Malgré plusieurs rapports qui démontrent le contraire, les syndicats estiment que  Free ne respecte pas ses obligations de couverture. Ils ont saisi le Conseil d’Etat afin d’obliger l’Arcep à sanctionner l’opérateur.

 

La publication le mois dernier du rapport de l’ANFR sur le réseau de Free selon lequel l’opérateur respectait ses obligations de couverture, pourtant destiné à clore la polémique,  n’a pas convaincu la CFE-CGC-UNSA France Télécom-Orange, ni le Syndicat National des Télécoms SNT-CGC (représentant les salariés de Bouygues Telecom et SFR) qui viennent de porter l’affaire devant le Conseil d’Etat, en mettant directement en cause l’Arcep  Fin janvier, ils avaient demandé au régulateur d’ouvrir une procédure à l’encontre du nouvel entrant dont le réseau, selon eux, n’était pas conforme aux obligations réglementaires, à savoir une couverture d’au moins 27% de la population française en voix et 25% en data. Ils demandaient également à l’Arcep de saisir l’Autorité de la concurrence.

En réponse, le gendarme des télécoms publiait quelques jours plus tard un long communiqué expliquant que les obligations de couverture étaient respectées tout en faisant adroitement remarquer que la plainte n’émanait pas des opérateurs eux-mêmes. Toutefois, pour mettre fin à la polémique « et dans un souci de transparence et de sérénité », il annonçait qu’il allait entamer une vérification sur le terrain « selon la même méthode que celle utilisée pour les précédents contrôles », dont les résultats seraient rendus publics. Ce qui fut fait pour le plus grand bénéfice de Free qui se vit ainsi dédouané.

En refusant de saisir l’Autorité de la concurrence, l’Arcep a, estiment les syndicats, « commis des erreurs de droit, des erreurs de qualification juridique des faits et porté sur la situation de l’espèce une appréciation manifestement erronée ».

« Il y a lieu dès lors de lancer une enquête dans le cadre de l’article L.36-11 et de recourir à une méthodologie adaptée qui permette de vérifier la capacité du réseau Free-Mobile à prendre en charge les appels de ses clients et non la simple existence d’un signal comme cela a déjà été fait dans les contrôles précédents », écrivent-ils dans leur requête.

Ils estiment par ailleurs que Free mobile a bénéficié « de façon totalement illégale et usurpée » d’une itinérance sur le réseau Orange, cette dernière n’étant admise que si le réseau du demandeur couvre « entre 25% et 95% de la population métropolitaine pour le service voix », ce qui, selon les syndicats, n’est pas le cas. Un manquement qui « dépasse le simple cadre contractuel puisqu’il est question d’une obligation règlementaire imposée aux opérateurs », laquelle aurait dû également conduire l’Arcep à engager une procédure contre Free.

Free destructeur d’emplois ?

Ils demandent donc au Conseil d’Etat d’obliger le régulateur d’appliquer les sanctions prévues. Sanctions qui peuvent aller d’une amende équivalente à 3 % du chiffre d’affaires hors taxe jusqu’à la suspension partielle, voire totale de la licence.

Ce recours intervient alors qu’on apprend par les Echos la renégociation dans le plus grand secret de l’accord d’Itinérance entre Free et Orange. D’après le quotidien économique, l’opérateur historique  aurait accepté de réduire le coût d’itinérance des messages texte, en contrepartie d’une révision à la baisse des prétentions du groupe de Xavier Niel en termes de terminaison d’appel SMS. Il intervient également quelques jours après que le patron d’Orange, Stéphane Richard ait déclaré à nos confrères de la Tribune qu’il était favorable à un accord d’itinérance dans la 4G avec la filiale d’Iliad.

Les syndicats sont particulièrement remontés contre l’arrivée de Free sur le marché de la mobilité qui selon eux va détruire des emplois. Le président de l’Arcep, Jean-Ludovic Silicani avait reconnu en mars dans une interview accordée au Figaro que cette arrivée devrait entraîner la suppression de 5.000 à 10.000 postes chez les autres opérateurs. Plus récemment, une étude réalisée par Bruno Deffains, professeur à l’Université Paris II (Assas) et directeur du Laboratoire d’Economie du Droit, faisait quant à elle état de 70.000 postes détruits.

Deux logiques s’opposent donc. Celle des syndicats (et des opérateurs concernés) qui estiment que la pression sur les prix va entraîner un ralentissement des investissements ainsi que des réductions d’emplois. Et celle des clients de Free qui se félicitent de la baisse des prix.