Lors conférence avec les analystes, Adobe a exposé sa stratégie de ré-alignement sur ses activités Digital Media et Digital Marketing. Objectifs : le marché de la pub en ligne et les directions marketing.


C’est finalement ce mercredi 9 novembre qu’Adobe a décidé de tourner une page de son histoire. L’éditeur de Photoshop et de la plate-forme Flash, au coeur des postes de travail et des processus de création des créatifs,  des graphistes et des développeurs Web, change officiellement de positionnement et prend le train du Digital Marketing et Digital Media (tout ce qui a trait à la création de contenu) selon la terminologie du groupe.

 

Deux activités clés sur lesquelles le groupe de San José a mené une stratégie d’acquisitions ces dernières années et sur lesquelles il entend aujourd’hui s’aligner pleinement, a confirmé Shantanu Narayen, le CEO de la firme, à l’occasion d’une conférence avec les analystes. « Nous étendons notre modèle économique vers le content Publishing et la monétisation de ces mêmes contenus. Nous allons doubler nos efforts sur le Digital Marketing, pour au  final devenir les interlocuteurs privilégiés des directions marketing », ajoute-t-il. « Nous allons accélérer la croissance sur les segments où nous avons notre plus grand potentiel et ajuster nos activités pour y parvenir », lance-t-il plus loin.  On comprend alors qu’il s’agit là d’une importante transformation, qui prend ses racines avec l‘acquisition d’Omniture en septembre 2009.

Pour soutenir cette stratégie de ré-alignement, le groupe a annoncé la suppression d’environ 750 postes en Amérique du Nord et en Europe, sans toutefois préciser quels postes seraient impactés, ni les départements concernés. Une coupe dans les effectifs qui couvait depuis qu’Adobe avait décidé de se restructurer autour de deux activités en août dernier. Plus en amont encore, la transition vers cette approche très métier et le changement de discours avait été initié par le groupe lors de la sortie de la plate-forme Digital Enterprise Platform avant l’été, résolument tournée vers les départements marketing.

Le groupe de San José a par ailleurs démontré dans sa stratégie de croissance extérieure que son intérêt était davantage tourné vers l’analytique et la monétisation de contenu. Outre le rachat d’Omniture qui forme le point de départ de « ce nouvel ADN », comme l’a formulé le CTO du groupe Kevin Lynch lors de cette même conférence analyste, le groupe s’est également payé Demdex en janvier 2011, et plus récemment Auditude pour la monétisation des campagnes de pub par vidéo.

Interrogé par la rédaction lors de l’édition 2011 de MAX, la conférence développeur du groupe, Assem Chandra vice-président du Marketing produits chez Adobe (et ex-Omniture) nous avait décrypté  – presqu’en avant-première – les mécanismes qui allaient animer Adobe. « Les outils d’Adobe sont faits pour créer du contenu, mais autour du contenu, il existe tout un commerce de transaction, comme celui de la publicité. Il y a 10 ans, il n’y avait que 3 possibilités pour passer la pub : la radio, la TV et le papier. Aujourd’hui, il existe un nombre de supports plus étendu, comme celui des tablettes et des mobiles notamment. […] Les investissements se sont déplacés vers le Web, il est ainsi impératif de pouvoir mesurer ce qui se passe en ligne, afin que les départements marketing et IT qui font le business puissent optimiser leurs investissements ». Une façon de se positionner sur le marché très juteux de la publicité en ligne qui devrait, selon lui,  générer en 2011 quelque 80 Md$ !

Ce re-positionnement devrait également modifier les lignes budgétaires à terme. « Cela [l’alignement sur les deux activités, NDLR] marque le début d’une transformation de la façon dont nous marketons nos produits, dans un environnement Cloud et connecté.  Il existe des opportunités dans ces deux activités aujourd’hui. Digital Media correspond certainement à un marché plus important, mais le Digital Marketing a une croissance plus rapide. » Surtout, avait-il conclu, « le Digital Marketing alimentera à terme le Digital media et la partie créative du groupe ».

Le Creative Cloud, pivot du modèle économique

Evidemment, l’un des moteurs opérationnels de la transformation d’Adobe passera par deux technologies phare : HTML 5 et le cloud. Pour David Wadhwani, vice-président et directeur général des activités Digital Media, le standard du W3C sera placé au coeur des développements du groupe. « Le seul moyen pour Adobe de répondre à la fragmentation des nombreux terminaux », explique-t-il lors de cette conférence avec les analystes, ajoutant que l’ajout du support de HTML 5 à l’ensemble des gammes de produits Adobe « prendra du temps ».

 

En dépit de l’arrêt des développements du plug-in Flash pour les terminaux mobiles, Adobe ré-affirme également son engagement dans la plate-forme Flash, l’orientant davantage vers le jeu – « avec une volonté de porter la console sur le Web » (on se rappelle la démonstration du portage Flash de Unreal Tournament lors de MAX) – ainsi que vers des fonctionnalités avancées autour de la vidéo. Mais sur le terrain de la mobilité, HTML 5 est désormais la nouvelle religion d’Adobe – comme quoi l’attachement professé par l’éditeur vis à vis de Flash lors des multiples passes d’armes avec Steve Jobs n’était pas si fort que cela…

HTML5 donc, mais aussi Cloud. Car au-delà de la technologie de présentation standard du W3C, la technologie qui pourrait le mieux traduire la mutation engagée par Adobe devrait être le Cloud, et sa déclinaison Adobe : le Creative Cloud. Cette plate-forme dans les nuages, faite à la fois de synchronisation, de partage, de services et d’hébergement formera la base du nouveau modèle économique d’Adobe. Objectif : passer à un modèle de souscription afin d’augmenter les revenus récurrents et faire accélérer la croissance du groupe.

Selon David Wadhwani, le Cloud d’Adobe (qui sera facturé 49 $ par mois pour l’offre particulier et 69 $ pour l’offre groupe) devrait ainsi faire gagner quelque 800 000 utilisateurs au groupe d’ici à 2015 (avec un taux de croissance annuel moyen de l’ordre de 10%). Mais surtout il devrait modifier la structure de revenus du groupe. Adobe espère ainsi qu’en 2015, environ 50% des revenus seront récurrents. A terme, estime Wadhwani, l’objectif est d’arriver à bâtir un modèle reposant à 100% sur des abonnements. 

Egalement sur LeMagIT :

Cloud analytique : Google ouvre officiellement BigQuery 

Wallix lève 2 M€ supplémentaires