Très active sur les fronts de la taxe professionnelle, de la formation et du statut JEI, l’Afdel veut peser sur le débat public et prouver sa légitilmité.Tour d’horizon avec son président, Patrick Bertrand.


Channelnews : Quel bilan tirez-vous de l’année 2010 ?


Patrick Bertrand : Nous avons vécu une nette accélération du nombre d’entreprises ayant adhéré à l’Afdel. Nous avons enregistré 60 membres supplémentaires et passé le cap des 200 membres cette année. Nous comptons aujourd’hui parmi nos adhérents les leaders du top 20 français de l’édition de logiciels. On y trouve des acteurs français comme Dassault Systèmes, Cegid, Berger-Levrault, Isagri, ESI Group, ou encore internationaux, comme Sage, Microsoft ou Salesforce.com. L’Afdel compte également beaucoup d’entreprises moyennes et de startups qui trouvent chez nous la dynamique qui leur convient. Mais plus que les chiffres, ce qui compte c’est que ces entreprises nous restent fidèles, s’impliquent et aiment leur association professionnelle. Notre dynamisme est donc le reflet de leur propre dynamisme.

Les organisations professionnelles doivent avoir des axes définis d’action. Les nôtres consistent à faire connaître notre métier – qui n’est pas assez connu – et à apporter des services à valeur ajoutée à nos membres. Nous avons ainsi des avocats qui peuvent conseiller nos membres sur les aspects réglementaires, des experts financiers qui apportent leur éclairage sur des aspects tels que les levées de fonds, des DRH qui interviennent sur des thèmes de gestion des ressources humaines.

Les partenaires de l’Afdel proposent également une offre d’affacturage FaaS, « factoring as a service ». Il est complété par une police d’assurance éditeurs, dédié aux métiers du logiciel et à ses responsables. Nous avons aussi créé avec la CICF, l’institution représentative de l’ingénierie, du conseil et de l’informatique qui gère la convention collective CICF-Syntec, une commission sociale et une hot line juridique et sociale.

Nous participons régulièrement au débat public, non seulement pour exprimer notre désaccord sur certains points, mais aussi pour faire des propositions. Nous avons ainsi été très actifs sur des sujets tels que la taxe professionnelle et la réforme du statut Jeune Entreprise Innovante. Nous essayons d’être très présents pour expliquer et encore expliquer. C’est notre rôle.

Enfin, nous sommes très actifs lorsqu’il s’agit de faire connaître notre métier aux étudiants.

Des messages structurés, des actions efficaces, des services dédiés, du networking, voilà, c’est cela une organisation professionnelle moderne !


Quelles sont vos relations avec Syntec Numérique ? On a constaté que certains membres du syndicat, comme Sage, rejoignaient l’Afdel.


Patrick Bertrand : Chaque organisation a son identité propre. L’Afdel s’est créée en rupture avec un modèle traditionnel d’organisation professionnelle. Aujourd’hui, ce qui compte, c’est d’être agile et de se réunir avec des organisations qui portent des métiers et défendent des sujets communs pour faire avancer la profession. C’est l’ADN de l’Afdel et c’est ce que nous avons fait avec la FIEEC qui regroupe notamment les industriels du numérique. Nous travaillons avec eux sans pour autant parler d’absorption de l’Afdel. Chaque organisation a son utilité et conserve sa latitude propre. Il est logique que des acteurs qui ne sont pas mono-métier participent à la FIEEC, ou au Syntec. Ce dernier porte un message remarquable sur le métier de SSII.

L’émulation n’empêche pas le respect mutuel, et peut même au final profiter à nos adhérents respectifs. Si l’Afdel a acquis une position d’organisation représentative en moins de cinq ans, c’est qu’elle répondait à un besoin, un besoin exprimé par des dirigeants modernes qui veulent se reconnaître dans leur organisation et mesurer au quotidien la valeur ajoutée de leur adhésion. C’est la ligne que s’est fixée notre conseil d’administration, sans regarder ce que font les autres.

