Le nouveau système d’évaluation des collaborateurs mis en place en juin passe mal auprès des instances représentatives qui dénoncent les biais aboutissant à classer les salariés et à évincer les moins performants.


Les instances représentatives du personnel (IRP) sont très remontées contre le nouveau système d’évaluation de la performance mis en œuvre au printemps par Microsoft France. Le CE et le CHSCT viennent tout les deux de mandater leur secrétaire en vue d’ester en justice pour entrave à leur rôle de consultation. En effet, Microsoft a « oublié » de leur demander leur avis avant de mettre en place son nouveau système. Les entretiens d’évaluation qui ont eu lieu en juin se sont tous déroulés à titre rétroactif selon les critères du nouveau système.

Mais surtout, ils pourraient décider d’attaquer sur le fond. « Pour la première fois, Microsoft grave dans le marbre le fait que son système d’évaluation est fondé sur la comparaison des performances de ses collaborateurs », estime un délégué syndical. Mieux, l’éditeur reconnaît selon lui l’existence d’une courbe de répartition des notes fixant à 7% la proportion attendue de collaborateurs sanctionnables de la plus mauvaise note (5) annuellement. Soit l’équivalent d’une centaine de personnes concernées chaque année sur un effectif officiel de 1500 personnes en France.

« Ces notions de comparaison et de courbe de répartition des notes sont en contradiction avec le droit de travail qui prévoit que l’on peut évaluer un salarié sur la base d’objectifs mesurables, poursuit notre délégué syndical. Il arrive ainsi que des collaborateurs ayant globalement atteint leurs objectifs se trouvent sanctionnés par le jeu des comparaisons et des calibrations [le mécanisme collégial qui permet d’ajuster les notes et qui conduit parfois à attribuer des notes à des collaborateurs contre l’avis de leur manager direct] ».

Les instances représentatives sont d’autant plus critiques à l’égard du nouveau système d’évaluation qu’il risque d’aggraver les risques psycho-sociaux pesant sur les salariés. Ce que confirme entre autres le rapport du cabinet de conseil indépendant Secafi, commandé pour l’occasion et dont la CFTC fait un compte-rendu détaillé sur son blog. Un rapport qui note au passage qu’alors que la part des « underperformed » (la plus mauvaise note dans l’ancien système d’évaluation) était jusque là inférieure au taux désormais attendu, 2% des collaborateurs ont saisi la médecine du travail en 2010 pour « des souffrances au travail induites par le système d’évaluation ».

Car l’issue est souvent fatale pour les salariés mal notés. « Cela se termine généralement par un licenciement pour manque de performance, note notre délégué syndical. Le pire, c’est la pression que certains managers mettent soudain à leurs collaborateurs uniquement pour justifier l’attribution d’une mauvaise note ». Selon lui, ce système n’a qu’un seul objectif : participer au renouvellement de l’effectif dans le but d’améliorer la performance globale de la société. Il rappelle que le turnover tourne annuellement autour de 10% en France, dont 4 à 5% de licenciements.