Nous publions le premier chapitre du livre blanc d’une cinquantaine de pages que Laurent Glaenzer, client executive du cabinet marketing Lemon Operations, a consacré au rôle de la distribution dans l’économie du Cloud computing.

 

Baptisé « Des nuages au soleil », cet ouvrage paru à l’automne dernier se propose d’aider les fournisseurs et les prestataires IT à construire leur stratégie cloud en tordant le cou à dix idées reçues. Vous pouvez prendre connaissance de l’intégralité du texte en le téléchargeant ici.

 

Les vertus de la vente sans distributeur sont régulièrement vantées. Dell les avait mises en avant à ses débuts (beaucoup moins depuis que la société texane a décidé de commercialiser ses produits par ce moyen…), elles ont été rappelées au moment de l’avènement d’internet, et elles nous reviennent avec le Cloud Computing.

Quelle place pour la distribution dans le Cloud ? Quelques pistes à explorer.

 

Vendre en direct, c’est tellement plus simple…

 

BaseCamp est une solution de gestion de projet développée par la société américaine 37Signals. Au départ, c’est une agence de communication qui développe des sites internet pour ses clients. Développer un site pour le compte d’un autre, c’est s’exposer à une multitude d’allers-retours, ici pour changer un logo, là pour ajouter du texte, etc. Pour contrer cette difficulté, la société développe un outil de gestion de projet collaborative qui facilite la communication des informations, la gestion de tâches, la tenue d’un calendrier et l’échange de fichiers dans un contexte client-vendeur. Les clients sont tellement impressionnés par la facilité d’utilisation de l’outil qu’ils demandent à l’utiliser pour leur propre compte. Ainsi naît BaseCamp.

 

Depuis, plus de 3 millions d’utilisateurs dans le monde utilisent cet outil dans les nuages en souscrivant directement sur Internet. Et voilà 37Signals propulsé au rang des « trend setters » avec une équipe constituée de seulement 16 employés (peut-être un peu plus aujourd’hui) et qui revendique une rupture avec les schémas traditionnels de business des éléphants de l’informatique.

 

Des histoires comme celle-ci, il en existe beaucoup d’autres. Pour s’en convaincre, il suffit de chercher « Best Webapps » et découvrir ainsi des applications souvent construites sur un modèle graphique assez similaire auxquelles on peut souscrire sur un simple clic directement en ligne. On peut noter à cet égard l’excellente initiative menée par des Français basés à Barcelone intitulée www.getapp.com qui recense un grand nombre de ces applications.

 

Ce modèle de business est incontestablement séduisant et attire de nombreuses candidatures au sein des startups qui y voient la panacée de l’industrie logicielle du futur, une industrie sans intermédiaire donc plus économique que favorise la fantastique éclosion du Cloud Computing et la simplification accrue des applications.

Est-ce un modèle généralisable ? La distribution a-t-elle encore sa place dans le Cloud ?

 

La distribution : pourquoi et pour quoi ?

 

Cette question en amène une autre : quelle est la valeur de la distribution ? On parle souvent de « canal » de distribution ce qui soutient l’idée d’un chemin entre le vendeur et son client. Quel est ce chemin ? Même si cela peut être dérangeant, le fait même de poser la question est une démarche saine. Elle évite de pérenniser un système sous le simple prétexte « que l’on a toujours fait comme cela ». Et ce n’est pas chez le vendeur qu’il faut chercher la réponse, mais chez le client.

 

Dans les ateliers sur la distribution que nous animons avec l’AFDEL (Association Française des Editeurs de Logiciels) nous posons la question suivante : « À quel besoin votre application répond-elle ? » Et presque invariablement, la réponse est : « À un client qui a besoin d’un CRM, ou bien d’un ERP, ou bien d’une Gestion de projet, etc. ». Mais cela n’est pas le besoin du client ! Cela, c’est le vœu de celui qui vend. Le client, en B2B, a des besoins plus profonds que ceux-là : augmenter ses ventes, trouver de nouveaux clients, réduire ses coûts, améliorer sa structure opérationnelle, etc. Le fait que la réponse à cette question est directement centrée sur notre solution montre que nous sommes plus obnubilés par la vente de notre produit que par la réponse complète aux questions de nos clients.

 

Et le premier rôle de la distribution est bien celui-là : apporter de vraies réponses aux questions de ses clients et non pas simplement des outils. Le Cloud rend cette valeur plus pressante encore.

