Animateur de la Communauté des revendeurs informatiques, Cyril Kezzar milite pour la création d’une fédération qui négocierait des marges arrière pour les revendeurs. Nous reprenons son plaidoyer.

 

La première question que nous devons nous poser est la suivante. Comment pouvons-nous augmenter nos marges ? En effet, c’est bien de cela qu’il s’agit. Nous fixons tous nos prix de vente plus ou moins de la même façon, on prend un prix d’achat et on y applique un taux de marge en fonction de la famille du produit, du marché et d’une multitude d’autres éléments que chacun gère à sa manière. Or, notre problème aujourd’hui n’est pas de vendre moins cher, notre objectif principal doit être de faire plus de bénéfices sur la vente de matériel.

Il y a deux façons d’y parvenir. La première, c’est de vendre plus cher. Pour y parvenir, la fédération devra faire le maximum pour améliorer notre image de marque auprès de nos clients. Il n’est pas si compliqué de leur faire comprendre qu’ils prennent un gros risque en achetant du matériel ailleurs que chez des professionnels. Nous rencontrons tous les jours des cas de clients qui regrettent profondément de s’être laisser tenter par la promotion du supermarché d’à coté.

Mieux faire respecter les prix publics

De plus, la fédération devra user de son pouvoir de lobbying pour essayer de forcer les constructeurs à faire respecter, voire augmenter les prix publics. Actuellement, chaque fabricant fixe des prix publics en espérant que leurs machines soient vendues le moins cher possible. Que leur produit soit distribué pour 50 ou 100 euros ne change rien à leurs marges et à leurs coûts de fabrication, moins c’est cher et plus ils en vendent. Les dindons de la farce sont toujours les mêmes, nous petits revendeurs, mais nous ne sommes pas les seuls, nos grossistes souffrent aussi de cette situation.

La seconde façon d’améliorer nos bénéfices sur la vente de matériel, c’est bien sûr d’acheter moins cher sans baisser nos prix de vente. Je précise bien sans baisser nos prix de vente car si nous continuons à appliquer le même coefficient de marge, la baisse de nos prix d’achats ne fera qu’empirer la situation. Comment y parvenir ? Et bien c’est simple, la solution existe depuis longtemps et les grandes surfaces ou du moins leurs centrales d’achats l’ont bien compris, contrairement à nous. Cette solution s’appelle la remise arrière.

Pressurer les grossistes n’est pas la solution

Nos grossistes sont dans la même situation que nous, arrêtons de penser qu’ils s’engraissent sur notre dos, les faillites successives d’acteurs importants du marché le démontrent. Arrêtons de croire qu’en achetant en volume on peut obtenir des remises de 10%. C’est complètement faux, lorsqu’il m’arrive d’acheter 30 portables d’un coup pour un gros marché je grappille difficilement plus de 2 ou 3 points de marge. Pensez-vous vraiment que ma remise triplerait si j’en achetais 100 ? Non, ce n’est pas en pressant nos grossistes que nous trouverons la solution. Pourtant elle existe.

Les centrales d’achats des grandes surfaces ne tirent pas leur puissance de leur volume. Leur force, c’est de décider quels produits seront distribués dans leur magasin. Leur force, c’est d’être le prescripteur pour des centaines de points de ventes et donc d’assurer de ce fait au fabricant qui s’y fait référencer de réaliser un gros chiffre d’affaire et de voir ses ventes progresser fortement. La centrale d’achat choisit en priorité les fabricants qui vont lui concéder les remises arrières les plus fortes. La centrale d’achat se moque de savoir si le magasin qui va distribuer le produit va le vendre avec 2, 3, 4 ou 5 points de marge.

Les marges sont réalisées en amont par les centrales d’achat

D’après mon expérience de ce genre de système, je peux même vous affirmer que plus les marges des magasins sont basses et plus les centrales sont contentes. Quand un chef de rayon demande une augmentation il devient simple alors de lui faire croire qu’en réalisant des marges inférieures à 5% il n’est pas rentable pour sa société. Les marges sont donc réalisées en amont de tout cela. Quand le produit sort de la centrale, 60% de cette marge est déjà faite, puisque les centrales refacturent aux magasins plus cher qu’elles n’achètent, soit-disant juste pour compenser leurs coûts de fonctionnement.

Une centrale d’achats, c’est avant tout une force de prescription et c’est cette force qui lui permet d’obtenir des prix auprès des fabricants. Une centrale d’achats vit grassement sur le dos des magasins qui lui donnent son pouvoir. Or, ce pouvoir nous l’avons. Nous sommes déjà plus de 200 prêts à nous unir pour pouvoir exercer cette force. Ce qui nous manque ce n’est certainement pas un local pour commander ensemble et dispatcher les produits, ce qui nous manque c’est cette unité qui nous permettrait de choisir ensemble les produits que nous distribueront en nous basant sur des critères de qualité bien sûr mais en nous basant aussi sur des critères de rentabilité. Favoriser les constructeurs qui nous rapportent, vous trouvez ça choquant ? Pas moi.

Pas besoin de regrouper nos achats pour bénéficier de marges arrière

Pour vous donner un exemple, je pratique déjà ce système avec l’un de mes fournisseurs que je ne citerais pas. Chaque année, au mois de juin, ce grossiste fabricant me fait un chèque de 5% du montant total de mes achats annuels. Alors, restons calme, ça ne fait pas une somme énorme, mais c’est de la marge nette. Si j’avais cette remise lors de mon achat, je pratiquerais le même calcul qu’habituellement pour définir mon prix de vente. Je vendrais moins cher, c’est vrai, mais je ferais moins de marge. Je ne pense pas que cela soit ce que nous souhaitions.

Nous sommes déjà une centrale d’achats, nous avons, si nous arrivons à nous unifier ce pouvoir de prescription, ce pouvoir de pression qui fait que 200 magasins peuvent faire miroiter à n’importe quel constructeur une augmentation de ses ventes. Pas besoin de regrouper nos achats pour cela, pas besoin d’augmenter nos coûts de logistique, pas besoin de verser une cotisation. La force d’une centrale, c’est ses magasins, ce ne sont pas ses entrepôts. La force d’une centrale c’est son pouvoir de prescription. La centrale c’est nous, la fédération, et nos grossistes pour la logistique.

Un chèque tous les six mois

Voilà comment je vois les choses. La fédération négocie avec un constructeur. S’il y a accord, nous, revendeurs, nous nous engageons à pousser les produits concernés par cet accord. Pas n’importe lesquels, on les choisit ensemble. Personne n’est obligé mais tout le monde y gagne. On commande ensuite nos produits chez nos grossistes habituels, au prix habituel. En fin d’année ou tous les six mois, le fabricant trace nos achats via les grossistes et nous envoie à chacun un chèque de 1, 2, 3 % ou plus du montant de nos achats. Le fabricant y gagne une augmentation de ses volumes de vente et une amélioration de son image de marque, ses produits étant poussés par des professionnels. En fin de contrat la fédération renégocie en fonction du volume réalisé.

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