Les logiciels prennent une importance grandissante dans la stratégie de bout en bout de Dell. Explications d’Emmanuel Mouquet, vice président et DG des ventes channel EMEA.


Dell vient d’annoncer le rachat de Quest Software. Quelle est la finalité de cette transaction à 2,4 milliards de dollars ?

Emmanuel Mouquet : Dell a créé il y a six mois une division software qui s’ajoute à ses pilliers infrastructures, services et postes clients. Le rachat de Quest s’inscrit dans le processus de consolidation de cette division. Quest, c’est 100.000 clients dans le monde, 4.000 partenaires et un catalogue de près de 200 produits orientés principalement administration et sécurisation des infrastructures IT. On y trouve notamment des outils d’analyse et de gestion de performance des bases de données, une offre de gestion des terminaux, une solution de migration autour de Windows Server, et une brique de sécurité de gestion des accès et des ressources qui va compléter notre offre de contrôle des accès héritée de Sonicwall et nos services de sécurité managés SecureWorks.

Est-ce que ce rachat ne vous éloigne pas un peu plus des PC, votre coeur de métier historique ?

Emmanuel Mouquet : Les postes clients restent un pillier fondamental de notre stratégie mais il faut avoir à l’esprit que le monde IT de demain reposera beaucoup plus sur les datacenters. Regardez les tablettes et autres terminaux mobiles : leur usage relève avant tout de problématiques de datacenters. Pour un euro dépensé dans les terminaux, cinq le sont dans les infrastructures. Les logiciels, c’est une extension fondamentale pour Dell car ce sont eux qui vont permettre d’orchestrer toutes les composantes de notre catalogue pour en faire une offre intégrée de bout en bout allant du poste de travail au datacenter.

Est-ce réellement une opportunité pour le channel ?

Emmanuel Mouquet : Plus que jamais. Plus on entre dans le datacenter et plus on constate que la valeur ajoutée des partenaires augmente. En France, le channel représente environ 27% de notre business global. Mais si on regarde dans le détail, on s’aperçoit que les partenaires représentent 35% de notre business serveur et même 50% de nos ventes de produits de stockage et réseaux. Le datacenter, c’est par essence un assemblage d’équipements et de systèmes qu’il faut intégrer entre eux. Dans ce contexte, les partenaires sont les mieux placés. L’avenir est à l’intégration.

Les rachats de Wyse et de SonicWall viennent d’être finalisés. Où en êtes-vous de leur intégration ?

Emmanuel Mouquet : En effet, l’intégration de Wyse est engagée depuis deux à trois semaines et celle de SonicWall a débuté il y a environ un mois. Dans les deux cas, nous procédons par ce que l’on a appelé une acquisition inversée : nous laissons leur autonomie aux équipes rachetées mais nous mettons les ressources Dell à leur disposition. Ce sont ainsi 2000 personnes qui sont désormais en mesure de parler de leurs technologies aux clients en Europe (et 700 aux partenaires) contre une centaine jusqu’ici. Et rapidement, ces moyens devraient également profiter à leur innovation : depuis que nous avons racheté EqualLogic et Compellent, nous avons multiplié par trois leurs capacités de R&D par rapport à leurs capacités initiales.

Allez-vous conserver leurs grossistes respectifs sachant que vous avez jusque là été plutôt rétifs à l’idée de confier une partie de votre distribution aux grossistes ?

Emmanuel Mouquet : C’est vrai que nous avons commencé à développer le canal grossiste sur le tard. Toutefois, des partenariats ont été initiés avec des sociétés comme Dexxon ou MCA dans le domaine de l’impression ou comme Magirus dans les infrastructures. Aujourd’hui, les grossistes représentent 10% de notre business indirect. En ce qui concerne les grossistes de Wyse et SonicWall, une remise à plat est en cours qui devrait déboucher sur leur intégration dans notre stratégie de distribution et un élargissement du portefeuille de solutions auquel ils ont accès.

Quand on voit les réductions d’effectifs chez HP motivées notamment par l’érosion des marges dans les PC, on voit mal comment Dell, dont les activités PC restent également prédominantes, pourrait y échapper.

Emmanuel Mouquet : jusque là, nous n’avons aucun plan dans ce sens chez Dell et encore moins sur la division partenaires. L’indirect chez Dell croit plus vite que le marché depuis plus de quatre ans qu’il existe. Et cela va continuer. Nous prévoyons de multiplier par cinq nos ventes indirectes (BtoB) en Europe de l’Ouest au cours des cinq-six prochaines années pour atteindre 10 Md€, soit environ 25% des dépenses d’infrastructures IT transitant par les partenaires (contre 7% aujourd’hui). Nous pensons que nous représentons une opportunité pour les partenaires de diversifier leurs sources d’approvisionnement et de se différencier. Il n’y a donc pas de raison que nous cessions d’investir, du moins sur le channel.