Le mois dernier, Datto déposait auprès de la SEC une demande d’enregistrement pour une éventuelle introduction en bourse, un document incomplet puisqu’il n’indiquait pas le nombre d’actions à offrir, ni la fourchette du prix d’introduction. Dans la rubrique « facteurs de risques », le fournisseur de services et d’outils à destination des MSP, issu de sa fusion avec Autotask en 2017, évoquait des risques liés à la pandémie de Covid-19. Rien de surprenant, ce type d’avertissement figurant dans plusieurs formulaires S-1 déposés auprès du gendarme de la bourse US. Suivait toutefois une longue liste d’autres facteurs pouvant décourager un investisseur non aguerri.

La nouvelle mouture du formulaire déposée cette semaine s’attarde encore plus longuement sur les facteurs de risques. On découvre dans leur longue liste (49 pages) certains avertissements plutôt surprenants. Volonté d’être totalement transparent ?

En effet, ces avertissements mettent directement en cause le propriétaire de la société, Vista Equity Partners. Sous l’intitulé « Vista nous contrôle et leurs intérêts peuvent entrer en conflit avec les nôtres ou les vôtres à l’avenir », il est indiqué que le fonds d’investissement, qui détiendrait environ 72,2% des actions ordinaires de la société après l’introduction en bourse (ou 70,7% si les souscripteurs exercent pleinement leur option d’acquérir des actions supplémentaires), n’a pas l’intention de partager une once de pouvoir.

« Vista contrôlera le vote de toutes les questions soumises au vote de notre conseil d’administration, ou de notre comité de direction, ou des actionnaires, ce qui lui permettra de contrôler l’élection des membres du conseil et toutes les autres décisions de l’entreprise », peut-on lire. « De plus, nos statuts prévoiront que Vista aura le droit de désigner le président du conseil d’administration tant que Vista détiendra en propriété véritable au moins 30% ou plus des droits de vote des actions de notre capital social alors en circulation, et généralement habilitées au vote lors de l’élection des administrateurs. » On y apprend également que cette concentration du pouvoir pourrait conduire à une vente non sollicitée de l’entreprise et priver les actionnaires de l’opportunité de recevoir un prime en cas de vente des actions, pouvant ainsi affecter la valorisation de l’entreprise.

Il est ajouté dans un autre paragraphe que l’autorité de Vista s’étendra au-delà de la salle du conseil. « Vista exercera une influence significative sur notre gestion, nos plans d’affaires et nos politiques, y compris la nomination et la révocation de nos dirigeants, les décisions concernant une future levée de capitaux, ainsi que la modification de notre charte et de nos statuts qui régissent les droits attachés à nos actions ordinaires », peut-on encore lire.

Le document mis à jour indique par ailleurs que le prix d’introduction sera compris entre 24 et 27 dollars par action, ce qui pourrait déboucher sur une levée de fonds de 521,7 millions de dollars en supposant un prix de 25,50 dollars par action (ou 601,3 millions de dollars si les souscripteurs exercent pleinement leur option d’acquérir des actions supplémentaires). La société envisage d’utiliser cet argent pour rembourser ses dettes qui au 30 juin totalisaient 591,6 millions de dollars. « Au 30 juin 2020, nous n’avions aucune capacité d’emprunt supplémentaire en vertu de notre facilité de crédit renouvelable, qui comprend 2,9 millions de dollars en lettres de crédit en cours », précise le document. Il rappelle entre autres que Datto possède pour 4 millions de dollars de créances irrécouvrables, en raison de problèmes de conversion du système de facturation rencontrés en 2019.

Toujours sur le plan financier, il est indiqué que le dépôt d’une introduction en bourse est de 8,4 millions de dollars, dont 3,2 millions de dollars de frais juridiques.

Pour l’exercice clos le 31 décembre 2019, Datto affichait une perte nette de 31,19 millions de dollars, pour un chiffre d’affaires de 458,75 millions de dollars, comparativement à une perte nette de 37,72 millions de dollars et à un chiffre d’affaires de 387,36 millions de dollars pour l’exercice précédent. L’exercice 2020 s’annonce sous de meilleurs auspices avec, pour le premier semestre, un bénéfice net de 10,12 millions de dollars et un chiffre d’affaires de 249,13 millions de dollars.

Dans une lettre accompagnant le formulaire S-1, le CEO de l’entreprise Tim Weller s’adresse aux investisseurs. « Nous serions ravis que vous vous joigniez à nous. Notre histoire a toujours été celle de la création, de la rupture et de la croissance. Nous croyons en la croissance de l’industrie des MSP qui simplifient la gestion de la technologie pour les PME dans un monde de plus en plus complexe où la technologie est à la fois une opportunité et une menace. Nous sommes sur ce chemin avec nos partenaires MSP et nous ne faisons que démarrer », affirme-t-il. Convaincus ?