Après quatre années d’investissements intensifs dans le Saas, le 12e éditeur français continue de creuser ses pertes de semestre en semestre. Son président, Jean-Charles Deconninck, défend sa stratégie.


Channelnews : Depuis trois ans, Generix enchaine les exercices déficitaires. Le dernier en date a fait apparaître une perte opérationnelle de 5,2 M€ et un résultat net négatif de 5,7 M€. L’ampleur des pertes est telle que vous avez été contraint d’annoncer une augmentation de capital de 8,2 M€ durant l’été afin de pouvoir arrêter les comptes 2010-2011 conformément à l’hypothèse de continuité d’exploitation. Comment en êtes-vous arrivés là ?

Jean-Charles Deconninck : Il y a quatre ans, nous avons engagé un important programme de recherche et développement pour transformer l’activité vers un modèle Saas, qui sera selon nous le modèle gagnant de demain. Ce processus de transformation a demandé des investissements considérables : nous y avons consacré de l’ordre de 20% de notre chiffre d’affaires au cours des quatre derniers exercices (et même 23% sur le dernier exercice). Jusqu’ici, nous autofinancions ces investissements sur la base de la trésorerie dégagée sur les ventes de licences ERP. Mais celles-ci se sont sensiblement tassées au cours du dernier exercice, reculant de 10 à 7 M€ en raison de la baisse des nouveaux projets. Du coup, notre source de financement se tarissant, nous avons dû passer ces investissements R&D en pertes.

Mais cette baisse des revenus licences n’explique pas tout. N’y a-t-il pas des causes plus profondes ?


Jean-Charles Deconninck : Le principal écueil que nous avons eu à gérer a été la crise de 2008 et les aléas économiques qui ont freiné les investissements industriels. Or il faut se rappeler qu’en parallèle des investissements R&D, nous remboursons une dette de 17,5 M€. Une dette contractée en 2006-2007 afin de financer les rachats de Ceitel, d’Influx et d’Infolog en vue d’acquérir les composants fonctionnels indispensables à notre édification en tant qu’acteur européen de la gestion de la chaine logistique. Malgré la crise, qui se prolonge encore aujourd’hui, nous avons remboursé à ce jour la moitié de cette dette. En outre, le basculement vers le Saas nous a pris plus de temps que prévu. D’abord parce que nous avons dû réinventer en profondeur notre technologie et nos systèmes de pilotage. Et ensuite parce que ce basculement vers le Saas implique des changements culturels tant pour les clients que pour les collaborateurs. Heureusement, les clients commencent à s’emparer du modèle. Nos ventes Saas sont passées de zéro à 10 M€ entre 2007 et 2010 et elles progressent au rythme de 30% par an. Quant aux collaborateurs, nous avons pris les choses en main il y a dix-huit mois en initiant une importante réorganisation interne accompagnée d’une refonte des référenciels métiers. Aujourd’hui près de la moitié de nos 520 collaborateurs sont en train de basculer vers des nouvelles fonctions associées au modèle Saas.

Pourquoi n’avoir pas fait appel à d’autres sources de financement ?


Jean-Charles Deconninck : Le secteur européen de l’édition de logiciels est confronté à une problématique de financement. D’autant que depuis la crise de 2008, on hésite vraiment à faire appel au monde bancaire. De notre côté nous ne voulions pas diluer nos actionnaires, ce qui explique que nous n’ayons jamais fait d’augmentation de capital jusque-là. Nous aurions été de l’autre côté de l’atlantique, les choses se seraient probablement passées différemment. Reste que le cours de notre action ne reflète pas la valeur de la société. Les petits porteurs (48% du capital est dans le public) ont du mal à comprendre ces problématiques liées au modèle Saas et la valeur créée via la R&D.

Quelles sont les modalités de cette augmentation de capital ?


Jean-Charles Deconninck : Elle devrait être lancée au cours des prochaines semaines. Elle est garantie par le concert Pleiade Investissement-Jean-Charles Deconninck, qui possède environ 32% du capital.

Prévoyez-vous un retour à la profitabilité à l’issue de cette augmentation de capital ?


Jean-Charles Deconninck : Cette opération va nous permettre d’achever cette phase d’investissements. On va progressivement revenir à un ratio de l’ordre de 14% du chiffre d’affaires (66,2 M€ au 31 mars 2011) investis en R&D. Parallèlement, les revenus licences devraient se stabiliser, tandis que les revenus Saas continuer à galoper. Car le nombre de nouvelles signatures ne ralentit pas. Le retour à la profitabilité devrait intervenir au cours de l’exercice 2012-2013, qui démarre en avril 2012.

 

Edit du 26/9/11 : Cet entretien a été réalisé mercredi 21 septembre la veille de l’annonce par l’éditeur d’un plan de restructuration qui devrait aboutir à une cinquantaine de suppressions de postes. Un plan dont Jean-Charles Deconninck  n’a fait aucune allusion au cours de l’entretien et qui ne lui a pas été possible de commenter à ce jour.