Perçu pendant un temps comme la solution de beaucoup de problèmes, l’outsourcing est mis en question et soumis à la concurrence de nouvelles tendances comme le cloud.

L’outsourcing a connu ces derniers temps des changements importants. D’abord, les méga-contrats de plusieurs millions de dollars et multi-annuels de type « big bang » ont tendance à ne pas être renouvelé et donc à diminuer fortement. De manière corrélative, les nouveaux contrats ont un périmètre plus limité à la fois sur le plan fonctionnel et dans le temps. Enfin, les services d’infrastructure traditionnels ne peuvent soutenir la concurrence à long terme avec les services cloud. C’est ce qu’indique l’analyste Bruce Guptill du cabinet Saugatuck dans une note intitulée IT Outsourcing Is Changing, Not Dying. Et une bonne partie de ces contrats d’outsourcing étaient signé avec des sociétés de services indiennes dont le nombre était devenu impressionnant.

Les chiffres attestent clairement de cette tendance. En avril dernier, le cabinet KPMG a publié une étude montrant sans conteste une telle évolution. Peu après, le Wall Street Journal publiait un article au titre évocateur The Seven Signs of India’s Outsourcing Apocalypse. Le montant des contrats signé au niveau mondial en 2014 s’est établi à 120 milliards de dollars en forte baisse par rapport aux 207 milliards en 2010. Sur la même période, le nombre de contrats a été réduit de plus de 60 %. La valeur moyenne des 100 plus importants signés au niveau mondial est passé de 552 M$ en 2012 à 452 M$. En 2014, on a dénombré seulement 9 contrats de plus de 1 milliard de dollars – dont 5 signés par IBM-, le nombre le plus bas de ces dix dernières années. Clairement, les méga-contrats se font rares et sont par des entreprises de plus en plus rares. La valeur des contrats avec des sociétés indiennes est souvent inférieure de 20 à 30 % lorsqu’ils sont renouvelés selon le cabinet Emkay Research selon ce qui semble devenu une règle aujourd’hui et que connaissent bien les DSI : faire plus avec moins.

L’avantage comparatif des informaticiens indiens est toujours significatif même si l’écart à tendance à se réduire. Le salaire annuel d’un développeur indien selon le site de recherche d’emplois Naukrihub.com était de 21 000 dollars par an contre 93 000 dollars pour son homologue américain selon le Bureau of Labor Statistics. Les entreprises d’outsouring indiquent que les clients sont de plus en plus exigeants en demandant des résultats plus rapides. Du coup, les spécialistes connaissent un certain ralentissement. Selon le Nasscom, le nombre d’emplois en Inde liés à l’outsourcing devrait être compris entre 200 000 et 220 000 comparé aux 273 000 emplois supplémentaires en 2011. Les entreprises indiennes subissent de plein fouet cette évolution et ont vu leur croissance se réduire de manière significative. Tata Consultancy a vu la croissance de son chiffre d’affaires passer de 37 à 15 %. Pour Infosys, de 19 à 6 %.

Mais contrairement aux idées couramment répandues, « l’outsourcing de l’IT en tant que concept, que stratégie et comme opportunité n’est pas en train de disparaitre (…) mais en train de changer » affirme Bruce Guptill. Et pour l’heure, « ce n’est pas tant le changement que la rapidité de ce changement qui empêchent les fournisseurs d’outsourcing de répondre au mieux aux demandes des entreprises ».

« Nous sommes, aujourd’hui, trop lourd pour suivre la rapidité de l’évolution du marché », déclarait le responsable du Business Development d’un grand fournisseur indien à l’occasion d’une conférence organisée par la cabinet Saugatuck. Les grands ERP comme SAP ou Oracle qui nécessitent des bataillons de développeurs pour la personnalisation et la maintenance perdent de leur influence. A l’inverse, les applications en mode cloud basée sur Hana et Fusion gagnent du terrain. Déclaration concordante de Yegor Bugayenko, CTO de Teamed.io, une société d’outsourcing spécialisée dans le développement qui considère que l’outsourcing traditionnel ne fonctionne plus (How Cloud, APIs Are Transforming Outsourcing).

Dans un article qui avait retenu l’attention (GE Capital CIO: Outsourcing Went Too Far), le DSI de GE Capital expliquait que son entreprise était allée trop loin dans cette évolution vers l’outsourcing. « Nous avons outsourcing une partie de notre expertise et par la même occasion abandonné un pan de notre savoir-faire (…). Il nous faut faire machine arrière expliquait-il en substance et réintégrer une partie de ces compétences ». Certains ont baptisé ce mouvement d’ « insourcing ». GE Capital qui gérer plus de 500 milliards d’actif, qui avait sous-traité jusqu’à 80 % de son IT, expliquait qu’elle souhaitait revenir à un ratio de 50/50. C’est sous l’influence de Jack Welsh, la charismatique patron de l’entreprise de 1981 à 2001, que GE avait été l’un des pionniers de l’outsourcing dans les années 90, sous-traitant des pans entiers de son informatique à des fournisseurs indiens. Une évolution qui a été suivi par quasiment toutes les grandes entreprises. Dans le même temps, les grands acteurs des services informatiques – IBM, Capgemini, Atos ou Steria pour ne citer qu’eux – ont engagé des partenariats avec des sociétés indiennes ou développé leur propre filiale. Evolution que l’on pourrait comparer au niveau de l’entreprise toute entière à celle de la Fabless Company dont Serge Tchuruk, la patron d’Alcatel s’était fait le chantre au début des années 2000. Et dont on a compris aujourd’hui, qu’elle constituait une impasse lorsqu’elle était poussée à un niveau extrême.

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