Un vent d’indignation s’est levé du côté de Syntec Ingénierie, de Syntec numérique et de l’Association des conseils en innovation, contre les nouvelles restrictions apportées par l’administration fiscale concernant le CIR dans le contexte de sous-traitance.

Depuis le 4 avril, être société agréée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche en tant que société de recherche devient un handicap pour les prestataires. Tel est le constat dont s’alarment unanimement les sociétés d’ingénierie et de conseil (représentées par Syntec numérique, Syntec ingénierie ou l’association des conseils en innovation).

En cause le revirement de l’administration fiscale concernant les conditions de prise en compte des dépenses de recherche externalisées, apparaissant dans les mises à jour de la base Bofip-Impôt du 4 avril. Selon cette actualisation de la doctrine, désormais, les sociétés agréées par le ministère (PME et TPE) ne peuvent plus prétendre à un crédit impôt recherche (CIR) sur les dépenses de recherche facturées à leurs clients privés et français. Et ce, même si ceux-ci n’intègrent pas ces dépenses dans leur comptabilité de CIR, notamment en raison des plafonds prévus pour ce décompte (10 millions d’euros et 2 millions d’euros pour les dépenses facturées intra-groupe).

Non seulement, ce changement de doctrine intervient un mois avant la date limite de dépôt des déclarations le 15 mai. Mettant de ce fait en délicatesse (pour ne pas dire plus) les sociétés ayant déjà clôturées leurs comptes. Mais les prestataires qui avaient joué la carte de l’agrément (et de la non-délocalisation en conséquence !) à laquelle le dispositif CIR dans son ensemble les avait précédemment encouragés, se retrouvent de ce fait exclus du crédit d’impôt en question. Sans que pour autant les clients y trouvent leur compte.

Contraire à la concertation en cours

Pour les instances représentatives, cette entourloupe de Bercy est avant tout contraire à l’esprit du dispositif qui avait pour objectif jusqu’alors d’éviter qu’une même dépense n’ouvre droit deux fois à un crédit d’impôt. Elle est d’autant plus « inacceptable » qu’elle coupe court à l’esprit de concertation à l’oeuvre depuis juillet dernier au sein de la commission tripartite (entreprises, ministères, administration fiscale) autour des difficultés, contraintes et procédures du CIR, comme suite aux divergences d’interprétation des textes et la vague de redressements fiscaux y afférant.

Selon le communiqué commun de Syntec numérique et Syntec Ingénierie, « en publiant ce texte, à l’issue des Assises de la fiscalité et malgré la concertation en cours, sans discussion avec les acteurs concernés, l’administration a démontré qu’elle n’était pas réellement engagée dans un esprit de dialogue et de transparence avec les acteurs de la recherche française ». Sans oublier que cette position, applicable immédiatement (a priori aux projets réalisés en 2013) remet de nouveau en question la pérennité du CIR, qu’elle expose les sous-traitants agréés (les non agréées ne sont pour l’instant pas concernées) à un risque de redressement, et qu’elle creuse la distorsion de concurrence entre sociétés agréées et non agréées. Conclusion de Guy Mamou-Mani, président de Syntec Numérique, et Stéphane Aubarbier, président de Syntec Ingénierie : « En changeant sa doctrine et en allant au-delà de la loi, l’administration crée une insécurité juridique supplémentaire pour les entreprises. Dans de nombreux cas, nous risquons de voir des sociétés délocaliser leurs centres de R&D ou s’effondrer sous le poids des contentieux créés par cette nouvelle instruction. Pour le numérique et l’ingénierie, secteurs créateurs d’emplois à forte valeur ajoutée, cette position est inacceptable ».