 100%. Si nos principaux clients sont les quatre opérateurs majeurs (Orange, SFR, Free et Bouygues), nous travaillons avec près d’une centaine d’opérateurs locaux, qui sont peu ou prou les clients de Kosc.

Channelnews : L’autre différence, c’est que Kosc n’est pas propriétaire de ses infrastructures fibre, quand vous vous exploitez les vôtres (en délégation de service public). Est-il prévu d’investir dans un réseau fibre en propre ?

David El Fassy : Peut-être cela viendra-t-il avec le temps. Mais la priorité est de continuer à investir dans l’outil de production existant et de couvrir les pertes d’exploitation le temps d’atteindre l’équilibre opérationnel. On a fléché 100 M€ d’investissements en quatre ans. On prévoit d’atteindre un Ebit (résultat d’exploitation) positif entre 2022 et 2023. À cette époque, Kosc devrait être aux alentours des 100.000 clients, contre 65.000 aujourd’hui.

Channelnews : Comment financez-vous cette opération et ces investissements ?

David El Fassy :  Exclusivement sur fonds propres. Le groupe Altitude va réaliser 370 M€ de chiffre d’affaires cette année et dégage une rentabilité qui lui permet de financer ces investissements.

Channelnews : Quels sont vos priorités pour Kosc dans l’immédiat ?

David El Fassy : Il va s’agir en quelque sorte de réveiller la belle endormie. L’équipe n’est pas en cause. Elle a été admirable. Seulement deux collaborateurs sur 62 ont quitté le navire pendant la période d’observation. Ils ont cru jusqu’au bout à l’avenir de Kosc. Ils ont même continué à engranger des ventes pendant la période : 4.000 nouveaux clients ont été engrangés – dont 500 pendant le confinement. Mais les difficultés financières ont inévitablement ralenti la dynamique. C’est notamment vrai sur la fibre dédiée. Autant les clients ont accepté de commander des services mutualisés, autant ils ont hésité à prendre le risque de se positionner sur du service dédié, qui implique des délais de mise en service élevés et qu’il aurait été compliqué de basculer en cas d’interruption d’exploitation.

Channelnews : Est-ce que Yann de Prince, le président de Kosc, va être associé à la nouvelle organisation ?

David El Fassy : Il est prévu qu’il nous accompagne en tant que conseiller pendant un temps. Mais il n’aura pas de rôle opérationnel. En revanche, l’ensemble de l’effectif est repris, y compris son directeur général, Antoine Fournier.