Dans le prolongement de notre article « Nutanix revendique une longueur d’avance sur VMware » publié le 24 février dernier, qui s’appuyait sur des témoignages de partenaires étasuniens recueillis par nos confrères de CRN, nous avons demandé cette fois à des partenaires français relayant les deux marques de nous dire s’ils pensaient que Nutanix avait effectivement pris l’ascendant sur VMware dans le domaine de l’hyperconvergence.

Nous en avons contacté une quinzaine. Trois ont accepté de témoigner mais sous couvert d’anonymat. Deux sont des partenaires très proches de Dell (réalisant chacun une vingtaine de millions d’euros de chiffre d’affaires annuel) mais aussi des partenaires de la première heure de Nutanix. L’un, que nous appellerons Esteban P., est l’avant-vente étiqueté hypercongence de son entreprise. L’autre, que nous désignerons par Shâdy W., est le dirigeant-fondateur de son entreprise. Notre troisième témoin, que nous dénommerons Bertrand L. est aussi dirigeant fondateur de son entreprise.  Initialement plus typé HPE, cette dernière réalise un quart de son activité (plus de cinquante millions d’euros de CA annuel) sur des projets d’hyperconvergence.

C’est l’un des arguments clé des partisans de Nutanix : l’offre du pionnier de l’hyperconvergence serait plus simple d’utilisation mais aussi plus simple à exploiter et à maintenir que l’offre vSAN de VMware. Sur ce point les trois partenaires qui ont accepté de témoigner, sont partagés. Pour notre ingénieur avant-vente, Nutanix est clairement au-dessus de vSAN sur les aspects mise en route, exploitation et évolution.

« Avec Nutanix, une heure suffit pour la mise en route après le rackage, quand il faut au minimum une journée – et souvent plus lorsqu’il s’agit de matériel un tant soit peu obsolète – pour vSAN », souligne-t-il. Pour Bertrand L., « la complexité de Vsan n’est pas tant liée à l’exploitation, mais aux montées de version et à l’évolution de l’existant via le rajout de nœuds ou composants ». Tous deux conviennent en revanche qu’embarqué sur VxRail, la mise en route et les montées de versions de vSAN ne sont pas plus compliquées que sur Nutanix. C’est également la conviction de notre troisième interlocuteur, Shâdy W., qui ne propose que du vSAN intégré sur VxRail.

Les partenaires étasuniens cités par CRN mettaient également en avant les options Nutanix, notamment ses fonctions de microsegmentation réseau (Nutanix Flow) et de déploiement automatisé d’environnements de travail (Nutanix Calm), bien plus avantageuses financièrement que leur équivalentes fournies par VMware (via NSX et vRealize Automation). « Flow est plus simple et moins chère à mettre en œuvre en comparaison avec la microsegmentation fournie par NSX », confirme Bertrand L. Ce que confirme Esteban P. en nuançant : « Flow ne fait que de la microsegmentation quand NSX va faire aussi fonction de pare-feu, d’équilibrage de charge, et va être capable de gérer les interactions avec les pares-feux physiques. Les deux offres ne jouent pas dans la même cour ». Shâdy W. n’a pas d’exemple de clients utilisant Flow, y compris au sein de sa base installée Nutanix, et ne peux donc pas comparer.

Quant à Nutanix Calm, Esteban P. souligne que c’est un bon produit quoique, là-encore, moins abouti que vRealize Automation mais que le marché français reste globalement hermétique à ce type d’offre. Nos deux autres interlocuteurs nous ont confirmé n’avoir pas suffisamment de retours d’expérience pour émettre un avis.

Autre argument déployé par les défenseurs de Nutanix : son coût de possession serait avantageux, la gratuité de son hyperviseur AHV faisant souvent la différence. Une assertion avec laquelle Bertrand L. est plutôt d’accord « surtout dans le cas de figure où l’on rajoute un certain nombre de services en plus (Flow). À un niveau équivalent fonctionnel, la facture VMware sera plus importante ». Esteban P. est sur la même longueur d’onde : « le coût des licences Nutanix et vSAN est comparable. La différence se fait sur l’hyperviseur qui est gratuit dans le cas d’AHV (Nutanix) et qui inclus des services tels que l’orchestrateur de conteneurs Carbon dont l’équivalent (Tanzu) est payant chez VMware ».

Dans ce contexte, l’hyperviseur de Nutanix aurait tendance à supplanter ESXi, à en croire les partenaires étasuniens. Une tendance qui ne se vérifie pas chez nos interlocuteurs où la plateforme VMware reste largement majoritaire que ce soit pour l’hyperconvergence (environ 8 clients sur 10 pour les partenaires Dell) et l’hyperviseur (6 clients sur 10). « Ce que l’on constate en revanche, c’est que les clients HCI sur base VMware en fin de maintenance font souvent le pas d’aller sur AHV pour des questions de coûts », témoigne Bertrand L. Ce que confirme Esteban P. « plus de la moitié de nos clients privés sous Nutanix sont passés sur AHV qui leur permet de bénéficier des mêmes fonctionnalités sans payer le prix VMware, dont les coûts de renouvellement de maintenance sont réputés astronomiques ». Shâdy W. note pour sa part que « 100% de ses clients, y compris les clients Nutanix, font le choix de rester sur VMware. Ils préfèrent bénéficier des bonnes pratiques VMware malgré la gratuité d’AHV », constate-t-il.

À la question de savoir si Nutanix garde au final une longueur d’avance sur VMware en matière d’infrastructures hyperconvergées, les réponses sont nuancées. Esteban P. estime que c’est le cas, mais uniquement sur la partie hyperconvergence. « Le fonctionnement de Nutanix est plus simple, sa façon de sécuriser les données plus fiable, sa capacité mixer full flash et hybride sans équivalent, et son support bien supérieur ». En revanche, il convient que VMware a une offre plus aboutie sur les couches supérieures.

Bertrand L. note que Nutanix et VMware sont plutôt sur un pied d’égalité « du fait d’une stratégie qui se rejoint autour du cloud d’entreprise, de l’hybridation et de l’automatisation ». Au crédit de VMware, il constate qu’hors Nutanix « l’ensemble des acteurs de l’hyperconvergence (HPE, Cisco, NetApp…) s’appuient sur la stack VMware en matière d’hyperviseur ». Mais il remarque dans le même temps que « Nutanix est à ce jour la seule offre [compatible avec l’ensemble des plateformes] dans un concept de Cloud d’entreprise face à VMware ».

Pour Shâdy W., c’est VMware qui a pris une longueur d’avance sur Nutanix. « En devenant une software company, Nutanix a perdu l’essence même de sa valeur consistant à proposer une boîte unique et à s’occuper de tout, y compris la maintenance. Aujourd’hui, il faut aller trouver Lenovo, Dell ou HPE lorsqu’apparaît un souci matériel ». Selon lui, certains clients historiques commencent même à quitter Nutanix.