Le pdg de STS Group revient pour nous sur les pertes de 16,9 M€ annoncées par sa société pour son premier semestre fiscal. S’il est confiant sur l’évolution de son activité il ne cache pas son inquiétude face à la situation économique.

 

Vous avez annoncé pour votre premier semestre des pertes de 16,9 M€, soit 44% de votre chiffre d’affaires. Dans quelle mesure les pertes constatées au premier semestre vont affecter la trésorerie ?

B C : Il est d’abord important de souligner que seules les pertes d’exploitation de Risc (soit 1,9 M€) ont un impact réel sur la trésorerie. L’essentiel des pertes nettes constatées (16,7 M€) correspond à des dépréciations d’actifs (11,5 M€) et à des éliminations de chiffre d’affaires (4,9 M€) liées à notre réseau mondial de 36 plates-formes de confiance numérique. Elles n’ont aucun effet sur la trésorerie. Les dépréciations sont dues à l’augmentation récente des taux d’actualisation qui obligent à reconsidérer les valeurs d’actifs. Quant aux éliminations de chiffre d’affaires, elles correspondent à la valeur des licences apportées en dotation aux plates-formes de confiance numérique.

Sur le premier semestre, la trésorerie a été impactée d’environ 3,8 M€. Un montant qui sera largement rattrapé au deuxième semestre par la cession de contrats d’ITS (l’activité hébergement/cloud de Risc) suite à la mise en œuvre en mai d’accords de refinancement sur cette activité. ITS refinance désormais environ 20% de ses contrats tout en continuant d’étaler le revenu sur la durée des contrats via notre filiale de financement intégrée Deal IT. La trésorerie devrait ainsi atteindre 14 M€ (dont 4 M€ de bloqués) au 31 décembre 2011 pour un endettement de 22 M€ (dont 12 M€ d’obligations convertibles à échéance 2016 et le reste en OBSAR et en prêt Oseo amortissables annuellement et mensuellement). Pour comparaison, nous affichions 13,2 M€ de trésorerie et 35 M€ de dette financière au 31 décembre 2011.

 

Pourriez-vous nous expliquer quel est le modèle de ce réseau de plates-formes de confiance numériques ?

B C: Nous avons initié ce réseau en 2008. Face à la crise du secteur bancaire, qui représentait 70% de nos revenus, nous avons voulu diversifier nos débouchés en créant un réseau mondial de plates-formes de diffusion de services de confiance numérique (archivage, facture à valeur probante, etc.) basés sur nos technologies. Une nouvelle façon de monétiser notre actif logiciel. Dans chaque pays, nous nous sommes associés à un partenaire et avons créé une joint-venture à laquelle nous apportons nos logiciels en dotation moyennant une participation à hauteur de 30% à 49% du capital. De leur côté, nos partenaires apportent leur clientèle. Cela leur permet d’offrir à leurs clients des services de confiance numérique sans avoir à investir. Ces plates-formes présentent l’avantage de fonctionner à coût fixe pratiquement nul. Une fois le business enclenché, et passé un certain seuil de CA (1 M€), nos contrats prévoient que nous puissions lever nos options et racheter sur trois ans les parts des actionnaires majoritaires sur la base d’une valorisation calculée sur le résultat. Les partenaires continuent ensuite de percevoir une rémunération d’agent commercial équivalent à 20% des revenus.

 

Où en est Risc ? L’exploitation qui était semble-t-il revenue à l’équilibre sur le premier semestre 2010-2011 a apparemment rechuté au deuxième semestre (période janvier-juin 2011). Qu’en est-il ?

B C : Nous avons consacré l’exercice 2010-2011 à restructurer la société. L’effectif est passé de 650 à 280 personnes. La division ITS (hébergement/cloud) est complètement remise sur les rails. Son chiffre d’affaires est reparti à la hausse et elle fera des profits sur l’exercice. En revanche, la situation est plus compliquée pour la division Inbox (télé-sauvegarde). Le modèle de commercialisation par une force de vente directe n’est pas rentable et il faudra évoluer vers le canal Internet.

Mais au-delà du modèle de vente, c’est le business de la sauvegarde en ligne qui est menacé à terme. La montée en puissance de la virtualisation, qui permet de répliquer plusieurs fois les données pour une fraction du coût des box de sauvegarde, est en train de tuer le marché.