Il y a une autre dimension, plus technique celle-ci, qu’amène le Cloud Computing. Contrairement aux apparences, nous ne sommes pas en train de construire un monde plus simple. Si les applications Cloud sont en apparence plus accessibles lorsqu’elles sont utilisées indépendamment, leur intégration avec d’autres applications ou avec l’environnement existant de l’entreprise est loin d’être une gageure.

 

À ce titre, on distingue trois niveaux d’intégration : isolée, horizontale et verticale.

L’intégration isolée c’est d’adapter l’application aux besoins spécifiques d’une entreprise. La personnalisation, la configuration, la formation des utilisateurs, d’autant plus nécessaires que ces derniers ne sont pas nécessairement des « geeks » de l’internet.

 

L’intégration horizontale consiste à faciliter la communication entre deux applications. Par exemple, comment faciliter l’intégration de mon outil BaseCamp évoqué plus haut et mon CRM ? Ils sont peu nombreux les clients qui sauront développer l’API correspondante.

 

L’intégration verticale c’est la synchronisation des applications sur des plateformes hétérogènes : comment assurer l’interopérabilité de mon application qui tourne sur ma tablette avec le système de gestion que j’ai mis en place dans le Cloud ? De plus en plus d’applications prévoient cette possibilité en direct ou par l’intermédiaire de solutions de type Dropbox, mais nous sommes encore loin d’une fluidité parfaite et il est à parier que ce problème perdurera au moins pour la prochaine décennie.

 

Les différents modes d’intégration d’applications au sein d’une entreprise

 

La troisième dimension du canal, c’est la dimension humaine. Pardonnez ce truisme mais les affaires ne se forment qu’au travers de connexions humaines, de rapports de confiance, soutenus par de réelles valeurs ajoutées, mais dont la dimension psychologique et affective est omniprésente. Et cela, aucun site internet ne saura le remplacer.

Apporter des réponses aux vraies questions des clients, faciliter l’intégration technique et enfin « humaniser » le rapport à l’informatique, c’est ainsi que l’on pourrait résumer le rôle incontournable de la distribution informatique moderne.

C’est ainsi que Google, pourtant icône de l’internet, a annoncé au printemps dernier son intention de renforcer son canal de distribution et de faire en sorte que la majorité des ventes de Google Apps en entreprise soient effectuées par ce biais. Et il est à parier que la grande majorité des acteurs du Cloud suivront cette voie quand ils ne l’auraient pas anticipée.

 

Des pistes à explorer

 

La distribution continuera à jouer un rôle déterminant dans le Cloud avec trois tendances fortes :

• l’accentuation de son caractère protéiforme avec l’apparition de nouvelles formes de distribution (notamment la montée en puissance du conseil métier ou « canal vertical ») ;

• une orientation commerciale plus tournée vers les utilisateurs au détriment des directions informatiques ;

• et, dans le cadre de business models hybrides, une cohabitation de la vente directe et indirecte chez les éditeurs/constructeurs de solutions Cloud.

 

Dans ce contexte, nous pensons que les partenaires les plus valorisés seront ceux qui sauront montrer :

• une vraie capacité à répondre aux questions de business de leurs clients que ce soient par eux-mêmes ou en partenariat avec des consultants métiers par exemple et de ne plus se situer sur un plan uniquement technologique de proposition d’outils ;

• une veille permanente sur les solutions qui ne cessent d’apparaître sur le marché – car le marché n’a rarement été aussi dynamique qu’en ce moment (avec un regard particulier sur les Etats-Unis qui restent malgré tout en avance sur les développements) ;

• une capacité à tirer profit des solutions du Cloud pour anticiper la demande des clients et proposer des solutions rapides à mettre en œuvre, économiques pour les clients et porteuses de nouveaux business (notamment sur le marché des PME).

 

À lire également sur le site de Lemon Operations :

À priori n°2 : La Rémunération des partenaires est un problème

À priori n°3 : Au fond le Cloud, c’est du marketing

À priori n°4 : Pas de place pour les services IT dans le Cloud

À priori n°5 : Pour être fort dans le Cloud, il faut avoir un datacenter

À priori n°6 : Avec le Cloud, les applications locales ne sont plus nécessaires

À priori n°7 : Le marché du Cloud Computing reste très marginal

À priori n°8 : Les grossistes n’ont plus leur place dans le Cloud

À priori n°9 : Sans Cloud Computing, point de salut

À priori n°10 : Peu d’impact sur la distribution avec le Cloud