La distribution informatique traditionnelle a toujours le plus grand mal à s’insérer dans la chaîne de valeur du Cloud. C’est le constat qui s’impose à l’issue de l’édition 2016 des Etats Généraux du Cloud, qui se tenaient aujourd’hui à Paris. Malgré la participation, en tant que sponsors, du grossiste Arrow ECS et de quelques-unes des marques les plus influentes de la distribution IT telles IBM, HP ou Netapp, les revendeurs, VARs, intégrateurs et autres prestataires de services IT étaient très rares sur place. Une absence de représentants de la distribution que l’on pouvait aussi constater à l’occasion de la table ronde consacrée à la place du channel dans le Cloud, intitulée « Cloud et Channel, Je t’aime, moi non plus ». Plusieurs porte-paroles de grandes marques (Arrow ECS, Netapp, Juniper, Orange Business Services) y ont longuement expliqué en quoi vendre du Cloud était largement plus rémunérateur et générateur d’opportunités pour les acteurs de la distribution, sans vraiment jamais aborder le sujet de fond : pourquoi la distribution continue-t-elle de se tenir à l’écart du Cloud ?

Face à un marché qui représente désormais 11% de l’ensemble du marché français des logiciels et services informatiques et qui continue de grossir de 20% par an, Les marques font pourtant de gros efforts pour s’adapter à la nouvelle donne et accompagner leurs partenaires dans l’adaptation de leur propre modèle économique. « Un channel ne se transforme pas sans mettre de l’argent sur la table » a résumé de manière lapidaire Frédéric Braut, DG France d’Arrow ECS. Le grossiste sait de quoi il parle, il a affecté pas moins d’une cinquantaine de développeurs à la création et à la mise en production de sa place de marché Cloud Arrowsphere, clé de voute de sa stratégie Cloud. Même Orange Cloud for Business, qui a créé une division ventes indirectes au début de l’année, semble avoir admis, par la voix de son directeur commercial Gilles Lelouat, qu’il est important pour les partenaires de garder la maîtrise de la relation avec les clients finaux et donc de ne pas avoir de relation contractuelle avec les clients de ses partenaires. Mais alors pourquoi ce désintérêt de la distribution ?

En off, dans les couloirs, certains ont leur petite idée. Pour l’un d’eux, ancien patron d’une société de services pure player Cloud, les seuls grands gagnants de l’ère du Cloud dans le domaine des infrastructures sont sont les Google, Amazon et Microsoft Azure. Des acteurs qui, mis à part Microsoft, ne brillent par leur politique de vente indirecte. Tous les autres acteurs issus l’IT traditionnelle courent après le train sans jamais le rattraper. Non seulement, leur business Cloud est inexistant contrairement à ce qu’ils essayent de faire croire, mais leur business traditionnel est en plein déclin puisque, au fur et à mesure qu’ils migrent dans le Cloud, les clients finaux leur achètent de moins en moins d’infrastructures. Quant aux grands fournisseurs de services Cloud, ils conçoivent leurs propres infrastructures et les font directement produire par les usines asiatiques sans passer par les grandes marques traditionnelles.

Du côté des éditeurs SaaS, c’est aussi très compliqué pour la distribution. « Le SaaS ne va pas dans la direction de l’indirect », constate un bon connaisseur du marché des logiciels. Rares sont ceux qui savent reconnaître l’expertise conseil et intégration des prestataires de services qui ne font pas d’achat-revente, juge-t-il. Autrement dit, sans engagement de chiffre d’affaires, les prestataires de services n’existent pas aux yeux des éditeurs, qui leur refusent les rémunérations et les avantages qu’ils donnent à leurs revendeurs traditionnels. Pourtant, ces éditeurs sont unanimes pour dire qu’ils ont besoin de partenaires fonctionnels. Mais ceux qui ont ces compétences hésitent à franchir le pas du Cloud privilégiant les éditeurs traditionnels capables de leur assurer leur besoin en fonds de roulement. Mais avec l’accélération du SaaS, les réseaux de distribution traditionnels risquent bien de voler en éclat, estime notre interlocuteur.