La baisse du chiffre d’affaires est d’autant plus inéluctable que l’on a décidé d’adopter un modèle comptable plus vertueux visant à constater les revenus non plus à la signature des contrats mais au fur et à mesure de leur exécution. Le gros intérêt, c’est de ne plus dépendre à 100% du refinancement comme c’est le cas pour Inbox. Mais comme on ne peut pas basculer brusquement sur le nouveau modèle sans perdre l’équivalent des trois quarts d’une année de production commerciale, on a prévu une adoption sur plusieurs années.

 

Combien de temps durera ce processus et que comptez-vous faire pour compenser le manque à gagner ?

B C : Pour pouvoir mener à bien ce processus sans afficher de pertes, nous avons prévu de mettre en réserve les profits d’ ITS et de recourir à l’affacturage. Nous avons besoin d’environ 3M€ de profits par an pendant trois ans pour qu’Inbox n’affiche plus de pertes. Pour doper la production commerciale on a commencé à proposer aux 25.000 clients d’Inbox des services complémentaires de confiance numérique (archivage, lettre recommandée électronique…). Des services positionnés autour de 10 € par mois que l’on englobe dans les contrats au moment des renouvellements ou dans le cadre des nouvelles signatures. Le démarrage est prometteur puisqu’on en a vendu pour 1 M€ sur les quatre mois d’été. Enfin on travaille à réduire encore les coûts de production en travaillant sur l’optimisation de la commercialisation.

 

Pourquoi ne faites-vous pas de prévision de chiffre d’affaires ni de résultats ?

B C : Difficile d’établir des prévisions dans le contexte actuel. Même nos gouvernants sont incapables d’en faire. Je ne cache pas que je suis extrêmement pessimiste pour les deux prochaines années sur le plan macro-économique. Je pense que les fonds d’investissements et les banques ne vont plus mettre un centime dans les entreprises, trop occupés qu’ils seront à réduire leur propre niveau d’endettement et à revenir dans les bons ratios de fonds propres. Les seules sources de financement seront l’affacturage de comptes clients et le refinancement de contrats moyens terme. Mais même sur ce terrain, le nombre d’intervenants se réduit. Je pense notamment au Crédit Agricole Leasing qui a annoncé mettre fin à ses activités à la fin de l’été.

Ce que je peux dire néanmoins, c’est que le chiffre d’affaires de l’activité ITS est parti pour atteindre 30 M€ sur l’exercice. Inbox fera au mieux 20 M€. Les plates-formes de confiance numériques commencent à facturer. Elles étaient neuf à le faire au 30 novembre (générant en moyenne 100.000 €) et seront au moins 15 d’ici à juin 2012. Elles atteindront leur vitesse de croisière en 2014.

Concernant les résultats, nous n’enregistrerons plus de pertes d’exploitation par élimination de chiffre d’affaires puisque nous avons décidé de nous en tenir aux 36 plates-formes existantes. Seul demeure le risque d’une dépréciation liée à une nouvelle des taux d’actualisation. Mais ceux-ci sont déjà au plus haut (autour de 15%) rendant peu probable une nouvelle dépréciation. Sur Risc Group, il est probable que l’on n’affichera pas de profits dans les deux ou trois années qui viennent car nous allons employer les profits dégagés sur l’activité ITS à combler les provisions sur la division Inbox.

 

Que se passerait-il en cas de tarissement du refinancement ?

B C : Nous aurions de grandes difficultés de trésorerie. Même en compensant en partie par l’affacturage, il faudrait trouver rapidement environ 9 M€, ce qui nécessiterait probablement une augmentation de capital. Mais ce n’est pas le scénario que nous avons retenu. Nous devrions être en mesure d’être autosuffisants d’ici à trois ans. Pour autant, nous continuerons à utiliser le refinancement qui permet de nous prémunir contre le risque clients.

 

Pourquoi les commissaires aux comptes n’ont-ils pas certifié les comptes du premier semestre ?

B C : Ils ont certifié les comptes annuels de Risc qui clôture au 30 juin mais ce n’était pas obligatoire pour ceux de STS qui ne clôture ses comptes annuels qu’au 31 décembre. Ils le seront à l’issue de l’exercice comme chaque année.