Martin Bouygues exhorte les élus d’empêcher le renouvellement de l’accord d’itinérance entre Orange et Free. Ce dernier, accusé de ne pas investir suffisamment, est également la cible de la CFE-CGC-UNSA.

 

L’arrivée de Free sur le marché de la téléphonie mobile n’en finit pas de faire couler beaucoup d’encre. Martin Bouygues vient ainsi d’écrire une lettre à l’ensemble des députés et sénateurs leur demandant de ne pas renouveler le contrat d’itinérance qui lie la filiale d’Iliad à Orange jusqu’en…2018. Une demande qu’il a également formulée à l’Arcep. Le patron de Bouygues Telecom estime que le contrat signé avec l’opérateur historique permet à Free « de n’investir dans son réseau mobile que là où il est sûr que c’est rentable ».Ce dernier n’aurait donc pas les mêmes contraintes que ses concurrents et pourrait ainsi proposer des tarifs nettement plus compétitifs.

Il formule la même demande pour le futur réseau 4G. La signature d’un éventuel contrat d’itinérance « aurait pour conséquence de distordre encore plus la concurrence et d’aggraver très fortement le déséquilibre actuel », affirme-t-il.

La patron du troisième opérateur n’est pas le seul à mener l’offensive contre Free Mobile. La CFE-CGC-UNSA France Télécom Orange a de son côté publié un communiqué tirant des conclusions similaires « Si Free Mobile peut aujourd’hui offrir des tarifs « cassés », c’est à la fois parce qu’il joue simultanément sur le modèle du coût variable, tant sur le fixe que sur le mobile, grâce à l’utilisation des réseaux de l’opérateur historique, jusqu’à ce qu’il ait suffisamment de clients dans une zone géographique donnée pour basculer sur ses propres infrastructures, gérant ainsi son investissement sans aucune prise de risque, et laissant les zones moins ou pas rentables à la charge de ses concurrents », peut-on lire. En provoquant la baisse du chiffre d’affaires de ses concurrents, Free -restreindrait leurs marges de manœuvre« pour embaucher comme pour investir » et serait responsable de la perte d’environ 55.000 emplois..

L’union syndicale demande donc au gouvernement de ne pas se contenter de « crier au loup », faisant ainsi allusion à la décision d’Arnaud Montebourg et de Fleur Pellerin de convoquer les opérateurs « afin qu’ils « se débrouillent » pour ne supprimer aucun emploi »

« Il est néanmoins nécessaire que l’État prenne conscience que les injonctions ne suffiront pas : on a pu voir, sous la précédente mandature, la faible efficacité de celles de Monsieur Wauquiez en ce qui concerne la relocalisation des centres d’appels », insiste l’union syndicale.

 

Ne pas prendre les opérateurs pour des vaches à lait

Cette dernière précise qu’au cours de son université d’été des 3 et 4 juillet derniers, différents experts – parmi lesquels Olivier Roussat, directeur général… de Bouygues Telecom, Jean-Michel Huet, directeur associé de Bearing Point, et Yves Le Mouël, directeur général de la Fédération Française des Télécoms – ont planché sur l’avenir de la filière, arrivant à la conclusion qu’il fallait revoir  la régulation du marché et les modalités de taxation. « Il faut cesser de penser les opérateurs de télécoms comme des « vaches à lait » pour alimenter les caisses de l’État à court terme, tout comme il faut cesser de penser le citoyen comme un simple « consommateur » dont on améliore le pouvoir d’achat en organisant la baisse des prix par une concurrence effrénée. Car pour consommer, encore faut-il avoir… des revenus, et donc du travail ! », écrit le syndicat qui évoque à titre d’exemple la quasi disparition des équipementiers sur le territoire européen, victimes de « l’idéologie ultra libérale et de la concurrence mondialisée. » Faisant ensuite allusion à Google, à Facebook et autre Amazon, le texte dénonce « les acteurs nord-américains qui profitent de la qualité des réseaux de télécommunications français pour développer leurs services, leurs marges et leur capitalisation boursière, sans rendre, loin s’en faut, les mêmes contributions fiscales et en emplois que les opérateurs à la nation ».

Et le texte de conclure « Faudra-t-il attendre que nos télécommunications soient opérées par des acteurs chinois pour se pencher sur l’organisation du secteur ? »