Gérald Karsenti vice président & directeur général des ventes du business entreprises de HP France, explique en quoi la méthode de transformation mise en place chez HP a permis de doper sa performance.


Channelnews : Vous venez de publier un ouvrage de management (aux éditions Pearson) consacré à la transformation des entreprises intitulé « Modèle 4×4 – Méthode globale de conduite du changement ». Dans quelle mesure la réorganisation en cours chez HP vous a-t-elle inspiré ?

Gérald Karsenti : Le contenu de cet ouvrage est bien évidemment tiré de mon expérience chez HP mais également de celle accumulée chez IBM, où j’ai passé 18 ans, et qui, tout comme HP aujourd’hui, a vécu cette transformation radicale consistant à passer de la fourniture de technologies à la fourniture de valeur.

Que voulez-vous dire ?


Gérald Karsenti : Les clients n’attendent pas qu’on leur explique que nos produits sont les meilleurs mais qu’on leur fournisse des solutions leur permettant de gagner en productivité et d’atteindre leurs objectifs. Ils ont besoin qu’on leur apporte des expériences vécues susceptibles d’être transposées chez eux.

Qu’est ce que cela change pour HP ?


Gérald Karsenti : Nous sommes confrontés à un double challenge : faire évoluer nos commerciaux et nos architectes pour qu’ils génèrent des projets à la fois plus importants, plus complexes et intégrant plus de valeur tout en maintenant la croissance des revenus en volumes. Cela suppose d’adopter une approche service et d’apporter de la différenciation. C’est ce que j’appelle la vente consultative par opposition à la vente transactionnelle.

En quoi consiste votre méthode et en quoi permet-elle d’atteindre cet objectif ?


Gérald Karsenti : La clé de la transformation des entreprises sur trouve dans la rapidité et la simultanéité. Pour réussir, il faut agir simultanément sur les quatre principaux capitaux de l’entreprise : l’humain, le technologique, l’organisationnel et le relationnel (l’écosystème). Chez HP, on a la chance d’avoir de bons produits et d’être un acteur global sur le plan des infrastructures et des services. Mais ce qui fait la différence ce sont les hommes. Pour cela, il faut investir. Notamment sur la formation.

Qu’avez-vous fait ?


Gérald Karsenti : Je vous l’annonce en primeur : nous venons de lancer notre école de management des affaires de HP France, un projet complexe et long à mettre en place. Cette université, qui démarre officiellement mi-décembre avec une promotion pilote de 15 personnes, mettra notamment l’accent sur la vente consultative. Elle est placée sous le patronage d’Eric Fimbel, professeur à la Reims Management School et sera animée par des intervenants venant de tous les horizons : HP Formation bien-entendu mais aussi universitaires et experts issus de chez nos partenaires. D’ailleurs, mon ambition est d’ouvrir rapidement cette école aux collaborateurs de nos principaux partenaires.

Et sur le plan organisationnel ?


Gérald Karsenti : Ça a été mon premier chantier en arrivant chez HP il y a trois ans : remobiliser les équipes, qui sortaient d’un plan social, et optimiser la couverture commerciale. J’ai mis en place une organisation à la fois très simple et très efficace : les cinquante premiers clients sont couverts par des commerciaux dédiés HP avec l’appui du channel et tous les autres clients sont suivis par le channel avec l’appui de HP. Le channel n’est exclu d’aucun client car nous pensons que nos partenaires ont besoin de masse critique. Toutefois leur rôle devient vraiment prépondérant à partir du cinquantième client où ils pèsent jusqu’à 80% de nos ventes.

Est-ce tout ?


Gérald Karsenti : J’ajouterais un dernier facteur de réussite : avoir une stratégie claire. Il est impossible de courir tous les lièvres à la fois. Certes, nous poursuivons une stratégie d’acteur global sur le marché des infrastructures. Nous avons d’ailleurs dépassé IBM sur ce plan, qui a abandonné des pans entiers de son activité pour monter dans les services. Mais, nous avons défini une dizaine de programmes de croissance (notamment le calcul haute performance, la transformation du datacenter, l’élaboration de centres de SOA, l’externalisation…) auxquels nous nous tenons strictement.

Ce travail de réorganisation porte-t-il ses fruits ?


Gérald Karsenti : Je vous laisse en juger : la France (division TSG) a été la filiale européenne la plus performante du groupe en 2009 en termes de croissance. Nous sommes désormais numéro un du marché sur les serveurs et nous gagnons des parts de marché sur le stockage et les réseaux. La signature de l’accord Alcatel, qui se chiffre en milliards d’euros, est le couronnement de cette stratégie. C’est un deal d’une ampleur sans précédent qui n’était pas envisageable il y a 3 ans avec l’approche commerciale que nous avions. D’une manière générale, la taille de nos affaires a sensiblement augmenté. Par exemple, lorsque nous avons racheté Mercury, la taille moyenne des contrats était de 700 à 800 K€. Désormais, ils dépassent couramment les 5 M€. Le seul fait d’être passé dans un environnement HP global, a fait grossir la taille des deals.

Est-ce que ces principes de changement s’appliquent également au channel ?


Gérald Karsenti : Oui. La logique est la même. Mais tout dépend de la stratégie que les partenaires veulent mettre en œuvre. Ils sont aux premières loges pour amener à nos clients la valeur qu’ils attendent. Ils doivent pour cela couvrir différemment leur marché former différemment leurs collaborateurs, faire évoluer leur méthodologies et avoir une stratégie claire. Mais je dois dire que nous avons un solide réseau de partenaires, très conscient que le marché a bougé et de la nécessité de s’adapter.