En quelques années, Thierry Martin, le président-fondateur du revendeur francilien LNA est parvenu à imposer son entreprise parmi les poids lourds de la distribution IT. Il commente sa réussite.

 

 

Channelnews : La crise semble avoir exacerbé la lutte commerciale, notamment sur le marché des grands comptes où vous intervenez. Au point que chacun s’accuse mutuellement de pratiquer des marges négatives. Vous sentez-vous concerné par ces attaques ?

Thierry Martin : C’est vrai que la lutte est farouche actuellement et que les prix sont parfois très serrés. Il arrive même qu’un prix fournisseur remonte après qu’une affaire ait été conclue. Dans ce cas, nous avons l’habitude d’assumer, quitte à être perdants. C’est sans doute ce que nous reprochent certains de nos confrères qui poussent les prix à leur limite mais se rétractent si ça tourne mal. Je pense surtout que nos concurrents sont mauvais perdants et acceptent mal qu’un petit acteur comme LNA puisse jouer dans la même cour qu’eux et leur souffler des affaires qu’ils se partageaient autrefois entre eux.

Que voulez-vous dire ?


Thierry Martin : C’est ce que j’ai coutume d’appeler la distribution barbichette. Pour préserver les marges du channel, certains constructeurs ont tendance à répondre aux appels d’offre en s’associant de manière exclusive avec l’un de leurs partenaires. Bien sûr, il s’agit d’entente illicite et nous avons même poursuivit en justice l’un d’eux pour cela. Toujours est-il que ces constructeurs ignorent délibérément nos demandes de cotations lorsqu’ils ont déjà répondu avec un confrère, ce qui nous empêche de nous positionner sur certains appels d’offre.

Parti de zéro il y a dix ans, vous êtes néanmoins parvenu à bâtir une entreprise de distribution informatique qui a multiplié par trois ses revenus en trois ans pour atteindre 50 M€ en 2008. Qu’est ce qui vous différencie des autres ? Il y a-t-il une méthode LNA ?


Thierry Martin : Chez LNA, nous avons inventé le sur-mesure à grande échelle. Nous ne rechignons pas à nous charger de ce que les autres ne veulent pas faire, à aller chercher une référence exotique à l’étranger et à la faire venir par avion s’il le faut. C’est comme ça que nous démontrons notre savoir-faire et que nous fidélisons nos clients. La plupart des premiers clients de LNA il y a dix ans sont toujours là : Sofinco, Axa, Banque Populaire… Les gros paquebots ont du mal à travailler ensemble. Aujourd’hui, les grands clients sont souvent organisés en multiples filiales et succursales autonomes. Ils veulent à la fois les prix du gros tout en bénéficiant du service et de la capillarité que seuls les détaillants sont en mesure d’offrir. En clair, ils ont besoin d’agilité et de réactivité. Demandez aux clients comment ils sont traités par les commerciaux des constructeurs et ce qu’ils pensent du fait de ne jamais avoir de décideur parmi leurs interlocuteurs.

 

Mais concrètement comment faites-vous pour tenir la dragée haute à vos confrères, souvent dix à quinze fois plus gros que vous ?


Thierry Martin : Pour le stock et la logistique, nous nous sommes associé à Actebis, qui nous fait au passage profiter de sa capacité financière pour les appels d’offre. En additionnant nos chiffres d’affaires respectifs, nous pesons environ 650 M€, ce qui nous place derrière SCC mais devant Computacenter ou Top Info. Pour les services, nous faisons appels à des sociétés comme Spie Communications, qui s’occupe notamment des déploiements nationaux, ou Osiatis. Cette démarche d’externalisation des services nous a d’ailleurs rendu populaire auprès des SSII comme BT, CS, Thales, qui font de plus en plus appel à nous pour gérer leurs commandes de matériel. L’une de nos forces se situe également dans notre système d’information conçu pour s’interfacer facilement à celui de nos clients. Toutes les commandes sont gérées en EDI sans resaisie. Enfin, nos commerciaux sont intéressés à la marge. C’est ce qui explique que nous sommes bénéficiaires depuis notre création et que nous avons un très faible turn-over.

Quels sont vos axes et perspectives de croissance pour l’exercice en cours ?


Thierry Martin : Cette année, nous avons initié notre déploiement national et international. Nous sommes implantés depuis trois mois à Lyon et depuis quatre-cinq mois à Nantes, où nous venons de remporter nos premières affaires. Nous prévoyons d’ouvrir également des antennes à Toulouse, Marseille, Lille et Strasbourg. Nous avons également un commercial en Allemagne et un bureau aux USA à Dallas. L’idée, c’est de suivre nos clients partout où ils sont. Cette année, nous espérons engranger au moins autant de revenus que l’année dernière. Mais depuis le début de l’année, nous sommes plutôt en croissance de 20%. Au cours de derniers mois, nous sommes ainsi entrés chez Suez, à la Société Générale, au Conseil Régional d’Ile-de-France, au Ministère de la Défense