Quelle est la pénétration réelle du Cloud dans les entreprises françaises ? Vouées à nous convaincre qu’« hors du Cloud, point de salut », les centaines d’études sponsorisées par les marques IT publiées depuis dix ans se sont bien gardées de le mesurer ou alors ont livré des chiffres fantaisistes. Or, contrairement à ce que ces études laissent penser, le taux de pénétration du Cloud reste étonnamment bas en France avec seulement 17 % des sociétés de 10 personnes ou plus qui ont acheté des services cloud en 2016. C’est 5 points de mieux qu’en 2014 (12%), devant l’Allemagne (16%) mais c’est sensiblement moins que la moyenne européenne (21%) et beaucoup moins bien que les pays les plus avancés, comme la Finlande (57%), la Suède (48%) ou le Danemark (42%).

Ces chiffres sont issus de la dernière édition de l’enquête bisannuelle de l’INSEE autour des technologies de l’information et de la communication et le commerce électronique (TIC). Réalisée sur la base d’un échantillon de près de 13.000 unités légales, sociétés ou entreprises individuelles actives de 10 salariés ou plus, et ayant reçu 82% de réponses, cette enquête est particulièrement fiable.

Autre information essentielle : l’usage du Cloud est déterminé par la taille de l’entreprise et il demeure l’apanage des grandes entreprises. Ainsi, en 2016, 48 % des sociétés de 250 personnes ou plus ont eu recours à des services payants de cloud, contre 21 % pour les sociétés de 20 à 249 personnes et 13 % des entreprises de 10 à 19 personnes (figure 2). Depuis 2014, l’usage du Cloud a surtout progressé dans les sociétés de plus de 250 personnes, passant de 36% à 48% de pénétration, alors que son usage n’a progressé que de 4 points dans les sociétés de 10 à 19 salariés et de 7 points dans les entreprises de 20 à 249.

Démentant l’adage sur les cordonniers, c’est le secteur IT le plus consommateur de cloud payant (51%) devant les activités spécialisées, scientifiques et techniques (33 %). À l’opposé, les sociétés de la construction (11%) et l’hébergement-restauration (10%) sont les moins utilisatrices. Le stockage de fichiers est devenu en 2016 le service le plus plus utilisé par les sociétés consommatrices de cloud payant (69% d’entre elles contre 61% en 2014), devant le courriel (61%), l’hébergement de bases de données (55%) et les logiciels de bureautique (36%). D’autres services de cloud, de niveau avancé, comme les logiciels de CRM (29%), les logiciels de comptabilité (28%) et la puissance de calcul (le IaaS) (18%) commencent à se distinguer. Moins facilement « substituables » par des services gratuits, ces services « induisent une dépendance plus forte des sociétés clientes au cloud payant », souligne l’INSEE.

En 2016, 58 % des sociétés utilisant le Cloud ont eu recours à des services de cloud privé (serveurs dédiés), 59 % à des services de Cloud public (serveurs partagés) et 17 % ont eu recours aux deux types de cloud. Depuis 2014, la part de sociétés utilisant conjointement les deux types de cmoud n’a pas évolué et le recours au Cloud privé augmente au détriment du Cloud public. À taille et secteur d’activité donnés, la consommation de services de cloud payant est deux fois plus fréquente chez les sociétés qui font des analyses de données massives (big data) que chez celles qui n’en font pas.

Dans son rapport, l’INSEE intègre également des chiffres sur la pénétration des big data (ou données massives) issus d’une enquête de 2015. Cette année-là, 11 % des sociétés de 10 personnes ou plus ont procédé à une analyse de big data, selon l’INSEE. Le traitement de données massives était davantage pratiqué par les grandes sociétés, avec 24% des 250 personnes ou plus, contre 14 % pour celles de 20 à 249 personnes et 9 % de celles de 10 à 19 personnes. Les sociétés des transports (25 %) et de l’information-communication (23 %) utilisent le plus des big data. Les sociétés de l’industrie y ont le moins souvent recours (8 %).

Les données de géolocalisation constituent la première source de big data : 62 % des sociétés exploitant des big data traitent des données de ce type (soit 7% de l’ensemble des sociétés de 10 personnes ou plus). Elles sont 32 % des utilisatrices de big data à exploiter des données issues des médias sociaux (4% de l’ensemble) et 29% des informations relevées par des objets intelligents, connectés ou des capteurs (3% de l’ensemble). Les données géolocalisées sont très largement mobilisées dans les transports (92%) et la construction (89%). L’utilisation de sources issues des médias sociaux concerne 76% des sociétés utilisatrices dans l’hébergement-restauration et 64% dans l’information-communication. Enfin, l’analyse de données à partir d’objets connectés est surtout utilisée par les sociétés de l’industrie (46%). Les finalités de traitement sont d’optimiser des processus internes de production de biens ou de fourniture de services (38%) et d’améliorer le marketing ou la gestion des ventes (35%).