Le 26 juin, les actionnaires de CS ont approuvé l’acquisition de Novidy’s, lançant le coup d’envoi de la création d’un nouvel acteur majeur sur le marché de la cybersécurité. Explications de Jean-Robert Pozo, pdg de Novidy’s, qui en prend la direction générale.

Channelnews : Cet adossement de Novidy’s était assez inattendu sachant que vous étiez plutôt dans une démarche d’acquéreur et non de vendeur jusque-là. Pourquoi ce revirement ?

Jean-Robert Pozo : Cette opération, c’est d’abord l’histoire d’une rencontre avec le directeur général de CS Holding, Eric Blanc-Garin. Nous avons discuté du futur du marché de la cybersécurité et, rapidement, un projet industriel s’est dessiné. Novidy’s faisait 20 à 25% de croissance par an depuis plusieurs années avec 10% de résultat et n’avait donc a priori pas besoin de s’adosser. Mais il fallait absolument accélérer la croissance car le marché va extrêmement vite et de gros donneurs d’ordre tels Orange hier et Thales ou Atos aujourd’hui structurent des départements cybersécurité entiers.

Channelnews : Qu’est-ce qui vous a convaincu dans ce projet ?

Jean-Robert Pozo : J’y ai vu le moyen pour Novidy’s de se consacrer entièrement à ses clients plutôt qu’à la croissance. La croissance, ce sera le rôle de CS. CS, c’est 45 personnes expertes en cybersécurité. Sur un marché en perpétuelle pénurie de compétences, ce n’est pas négligeable. En regroupant nos équipes, on forme un acteur de 190 personnes, ce qui nous positionne dans le top 5 sur le marché de la cybersécurité en France. On veut devenir l’alternative aux gros acteurs en offrant la même expertise avec la réactivité en plus.

Channelnews : Qu’est-ce qui vous a intéressé chez CS ?

Jean-Robert Pozo : C’est d’abord une société d’ingénieurs de très bon niveau. Ensuite, à l’heure où l’Etat met en place des réglementations pour diminuer les risques de paralysie des services vitaux du pays, CS dispose de toutes les certifications nécessaires (PASSI RGS et LPM) pour auditer les opérateurs d’importance vitale (OIV) et bientôt les opérateurs de services essentiels tels que la directive Network and Information Security (NIS) européenne les définit. CS dispose également du label CERT (computer emergency response team) et a déjà mis en place deux CERT pour des clients gouvernementaux. Jusqu’ici, Novidy’s n’était pas visible des instances gouvernementales telles que l’ANSSI, le ministère de l’Intérieur, etc. Ces certifications sont indispensables pour travailler avec le secteur public et parapublic et vont nous faire gagner deux ou trois ans sur notre plan de développement.

Channelnews : Quelles complémentarités opérationnelles voyez-vous avec CS ?

Jean-Robert Pozo : J’en vois deux principales : CS réalise 70% de son chiffre d’affaires dans le secteur public et parapublic, tandis que Novidy’s est tourné à 80% vers des clients du secteur privé. Quant à leurs clients du privé, ce sont majoritairement des grands comptes industriels type Airbus ou Engie, qu’on ne connaît pas. L’autre grande complémentarité est géographique. Ils sont à Aix-Marseille, où on n’est pas. Ils sont également bien positionnés en Allemagne, qui est un marché très dynamique, et ont des filiales en Roumanie, aux USA et au Koweit. De notre côté, nous avons des bureaux à Londres et à New Delhi. En région parisienne, en revanche, nous sommes voisins puisque notre siège est à Vélizy et le leur au Plessis-Robinson, à quelques minutes.

Channelnews : l’accord d’exclusivité a été annoncé fin avril mais il a fallu presque deux mois de négociations pour finaliser l’accord. Pourquoi ce délai ?

Jean-Robert Pozo : Comme vous l’avez rappelé, Novidy’s n’était pas à vendre. On voulait un vrai projet industriel et on ne voulait pas vendre 100% du capital. On voulait partager ce projet y compris sur le plan actionnarial. D’où l’acquisition de 70% du capital de Novidy’s en numéraire pour 30 millions d’euros et l’apport des 30% restant en contrepartie de 9% du capital de CS via une émission de nouvelles actions. Cela permet d’associer l’équipe fondatrice de Novidy’s à la réussite de ce projet industriel. Ce qui a pris du temps, c’est la mise en place de ce projet. En revanche, il n’y a pas eu d’opposition à ce que je prenne les commandes de la nouvelle entité. Tout le monde est bien conscient que Novidy’s est un pure player de la cybersécurité. Ce projet va permettre de donner des perspectives claires aux collaborateurs comme on a toujours su le faire jusqu’ici.

Channelnews : Quel est le chiffre d’affaires du nouvel ensemble et quelles sont ses perspectives de croissance ?

Jean-Robert Pozo : Novidy’s a réalisé 32,6 M€ en 2017. Avec CS, cela fait 37 M€ sur un chiffre d’affaires groupe de 178 M€. Pour les objectifs, je ne peux pas m’exprimer dessus, la société étant cotée.

Channelnews : Quelle est la part de la distribution et cette activité va-t-elle perdurer dans le nouvel ensemble ?

Jean-Robert Pozo : La distribution pèse environ 40% de l’activité actuellement. Celle-ci va continuer de croître mais moins rapidement en proportion que les prestations de services et le SOC. Face à la pénurie de compétences et à la montée en fréquence des attaques, les entreprises ne peuvent plus gérer comme autrefois la cybersécurité en interne sous forme de projets. Elle est de plus en plus traitée par des prestataires externes comme nous via des centres de services.