Un débat centré sur l’organisation institutionnelle est décalé par rapport aux enjeux de notre pays et par rapport à chacun de nos métiers. Il est un peu anecdotique.

Notre rôle à tous est de faire comprendre aux décideurs politiques qu’investir dans les TIC est porteur de dynamique environnementale et créateur d’emplois.

Il y a une chose unanimement reconnue dans le monde entier: tous les pays qui ont réalisé des investissements dans les TIC ont eu le plus fort taux de croissance, y compris en période de crise. C’est un challenge formidable pour le gouvernement actuel et pour les candidats aux prochaines échéances de 2012.

Les relations paraissent un peu conflictuelles avec le gouvernement


Patrick Bertrand : Nous voulons être une force de proposition et une force de rassemblement. Nous sommes en phase avec le gouvernement pour assainir les finances publiques mais nous voulons qu’il change sa position sur le statut JEI. Nous avons démontré avec quatre ou cinq autres associations qu’il était dommage que le rabot passe aussi sur les entreprises de l’avenir, celles dont dépend notre capacité d’innovation future.

Nous avons réussi à faire partager cette opinion par certains députés et sénateurs de la majorité qui ont déposé des amendements pour préserver ce statut. Finalement, nous n’avons pas obtenu gain de cause mais nous avons réussi a attirer l’attention des pouvoirs publics. Il est utile de rappeler que 70% des emplois créés le sont par les PME.


Quels projets pour 2011 ?


Patrick Bertrand : Jusqu’à présent nous avons publié plusieurs livres blancs sur des sujets tels que les enjeux du cloud computing, le management de la R&D, les aides publiques à l’innovation dans le secteur du logiciel ou les bonnes pratiques en matière de fusions et d’acquisition. Il s’agissait d’expliquer et de populariser. Il n’est pas exclu que nous sortions encore cette année quelques documents explicatifs. Toutefois la logique de 2012 sera «moins d’éclairage et plus de force de propositions».

Nous participons au Comité de filière STIC, la partie opérationnelle des états généraux de l’industrie, admirablement présidé par Guy Roussel. Le Comité STIC ne manquera pas d’ouvrage. Nous allons entrer dans une période pendant laquelle il faudra expliquer à tous les candidats à l’élection présidentielle combien il est important d’intégrer une dynamique autour de la R&D. Par ailleurs, nous souhaitons intégrer le Conseil National du Numérique dont le groupe de préfiguration est piloté par Pierre Kosciusko-Morizet. Nous attendons de ce groupe qu’il traite également de politiques publiques en faveur de l’innovation et pas seulement de la gouvernance d’Internet.

Nous participons également à Pacte PME, l’association lancée par Henri Lachmann, qui s’intéresse aux relations entre les grands donneurs d’ordre et les PME. C’est une sorte de « Small Business Act » privé destiné à apporter aux PME des commandes et donc du cash flow afin qu’elles se développent. Cela dit, il nous faut également un « Small Business Act » public. Dans un pays comme les Etats-Unis, pourtant attaché au libre échange, les administrations doivent réserver 20% de leurs commandes publiques aux PME alors qu’en France les administrations ne sortent pas du cadre des grandes entreprises du logiciel. Pas toujours françaises d’ailleurs.

C’est d’autant plus important, que la politique qui consiste à ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux passe par le développement des TIC dans les administrations.

Nous allons également faire entendre notre voix, avec la CICF, sur les sujets de la formation et de la convention collective. Il faut savoir que le FAFIEC, l’organisme de branche qui gère les budgets de formation, n’a prévu quasiment aucune formation pour les métiers du logiciel et que ce sont les SSII qui bénéficient majoritairement du dispositif tel qu’il est. L’Afdel veut changer la donne et rééquilibrer les choses en faveur de l’édition de  logiciels.

Notre commission sociale va porter cela tout comme elle va aider nos membres sur des sujets tels que la gestion sociale à travers une hot line.

L’année 2011 ne manquera donc pas de sujets importants.