La perspective d’une redevance sur la copie privée appliquée aux appareils numériques reconditionnés met en opposition deux secteurs en difficulté économique : l’économie circulaire et la culture.

Le 10 juin prochain, les député.e.s de l’Assemblée nationale voteront sur la proposition de loi REEN. C’est une occasion inédite pour la France de sortir de son statut de mauvaise élève du Green IT. Oui mais voilà, la possibilité d’une suppression de l’article 14bis B de cette proposition provoque une levée de boucliers de la part des acteurs du reconditionnement.

En l’état, cet article stipule que « les équipements numériques reconditionnés ne seront pas assujettis au paiement de la rémunération pour copie privée, lorsque ces équipements ont déjà donné lieu à une telle rémunération ».

La rémunération pour copie privée est une redevance prélevée depuis 1985 sur les supports d’enregistrement tels que les ordinateurs, tablettes et smartphones. Elle est destinée à compenser les artistes pour les copies privées de leurs œuvres.

Si l’article 14bis B était supprimé, les produits numériques reconditionnés pourraient alors être soumis à une taxe de rémunération de la copie privée, mais allégée par rapport à celle appliquée aux produits neufs (abattement de 35% pour les tablettes et 40% pour les smartphones). D’après le barême établi le 1er juin par la Commission en charge au Ministère de la Culture, le prélèvement irait de 30 centimes à 9,1 euros selon la capacité de stockage.

Des artistes, auteurs et autrices de films, musiques, podcasts, jeux vidéos, etc., ont défendu cette suppression dans une tribune intitulée Ecologie ou exception culturelle : la question ne devrait pas se poser ! : « Depuis le début de la crise sanitaire, grâce à ce dispositif (de rémunération pour copie privée), plus de 10.000 créateurs en détresse ont reçu une aide d’urgence ». La tribune est signée par 1.661 acteurs et actrices de la culture qui déclarent notamment qu’« exonérer tout un secteur de ce système de redistribution au prétexte de l’écologie serait commettre la même erreur que d’avoir voulu faire porter aux plus modestes la taxe carbone ». 

En réponse, le co-fondateur du groupe Recommerce et secrétaire général de l’association Eurefas, Benoit Varin, ainsi que Jean Lionel Laccourreyre, le président du SIRRMIET (Syndicat interprofessionnel du reconditionnement et de la régénération des matériels informatiques, électroniques et télécoms), affirment qu’une telle mesure pourrait remettre en cause des emplois dans les TPE et PME, au modèle fragile. « Le marché des téléphones reconditionnés progresse et équivaut aujourd’hui à 10% des ventes de téléphones » mais le syndicat souligne que « 2.500 emplois sont en jeu sur les 5.000 que nous représentons aujourd’hui ».