Avec ses 64 agences, ses 650 collaborateurs et ses 170 millions d’euros de chiffre d’affaires, Koden n’est pas une acquisition comme les autres pour C’Pro. Son directeur général, Gilles Perrot nous en dit plus sur ce rapprochement hors-norme.

Channelnews : C’Pro a annoncé cette semaine son intention de racheter 100% du capital de Koden. Quel est le montant de l’acquisition et à quelle échéance devrait-elle être finalisée ?

Gilles Perrot : Nous ne pouvons pas dévoiler le montant de la transaction. Celle-ci devrait être bouclée définitivement entre mi-avril et mi-mai.

Channelnews : Koden était jusque-là un concurrent direct de C’Pro avec, comme celui-ci, un réseau étoffé d’agences réparties sur tout le territoire. Avec Koden, C’Pro ajoute ainsi 64 agences à son dispositif portant à quelque 180 le nombre de ses agences. Mais parmi ces 64 agences, n’y-t-il pas des doublons avec celles de C’Pro ?

Gilles Perrot : Oui. Pour dégager toutes les synergies possibles, des regroupements seront inévitables. La question se posera dans une vingtaine de grandes agglomérations comme Valence, Lyon, Nantes, Bordeaux, Limoges, Nancy, Dijon… Mais dans l’ensemble, nos deux groupes sont assez complémentaires sur le plan géographique. Là où l’un est fort, l’autre l’est en général beaucoup moins. C’est le cas par exemple en Normandie où Koden est très présent mais où C’Pro s’implante tout juste. À l’inverse C’Pro est très bien représenté dans le Sud-Ouest où Koden est peu déployé. Sur l’arc méditerranéen, Koden venait de s’implanter à Béziers et Nîmes via les rachats de Ruan Bureautique et Repro 30 alors que C’Pro n’est qu’à Perpignan… Il n’y a vraiment qu’en région Rhône-Alpes que les implantations de Koden recoupent globalement celles de C’Pro.

Channelnews : Comme C’Pro, Koden est constitué d’une myriade d’entités juridiques réparties en cinq grandes régions autonomes. Quelles sont vos intentions sur le plan opérationnel ? Pensez-vous conserver cette organisation en faisant cohabiter ces différentes régions et leurs entités juridiques où envisagez-vous des rapprochements ?

Gilles Perrot : Là encore, pour dégager des synergies, nous allons probablement devoir fusionner des régions et redessiner leur périmètre sachant que les régions de Koden ne recoupent pas exactement les nôtres. Nous allons également continuer à réduire le nombre d’entités juridiques qui constituent les deux groupes. C’Pro en est constitué d’une quarantaine et Koden d’une trentaine. Les deux groupes ont la même histoire : ils se sont forgés tous les deux par croissance externe. D’où cette profusion d’entités juridiques. C’Pro fusionne ses entités juridiques au rythme de 7 à 8 par an. En 2019, C’Pro Ouest est ainsi né des rapprochements de d’ABG, Quadra, Copy Concept et Led Pro. Et au 31 mars, nous achèverons les fusions de Capea, BCMP, Perret Bureautique, MH Bureautique et le fonds de commerce print de Sigma Méditerranée pour former C’Pro Sud.

Channelnews : que vont devenir les six dirigeants de Koden dans la nouvelle organisation ?

Gilles Perrot : Trois des présidents de région, Bruno Gosset, Julien Cattin et Christophe Parrain ont exprimé le désir de poursuivre l’aventure avec nous. Ils seront intégrés au Comex. Christian Barqui, l’actuel CEO, aura une mission d’accompagnement de 12 à 24 mois. Les autres sont proches de la retraite. Ils nous accompagneront un certain temps avant vraisemblablement de faire valoir leurs droits.

Channelnews : Cette opération va permettre à C’Pro de renforcer significativement son activité impression, qui est presque l’unique métier de Koden. Est-ce que cela va renforcer le poids de C’Pro vis-à-vis des constructeurs et par là sa capacité de négociation ?

