Suite à l’annonce du rachat d’Hornetsecurity par Proofpoint la semaine dernière, les réactions n’ont pas tardé à fuser de toute part dans le channel.
Nous avons choisi d’en publier deux. L’une est un coup de gueule que John-Alexis Priou, dirigeant-associé de l’entreprise de services numériques vendéenne Ozérim a publié le week-end dernier sur sa page Linkedin. Avec son autorisation, nous la reproduisons in extenso ci-dessous. L’autre est le témoignage recueillis par téléphone du patron d’un acteur de référence du channel IT français qui a souhaité ne pas être identifié.
Dans les deux cas, c’est le sentiment de trahison qui domine.
Post Linkedin de John-Alexis Priou :
« Nous avons reçu par mail une annonce qui agace voire qui énerve !
Une annonce où tu sens qu’on s’est bien foutu de ta gu****. 🤬 Une annonce à te dire : à quoi bon se battre ? Cette info, elle bouscule mes convictions, mes valeurs et celles de toute l’équipe d’Ozérim SAS.
➡️ 2024 : Vade racheté par Hornetsecurity
Historiquement, on est un revendeur de la solution Vade. Solution d’antispam/antiphishing/antimalware 100 % française 🇫🇷 qui était l’un des leaders mondiaux (oui oui !). Donc Ozérim était très fier de revendre cette solution. On n’est pas un gros partenaire en volume de vente ça c’est clair mais content et fier de proposer une solution 100 % française 🇫🇷. En 2024, Vade nous annonce qu’ils se font racheter par Hornetsecurity. Sur le coup on se dit « C’est qui ? ». Entreprise allemande 🇩🇪 avec des solutions de Cybersécurité hébergées en Europe (chez un hébergeur Européen 🇪🇺) qui va intégrer Vade dans son catalogue. Après échange avec eux : on est OK, rassuré et toujours aligné. On continue avec eux ! 🚀
➡️ 2025 : Hornetsecurity racheté par Proofpoint
À notre grande surprise, on apprend qu’Hornetsecurity se fait racheter par Proofpoint !! Proofpoint est assez connu dans le monde de la sécurité dans le monde et c’est un éditeur américain 🇺🇸.
Je résume : en 1 an seulement, Vade a fait : Français 🇫🇷 => Allemand 🇩🇪 => USA 🇺🇸. Et là clairement tout change ! Alors non je vais le dire différemment. Rien ne change TECHNIQUEMENT mais tout change en terme : administratif, tarifaire (pas tout de suite mais bientôt, on les connaît trop bien les américains) et surtout légal (bye bye souveraineté 😓) ! Maintenant que l’actionnariat est US, quelles lois vont s’appliquer sur les services d’Hornetsecurity… ? Et puis ça fait encore une solution Européenne (et de sécurité en plus) qui part chez les américains 🇺🇸.
Bref, je suis en colère mais en même temps pas forcément étonné ! Business is business. Le court-termiste prend toujours le dessus sur le long-termiste en Europe 🇪🇺. Chez Ozérim, c’est assez clair, Hornetsecurity risque prochainement de disparaître de notre catalogue.
➡️ Editeurs de sécurité Français 🇫🇷 et Européen 🇪🇺, on est à votre écoute ! »
Témoignage du patron d’un acteur de référence du channel IT français :
« L’annonce du rachat d’Hornetsecurity par Proofpoint tombe au mauvais moment pour l’Europe. Celui de la guerre commerciale de Donald Trump, qui la pousse à prendre pleinement conscience de sa dépendance technologique vis-à-vis de la Chine et des USA et à renforcer par tous les moyens sa souveraineté numérique. Ce rachat d’un champion européen de la cybersécurité montre que la loi de l’argent est plus forte que la parole des politiques, qui ne sont apparemment pas en mesure d’empêcher une opération contraire à ses intérêts. Hornetsecurity aurait été revenu à un acteur européen de type WithSecure, cela aurait été cohérent. Au lieu de cela, le groupe passe sous contrôle d’un acteur étasunien, détenu par un fonds de pension, Thoma Bravo, qui n’est pas connu pour sa philanthropie. On peut d’ailleurs se demander si ce dernier n’est pas tout simplement animé par la volonté d’éliminer un concurrent. En tout cas, en acquérant Hornetsecurity, qui venait lui-même de racheter nos deux champions nationaux de la cybersécurité, Vade et Altospam, Proofpoint s’achète une hégémonie en Europe. Je peux comprendre que les actionnaires d’Hornetsecurity aient pu céder aux sirènes de l’argent quand le chèque représente 6 ou 7 fois le chiffre d’affaires de l’entreprise. Mais l’absence de réaction de ceux qui défendent la cybersécurité européenne souveraine est le symbole même de l’incapacité de l’incapacité à lier discours politique et économie. »