Le PDG de Tech Data France répond à nos questions sur l’impact de la crise sanitaire, les encours, les délais d’approvisionnement et la transition des revendeurs vers les services.

Channelnews : À l’issue de cette année 2020, quel a été l’impact de la crise sur l’activité de Tech Data France ?

Pascal Murciano : 2020 aura été une année compliquée même si les métiers autour des technologies ont beaucoup moins souffert que le reste de l’économie. Il s’est vendu beaucoup de solutions autour du poste de travail et de l’environnement de travail digital (modern workplace) dans les entreprises. De même, le marché grand public a rapidement redémarré après le premier confinement autour, là aussi, des PC et de la mobilité. Une tendance confirmée par les chiffres Context, qui fait état d’une croissance forte sur les PC (bien au-delà des 20%).

En revanche, les ventes d’infrastructures et d’équipements de datacenters ont beaucoup souffert. Context évoque une décroissance assez forte depuis le premier confinement sur ce segment de marché. On a senti un frémissement de reprise des projets à partir de l’été. Mais nos clients nous disent qu’il s’agit d’anciens projets qu’il a fallu terminer. Très peu de nouveaux projets ont émergé depuis mars. Le business a plutôt été en mode « quick & dirty ». Et, depuis la mi-octobre, on constate que le marché freine à nouveau avec le report de nombreux projets.

La période actuelle est indécise. On sait que ça va redémarrer. Notamment parce que les entreprises vont devoir accélérer leurs investissements dans la digitalisation pour s’insérer dans la nouvelle normalité du travail à distance généralisé. Les investissements vont être massifs et on va être face à une multiplication des projets. Mais on ne sait pas à quel moment cela va arriver. On espère que ce sera entre le deuxième et le troisième trimestre 2021.

Channelnews : Comment ont évolué les encours ?

Pascal Murciano : Ils n’ont pas beaucoup bougé dans un premier temps mais ils ont pas mal baissé à la rentrée. Cela s’est tassé depuis mais il y a des inquiétudes fortes pour l’année prochaine. À partir du moment où les entreprises vont devoir rembourser les prêts garantis par l’Etat et que les organismes sociaux tels l’URSSAF vont commencer à réclamer les sommes qui leur sont dues, si l’activité n’est pas soutenue par une reprise forte, alors on risque de constater beaucoup de défaillances et donc des réductions d’encours massives.

Channelnews : On évoque des pénuries persistantes en cette fin d’année sur un certain nombre de produits de grande consommation. Est-ce que Tech Data est affecté par ce phénomène ?

Pascal Murciano : On constate en effet un allongement de certains délais d’approvisionnement, notamment sur les notebooks, les cartes graphiques, les processeurs… C’est probablement lié à la très forte demande de ces derniers mois. Mais, je n’emploierais pas le terme de pénurie. Les stocks se sont réduits mais vont se reconstituer.

Channelnews : 2020 a aussi été une année d’investissements sur les services pour Tech Data. Vous avez annoncé plusieurs initiatives pour accélérer la migration des clients vers ce que vous appelez la technologie sous forme de services. Vous avez récemment communiqué sur deux d’entre elles : Solution Factory et Practice Builder. Pouvez-vous nous les présenter ?

Pascal Murciano : Solution Factory est un catalogue de solutions cloud préconfigurées prêtes à déployer. L’idée, c’est de faire gagner du temps aux revendeurs en leur proposant des solutions validées, rapidement déployables et facilement personnalisables. [Chaque solution est fournie entièrement packagée avec ses licences, ses composants sous-jacents et ses routines d’activation]. On parle de concept click-to-run. Le catalogue comprend à ce stade 28 solutions qui se déclinent principalement autour de trois thématiques : infrastructures, protection des données et environnement de travail digital.

À titre d’exemple, je peux citer Modern Workplace with Secure Score, une solution de déploiement automatisé des politiques de sécurité sur les postes de travail basée sur une technologie Microsoft, NetApp SaaS Backup for Office 365, une solution de protection et de restauration des données pour Microsoft 365 basée sur la technologie Netapp, et Veeam Backup for Office 365, une solution de sauvegarde pour Microsoft 365 basée sur la technologie Veeam. Ces trois solutions sont adossées au Cloud Microsoft Azure. Le catalogue va progressivement s’étendre [il y a une douzaine de thématiques] en s’ouvrant à d’autres clouds (AWS…).

Quant à Practice Builder, il s’agit d’un programme d’accompagnement des partenaires pour les aider à se positionner sur des segments en très forte croissance tels que le Cloud, la cybersécurité, la gestion des données… Ce programme est basé sur une méthode en trois étapes. On commence par effectuer un état des lieux de leur maturité sur les différentes technologies qu’ils souhaitent aborder. Puis on élabore un programme de développement sur cinq axes : stratégie, formation, marketing, création de services et ventes. Puis on les accompagne dans l’exécution des actions à mener.

Channelnews : Depuis quand ces programmes sont opérationnels et combien de clients en bénéficient ?

Pascal Murciano : L’équipe à l’origine de l’initiative Solution Factory est issue de l’acquisition d’une société britannique qui travaille depuis environ dix-huit mois sur le sujet. En France, nous avons commencé à relayer cette initiative cet été et nous avons déjà quelques dizaines de clients qui achètent ces solutions. On est en train de constituer une équipe de Business development managers dédiée pour accélérer leur adoption. L’implémentation de Practice Builder en France date de février. Environ deux cents partenaires européens en ont déjà bénéficié, dont une dizaine en France. Ce programme va être beaucoup plus mis en avant en 2021.

Channelnews : Quelle est la part des services dans les ventes de Tech Data ?

Pascal Murciano : En France, c’est encore faible. Mais on a la base et la structure pour que ça monte rapidement. Outre les services susmentionnés, on développe toute une gamme de services autours des technologies de prochaine génération (Cloud, IoT, analytique…) : support de niveau 1 à 3, services de migration, services managés qu’on peut assurer pour le compte de nos clients. Les revendeurs ne peuvent pas avoir toutes les compétences sur tous les sujets. On les aide à prendre toutes les affaires qui se présentent en leur fournissant les compétences qui leur manquent.

Au cœur de notre dispositif, se trouve aussi StreamOne, notre place de marché cloud, qui supporte tous ces services. Celle-ci est en cours de refonte. La nouvelle version sera plus stable, elle pourra être utilisée en marque blanche, et elle améliorera fortement l’expérience clients. Elle devrait être déployée dans les prochaines semaines en France. StreamOne est actuellement utilisée par des milliers de revendeurs et services providers en France.