Gilles Perrot : Avec Koden, le parc de systèmes d’impression C’Pro va passer de 120.000 à 180.000 de machines gérées. Et pourtant, c’est à peine 15% du marché français de l’impression. Cela fera de C’Pro le premier distributeur indépendant de systèmes d’impression mais pas le principal acteur. Les premières place restent occupées par les constructeurs en direct tels Konica Minolta qui détient à lui-seul près de 30% du marché français. L’opération fera de C’Pro le plus grand distributeur Sharp en Europe, sachant que C’Pro est déjà le principal revendeur Kyocera, Toshiba et Canon en France. En ce qui concerne nos conditions d’achat, on a bien l’intention de tout remettre à plat avec nos fournisseurs. Nous allons les rencontrer et voir ce qu’il leur sera possible de faire au plan tarifaire.

Channelnews : D’une manière générale, quelles synergies espérez-vous mettre en œuvre grâce à cette opération ?

Gilles Perrot : Nous attendons des synergies sur les conditions d’achat, comme on vient le voir. Mais aussi sur le financement des systèmes d’impression. Un domaine dans lequel elles sont potentiellement significatives. Notre objectif c’est d’arriver à capter à notre profit toute la marge réalisée hors spread (différenciel avec le taux de refinancement). Cela peut représenter les deux tiers de la marge totale qu’il est possible de faire sur cette activité. Pour cela, le modèle consiste à être l’interlocuteur unique du client. Nous tablons également sur les rapprochements d’agences pour faire des économies de locaux. Enfin, nous misons beaucoup sur le cross-selling et notamment le développement des activités IT et télécoms sur la clientèle impression. Avec Koden, C’Pro sera présent chez 80.000 clients PME. Or moins de 10% lui confient leurs achats IT. Pour cela il y a un vrai travail à opérer pour créer une offre IT packagée à destination de cette cible et faire évoluer les équipes commerciales et techniques. Une équipe sera constituée à cet effet.

Channelnews : À ce propos, quelle est le poids de l’IT dans l’activité Koden et que représente-t-elle chez C’Pro ?

Gilles Perrot : À ma connaissance, l’IT représente une dizaine de millions d’euros de facturations annuelles au sein de Koden (principalement au sein de l’entité Netmakers). Chez C’Pro, l’IT a représenté 148 M€ sur le dernier exercice, sachant que 110 M€ proviennent de Quadria, l’entité nationale orientée ETI et grands comptes publics.

Channelnews : Comment avez-vous financé cette opération sachant que vous aviez déjà levé 150 M€ (extensibles à 200 M€) il y a deux ans sous forme de crédit syndiqué ?

Gilles Perrot : Il a fallu clore le contrat existant et en négocier un nouveau pour un montant bien supérieur. Cela a pris des mois. Sept ou huit banques sont impliquées dans le nouveau tour de table. Au passage, on a changé de partenaires principaux. Désormais ce sont la Société Générale, Natixis et la BNP les principaux prêteurs, l’ancien chef de file CIC restant en syndication. Cela reste du financement bancaire sous forme de dette avec une maturité de 6 à 7 ans selon les tranches.

Channelnews : C’Pro ambitionne d’atteindre 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires d’ici à 2025. Il est donc prévu de poursuivre la croissance externe ?

Gilles Perrot : Oui. Et dans tous les métiers du groupe : l’impression mais également l’IT et les télécoms. Nous misons également sur la croissance organique, notamment sur celle des activités IT et télécoms, dont la dynamique reste forte, et sur laquelle nous allons mettre l’accent.

Channelnews : quelles sont vos prévisions de résultats pour l’exercice en cours et le suivant ?

Gilles Perrot : sur l’exercice 2020, qui s’achève fin mars, C’Pro table sur un chiffre d’affaires de 430 M€ (en pro forma ajusté) contre 328 M€ sur l’exercice précédent. La croissance organique devrait être supérieure à 7% (moyenne de la croissance enregistrée ces cinq dernières années), le reste provenant des multiples acquisitions qui ont émaillé l’année 2019. Le résultat d’exploitation devrait dépasser les 50 M€. À noter que pour l’exercice en cours Koden devrait réaliser 170 M€ de chiffre d’affaires et 35 M€ résultat d’exploitation. Pour l’exercice 2021 démarrant le 1er avril, le chiffre d’affaires prévisionnel est fixé à 650 M€ toujours en pro forma ajusté (y compris Koden), et le résultat d’exploitation devrait atteindre 100 M€.

Channelnews : Vous aviez annoncé votre intention d’adopter un nouveau nom pour l’ensemble du groupe. Qu’en est-il ?

Gilles Perrot : En effet, nous sommes en train de travailler sur le sujet. La nouvelle marque devrait être annoncée le 27 juin.