Olivier de la Clergerie, directeur général de LDLC, revient pour Channelnews sur les événements marquants de l’exercice 2019-2020 et sur l’impact du Covid sur l’activité du Groupe.

Channelnews : LDLC a maintenu une bonne dynamique commerciale pendant le confinement. Vous évoquez même un effet positif qui devrait s’incarner dans les résultats du premier trimestre 2020-2021 qui seront publiés en août. Comment expliquez-vous le maintien de cette bonne dynamique commerciale alors que la plupart des entreprises ont tourné au ralenti, y compris dans l’IT?

Olivier de la Clergerie : Plusieurs éléments sont venus soutenir le marché high tech pendant cette période : l’école à la maison – l’ordinateur familial a rapidement montré ses limites –, le télétravail… La crise a changé le rapport des Français à l’usage digital. En parallèle, ils ont changé leurs habitudes de consommation en se tournant davantage vers le e-commerce. Cela a eu un effet positif sur notre activité BtoC, qui reste à 80% en ligne. Au global, nous ne devrions pas avoir d’impact négatif sur la période alors que la plupart de nos boutiques étaient fermées (faute d’activité suffisante) et que l’activité BtoB [qui représente près d’un tiers des revenus] a fortement ralenti (-10% sur le premier trimestre 2020, dernier de l’exercice 2019-2020). La performance mérite d’autant plus d’être soulignée que nous n’avons pas pris de commandes inférieures à 70 euros pendant le confinement en raison de la saturation des transporteurs.

Channelnews : L’exercice 2019-2020 a notamment été marqué par le repositionnement de Materiel.net qui s’est séparé de la partie de son catalogue la plus faiblement contributive en termes de marge. Ce qui a contribué notamment à l’amélioration de la marge brute. Toutefois, lors de votre conférence de présentation des résultats annuels vous avez admis que la marque avait déçu depuis son rachat en mars 2016. Pourquoi ?

Olivier de la Clergerie : En fait, j’ai expliqué que ce dossier de rachat avait été plus compliqué qu’anticipé mais qu’au final cela avait permis au groupe d’évoluer et surtout de faire évoluer son système d’information. Si aujourd’hui l’absorption de Top Achat a pu être se faire de manière fluide, c’est grâce à cette courbe d’apprentissage. Bien-entendu, ce repositionnement de Materiel.net ne s’est pas fait sans sacrifices : son chiffre d’affaires a reculé de l’ordre de -30% sur le premier semestre de l’exercice. Mais ce travail de repositionnement est aujourd’hui achevé.

Channelnews : Au moment où vous acheviez votre travail de repositionnement de Materiel.net, vous annonciez l’acquisition de Top Achat, qui est orienté sur des prix plus agressifs à moindre marge. Pourquoi ce rachat ? Est-ce que cela ne risque pas de ruiner vos efforts pour améliorer la marge brute (qui est passée de 17% à 19% du chiffre d’affaires sur l’exercice clos fin mars) ?

Olivier de la Clergerie : À chaque marque son positionnement. Materiel.net était clairement orienté haut de gamme. La présence au catalogue de produits faiblement contributifs en termes de marge dénaturait la marque et avait tendance à attirer une clientèle uniquement intéressée par le prix. Cela créait une dissonance entre le positionnement de la marque et son offre. C’est la raison qui nous a incité à repositionner la marque. Top Achat est positionné sur des prix plus agressifs à marges inférieures. Ce positionnement correspond à son image de marque et il n’y a pas de raison d’en changer même si l’équilibre global des la marge brute peut s’en trouver tiré vers le bas in fine. Cette acquisition devrait être fortement relutive pour le groupe. Top Achat a réalisé plus de 93 M€ en 2019 et avait une croissance à deux chiffres. Nous pensons que la marque a la capacité à dépasser rapidement les 100 M€. Cet apport de chiffre d’affaires devrait nous permettre d’écraser nos charges fixes car nous ne reprenons que le fonds de commerce et une partie de l’effectif (55 personnes). Tout le backoffice sera assuré par le groupe. Ce sera probablement la plus belle acquisition du groupe. Elle devrait nous mener dès cette année au-delà de 600 M€ de chiffre d’affaires.

Channelnews : L’une des déceptions de cet exercice 2019-2020 aura été la stagnation de l’activité BtoB à 162,3 M€, qui avait progressé de 34% sur l’exercice précédent, et pour laquelle vous aviez annoncé votre intention de la porter rapidement à 300 M€ de revenus. Que s’est-il passé ?

Olivier de la Clergerie : Nous ne sommes pas mécontents de notre exercice sur cette activité compte tenu de l’intensité de la concurrence. Il faut aussi rappeler que sans le Covid, qui l’a impactée à la baisse sur le dernier trimestre (-10%), l’activité BtoB aurait sans doute progressé. Le plus important, ce sont les opportunités qui s’offrent sur cette activité. Le Covid va durablement changer la donne notamment en accélérant le développement du télétravail et donc les ventes d’infrastructures. On a beaucoup travaillé sur la mise en place de synergies avec BIMP, notamment pour développer le portefeuille de services, la notoriété et le recrutement de nouveaux clients de LDLC Pro. En conséquence de quoi, nous maintenons notre objectif de 300 M€ sur cette activité.

Channelnews : Vous affichez un objectif de zéro endettement net sur l’exercice en cours mais vous venez de souscrire à un prêt garanti par l’État de 18 M€. Pourquoi ?

Olivier de la Clergerie : Il s’agit d’être en mesure de faire face le cas échéant à nos besoins en trésorerie, notamment sur l’activité BtoB. Mais nous n’en avons pas un besoin immédiat.

Channelnews : Quel enseignement majeur garderez-vous de cette crise ?

Olivier de la Clergerie : Je garderai en tête l’importance du lien social. Je pense aux collaborateurs qui ont répondu présent, qui se sont serré les coudes, qui se sont particulièrement impliqués pendant cette période. Si on n’a pas eu de souci particulier, c’est grâce à eux, à cet esprit d’équipe qui les caractérise et à ce lien social auquel nous tenons particulièrement..