Mesure fiscale extrêmement coûteuse pour les uns, indispensable selon ses bénéficiaires, le crédit impôt recherche pourrait bien être concerné par le coup de rabot imposé par le gouvernement aux niches fiscales pour cause de déficits à réduire.

 

Tout à sa politique de réduction des déficits sans augmentation directe des impôts, le gouvernement vient d’annoncer un coup de rabot sur les niches fiscales, spécialité française qui permet des avantages ciblés, souvent pour des motifs conjoncturels mais qui s’installent dans la durée, tant au niveau des particuliers que des entreprises. Côté IT, les organisations professionnelles ont déjà prévenu : créer de nouvelles charges ou réduire des avantages pourraient nuire à la reprise naissante et fragile. C’est tout l’enjeu des arbitrages à venir puisque le gouvernement affirme vouloir procéder à ses coupes tout en préservant la croissance.

Déjà sous le coup d’un projet de réforme, le crédit impôt recherche – qui aura couté 5,8 milliards d’euros à l’Etat en 2009 – pourrait être menacé au grand dam des industriels du secteur.

En juillet, Guy Mamou-Mani, tout récemment élu président de Syntec Informatique, la chambre patronale des SSII et éditeurs, expliquait ainsi à propos du projet de réforme du crédit-impôt-recherche : « les premières orientations défavorisent nettement les acteurs de service par rapport à l’industrie. Comme lors de la réforme de la taxe professionnelle, ce sont les services qui sont sacrifiés. Je rappelle que notre filière qui emploie 365 000 personnes a créé en moyenne entre 20 000 et 30 000 emplois par an ces dernières années. Et que le premier problème du pays, duquel découlent tous les autres, reste le chômage ! » De fait, le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances de l’Assemblée Nationale, voté le 30 juin 2010, prévoit d’abaisser de 75 à 33 % le taux des dépenses de personnel éligibles au crédit impôt recherche. Ce qui change tout pour les SSII, grandes consommatrices de main d’œuvre.

Bercy se cramponne au dispositif

Ces dernières suivront donc avec beaucoup d’attentions les arbitrages à venir. Pour l’instant, du côté de Bercy, on semble vouloir ménager le dispositif de financement de la R&D, encouragé en ce sens par Christian Estrosi, ministre de l’Industrie. Mais son devenir reste flou et certains élus estiment que les entreprises – et notamment les grands groupes – abusent du dispositif en le gérant filiale par filiale, démultipliant ainsi leurs économies. Le fait d’interdire cette pratique – également une préconisation de la mission d’évaluation – permettrait déjà à l’Etat de récupérer 390 millions d’euros en année pleine. Par ailleurs, les plus gros bénéficiaires du crédit impôt recherche pourrait voir sa portée limitée par la suppression de la réduction d’impôt de 5 % au-delà de 100 millions de dépenses. Si, lors de la discussion budgétaire qui s’ouvrira en octobre, des députés venaient durcir le projet du gouvernement, ce serait un coup dur pour le secteur IT.


Un coup de pouce sur les brevets qui concerne peu l’IT français

Reste que si le gouvernement essaie bien de récupérer des fonds, il tente également de maintenir une politique de croissance ou tout du moins de maintenir le niveau de compétitivité des entreprises, et particulièrement de celles qui fournissent des efforts de R&D. C’est pour cette raison que, tout en cherchant à réduire les niches fiscales, il s’apprête également à se priver de quelques rentrées, notamment en matière de fiscalité sur les brevets. L’objectif est d’aligner la France sur ses voisins européens pour ce qui concerne les impôts relevant de revenus tirés de la cession ou de l’exploitation de brevets par la filiale d’un groupe.

Aujourd’hui, un taux de 15 % est appliqué dans le cadre d’une exploitation par une filiale étrangère. Mais il se monte à 33 % dans un contexte franco-français ! Un écart qui incite à la délocalisation. Le gouvernement a donc décidé d’harmoniser la fiscalité des redevances sur les brevets, quel que soit leur lieu d’exploitation, au taux unique de 15 %. Reste que si des secteurs comme l’industrie pharmaceutique ou la chimie devraient se réjouir de ce coup de pouce, l’IT sera moins concerné. Tandis qu’IBM caracole depuis longtemps en tête des dépositaires de brevets dans le monde et que globalement les acteurs américains sont très actifs dans ce domaine, aucun nom de l’IT hexagonal n’apparaît dans le top 10 des principaux contributeurs en France.

 

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