À l’instar du cabinet d’étude Context qui anticipe une véritable onde de choc pour l’industrie IT, certains acteurs du channel en France s’inquiètent des conséquences que l’invasion de l’Ukraine pourrait avoir sur leur activité. L’éclairage d’Alexandre Folman, managing partner de la banque d’affaires Crescendo Finance.

Channelnews : Vous attendez-vous à conséquences sur votre activité ? Lesquelles ?

Alexandre Folman : À ce stade, il est difficile d’anticiper réellement l’évolution du conflit russo-ukrainien et les conséquences directes que cela pourrait avoir sur l’économie française.

Cependant, il est à prévoir une possible remontée des taux directeurs de la BCE visant à juguler l’inflation actuelle. Une inflation qui est le fruit à la fois du rebond mécanique important de l’activité que nous avons connu en sortie de Covid et des difficultés d’approvisionnement en matières premières liées à l’invasion en Ukraine. Cela devrait avoir pour effet immédiat d’amoindrir les capacités de financement sur le marché M&A mais dans des proportions somme toute limitées, en raison des fortes liquidités qui ont déjà afflué et qui restent à investir pour les acteurs du private equity. Sans parler de la trésorerie importante constituée par les grands groupes et des taux qui, même corrigés, resteraient à des niveaux n’étant pas de nature à bouleverser la dynamique que nous avons observé en 2021 (+24% en volume et 57% en valeur). Nous ne sommes donc pas inquiets pour la bonne santé de notre activité – en témoigne la douzaine de mandats que nous gérons actuellement – qui n’est pas tournée vers l’Europe de l’Est et reste principalement concentrée sur le secteur technologique. Un secteur phare, dont la profondeur est conséquente et qui a représenté un tiers des deals LBO en 2021.

Channelnews : Avez-vous déjà noté des signaux faibles annonçant une contraction de l’activité ? Si oui lesquels ?

Alexandre Folman : Sur deux nouveaux secteurs que nous avons ouvert il y a huit mois – la food et le retail – où deux missions qui devaient démarrer ont été reportées en raison d’un manque de visibilité du côté de nos clients – qui font face à un repli de leurs ventes et à la flambée des prix de l’énergie – sur la partie tech, aucun. Si l’on prend le cas des ESN, il est possible que certains de leurs donneurs d’ordre soient à terme impactés par la situation actuelle mais nous n’avons en tout cas pas eu à le déplorer pour le moment.

Channelnews : Quelles mesures êtes-vous susceptible de prendre à court terme en prévision des éventuelles conséquences du conflit sur votre activité ?

Alexandre Folman : Pour le moment aucune, pour les raisons précitées. L’instabilité géopolitique n’est certes jamais bonne pour le marché des fusions-acquisitions, mais en l’état actuel des choses, il n’y a pas d’impact concret sur les sociétés que nous accompagnons. Elles ne sont pas exposées, n’étant pas présentes en zone russe ou ukrainienne. Néanmoins, la situation humanitaire et la position du Kremlin restent évidemment extrêmement préoccupantes et indignantes, à observer de très près donc. Puisse une solution de paix être obtenue au plus vite.