Le Conseil régional de Bretagne a choisi de délocaliser une partie de ses applications non critiques dans le cloud d’Amazon. Une décision qui surprend à l’heure des clouds souverains de CloudWatt et Numergy.


Comme un coup de canif dans les belles promesses des cloud souverains franco-français. Mercredi 26 novembre, le Conseil régional de Bretagne a officiellement annoncé son intention d’utiliser l’infrastructure de Cloud de l’Américain Amazon Web Services pour externaliser une partie de ses processus informatiques. Déportant ainsi certains traitements de ses données, non critiques, vers les datacenters européens d’AWS, basés notamment à Dublin, en Irlande. Comme un nuage américain dans le ciel breton.

Ce projet d’externalisation vers le cloud a été mené au terme de plus d’un an de tests et d’expérimentation, raconte Neoxia dans un communiqué, la société retenue par le Conseil régional (suite à un appel d’offre) et qui a la charge d’accompagner la migration et de former les équipes de l’institution aux processus du cloud. Cette migration s’inscrit ainsi dans un « schéma directeur informatique » qui vise à adapter l’infrastructure informatique du conseil au mode « à la demande ». Et évidemment, à mener une stratégie de maîtrise des coûts informatiques.

La prestation cloud est plurielle : la région Bretagne compte ainsi s’appuyer sur l’infrastructure cloud d’AWS pour d’abord mettre en place un plan de reprise d’activité (PRA). Ce dispositif, qui ne porte pour l’heure que sur les applications non critiques de l’institution, vient ainsi compléter un PRA existant, quant à lui, localisé sur un site distant. Cette étape est semble-t-il encore à l’étape de tests, mais  « conduira peut-être la Région à généraliser l’usage d’AWS pour ces applications externes  non-critiques », souligne Neoxia dans ce même communiqué.

Le cloud d’AWS servira également de support à des applications Web que le conseil héberge temporairement. Afin de « réduire les délais de mise à disposition des infrastructures pour des applications Web temporaires, événementielles ou inter-régionales », souligne encore Neoxia.

Enfin et c’est un point important, le Conseil régional souhaite que son expérience cloud serve de galop d’essai aux autres conseils régionaux, afin que ceux-ci se « familiarisent » avec la notion de cloud. Le Conseil a ainsi hébergé sur AWS le logiciel baptisé « Gertrude », un projet d’outil de gestion  de l’inventaire du patrimoine développé en collaboration avec la quasi-totalité des régions métropolitaines et d’outremer. Ce projet, qui doit ainsi se généraliser, sera exposé sur le cloud AWS afin que le 24 autres conseils régionaux commencent à se l’approprier. Gertrude, une application Java qui s’appuie notamment sur la base de données NoSQL MongoDB, est déployée sur une instance AWS de 64 Go, à disposition des autres institutions publiques.

Un pied de nez à « Andromède »

« Neoxia a su répondre aux critères très stricts de notre cahier des charges prévoyant notamment un hébergement de la plateforme sur le territoire européen avec l’impératif de contrôler à tout moment notre consommation budgétaire», commente le conseil dans un communiqué. Européen mais pas français, et ce alors que l’Etat a injecté quelque 150 millions d’euros dans les sociétés CloudWatt et Numergy – le deux ex projets Andromède – dont la vocation est de proposer un Iaas aux institutions publiques (le secteur privé est également couvert) en France. L’arrivée tardive de ces deux acteurs, et du flou qui entoure encore aujourd’hui leurs offres respectives, a certainement refroidi le conseil régional de Bretagne.

Déjà irrité par la décision de l’Etat de financer des projets de sociétés poids lourds du secteur (Orange / Thalès – SFR / Bull), les acteurs du cloud français réagissent à cette décision chez nos confrères de l’AFP. À l’image de Denis Soucheyre, président de Neo Telecoms, un opérateur de cloud hexagonal : « C’est vraiment une première : un conseil régional annonce son choix pour le cloud computing d’Amazon et délocalise ses données en-dehors de la France, lance-t-il. D’un côté l’Etat veut créer des infrastructures nationales, un cloud à la française, et de l’autre, des collectivités optent pour les acteurs américains. Cherchez l’erreur ! ».

La polémique autour du Patriot Act n’aura ainsi pas convaincu la région Bretagne. Cette loi américaine donne le droit aux autorités US d’accéder à des données d’entreprises européennes contenues dans des infrastructures de cloud américaines. Et ce même si ces données sont stockées sur des serveurs européens, et concernent des clients européens. Suite à cette « découverte » qui avait été dévoilée au grand jour par un responsable de Microsoft, les Pays-bas avaient considéré le fait d’exclure les acteurs du cloud US de leurs appels d’offres.

 

Suite à ces réactions, la région Bretagne a tenu à préciser dans un communiqué « qu’aucune donnée de la Région ne se trouve à ce jour hébergée dans le serveur d’Amazon. L’utilisation de ses services n’est envisagée qu’en cas de sinistre majeur sur le système d’information de la Région ». Elle ajoute également qu’elle « veille activement, avec l’ensemble de ses partenaires, opérateurs télécoms et sociétés de services informatiques, à l’émergence de solutions françaises qui offrent ce même niveau de maturité, seul capable de répondre durablement aux problématiques des directions informatiques de structures publiques ».

 

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