Dans la dernière mouture de son étude consacrée aux tendances technologiques, intitulée Tech Trends 2016 : innover à l’ère du numérique, Deloitte livre une définition aussi juste que simple de ce qu’est la transformation digitale : c’est le constat que la technologie joue un rôle central sur tous les aspects du business, de la conception des produits à la production. Dans ce contexte, « chaque entreprise devient de facto une entreprise technologique », assène Deloitte. Dès lors, l’innovation des entreprises est drivée par la technologie. Deloitte a ainsi identifié à l’intention des DSI huit tendances et mutations technologiques « qui incarnent les principaux leviers de l’innovation au sein des entreprises […] et qui auront un impact sur les organisations dans les 18 à 24 mois à venir » : le right speed IT, la réalité virtuelle ou réalité augmentée, les objets connectés, les plateformes autonomes, la blockchain, les reimagining core systems, les industrialized analytics et la RSE

Le right speed IT, ou comment donner de la réactivité à la transformation de l’IT. Deloitte préconise d’insuffler un peu de flexibilité dans la gestion financière, les achats, la gestion des fournisseurs et des contrats… Le cabinet recommande aussi de proposer un cadre méthodologique clair dans la conception des projets, de communiquer régulièrement sur l’avancement des projets, de mettre en place des plateformes d’automatisation pour la gestion des environnements, des tests, des configurations…, de mettre en place des outils intégrés pour le pilotage et la maintenance des solutions, de mesurer les activités.

La réalité virtuelle ou réalité augmentée. L’impact de la réalité virtuelle ou réalité augmentée se fait déjà ressentir dans le monde de l’entreprise dans des domaines tels que la communication et la collaboration, la formation, le service client, l’expérience client ou le marketing interactif, écrit Deloitte. « Les agences de voyages, l’hôtellerie et les sociétés de loisirs offrent des aperçus immersifs et interactifs de leurs croisières et séjours à l’hôtel, permettant aux clients potentiels d’explorer virtuellement les établissements et d’avoir un aperçu des équipements », note par exemple Deloitte. La réalité virtuelle peut permettre de former à distance de la main-d’œuvre non qualifiée sur des tâches techniques ou d’explorer virtuellement des environnements complexes et dangereux. Deloitte note que la capture d’image 3D en haute définition et la cartographie d’infrastructures sont en plein essor, accélérant « les capacités des développeurs à recréer virtuellement des environnements physiques réalistes. »

Les Objets connectés. Gartner prévoit l’utilisation de 6,4 milliards d’objets connectés dans le monde en 2016, en hausse de 30% par rapport à 2015, et leur nombre pourrait atteindre les 20,8 milliards en 2020. En 2016, 5,5 millions de nouveaux objets devraient se connecter au réseau chaque jour, rappelle Deloitte. « Les organisations les plus en pointe dans l’Internet des Objets se concentrent non plus sur les capteurs et autres objets « intelligents », mais sur la création de valeur, à travers la gestion des données, l’exploitation des infrastructures IoT existantes et le développement de nouveaux modèles économiques, poursuit Deloitte. La valeur des objets connectés réside dans les informations qu’ils créent. Adossés à des outils d’analyse correctement déployés, ils peuvent aider les organisations à traduire les phénomènes mesurés en connaissances utiles pouvant permettre par exemple de développer de nouveaux produits, de nouvelles offres ou d’optimiser les processus industriels existants ». Mais Deloitte admet néanmoins qu’il existe encore peu de cas d’usages détaillés. Le cabinet prévoit que les données des objets connectés pourront un jour servir à « accompagner et augmenter les capacités des travailleurs, […] et amplifier l’intelligence humaine pour faciliter et optimiser les prises de décisions. Et d’imaginer une application possible consistant à « surveiller à distance et en temps réel les signes vitaux de patients âgés pour permettre au personnel médical de prendre des décisions de soins plus précises et plus rapidement. »

Les plateformes autonomes sont des architectures où L’IT se décline sur le modèle « as a service », en devenant une ressource « autogéré et sans limites de capacité, de performance ou d’échelle », selon Deloitte. « Les équipes des DSI peuvent concevoir des architectures où les composants et les systèmes sont massivement virtualisés et gérés par des outils de supervision et d’optimisation. Ces nouvelles architectures peuvent ainsi allouer ou déplacer des ressources et des capacités, en temps réel et de manière fluide, en les répartissant efficacement entre des infrastructures « on-premises » ou des plateformes cloud privées ou publiques. »

La Blockchain ou la démocratisation de la confiance. « Tout comme Internet a réinventé la communication, la blockchain pourrait transformer la façon de gérer les transactions, les contrats, et plus généralement le concept de confiance, indispensable au bon fonctionnement des entreprises et de la société mais onéreuse à maintenir dans une économie mondialisée et de plus en plus digitale », écrit Deloitte. La blockchain est « un registre distribué permettant d’enregistrer et de partager de l’information (des transactions, des contrats, des actifs, des identités…) au sein d’une communauté où chaque membre maintient sa propre copie du registre et tous les membres doivent collectivement approuver chaque évolution (bloc) du registre. […] Chacun peut voir la totalité de l’historique transactionnel. […] Un protocole gère la façon dont de nouvelles modifications ou entrées de registre sont initiées, approuvées, enregistrées et distribuées. […] Le registre est à la fois sécurisé, transparent, immuable, et résistant aux pannes. […] La blockchain remplace les tiers de confiance par la cryptologie. […] Elle permet de réduire les frais administratifs. […] Un environnement transactionnel sécurisé et transparent pourrait aider les pays en développement à réduire les pertes liées à la corruption, aux pots-de-vin, au vol et à l’évasion fiscale. […] L’industrie des services financiers investit massivement dans la blockchain afin d’en évaluer les usages. D’autres organisations non issues secteur financier, en explorent les possibles débouchés dans « les domaines des paiements, des programmes de fidélité, des contrats intelligents, de la gestion d’actifs ou encore de places de marché ». « Les fonds de capital-risque ont investi près d’un milliard de dollars dans 120 start-up liées à la blockchain, et près de la moitié de ces investissements ont été réalisés l’an dernier », rappelle Deloitte. Le cabinet note que des acteurs de l’informatique tels que IBM, Cisco, Intel et la Fondation Linux ont fondé l’Open Ledger Project (Projet de registre ouvert), une plateforme blockchain libre et basée sur des standards afin d’accélérer l’adoption de la technologie et le développement de nouveaux services.

Reimagining Core Systems : il s’agit ni plus ni moins que de réinventer les systèmes cœur de métier de l’entreprise ou, autrement dit, de moderniser les systèmes legacy pour accompagner et mieux supporter la transformation des métiers. Deloitte distingue cinq approches possibles : l’évolution des plateformes (mises à jour techniques), la revitalisation (renfort des processus cœur de métier), la remédiation (simplification), le remplacement et l’immobilisme.

Les Industrialized Analytics. Les avancées technologiques dans le domaine du calcul distribué, du traitement in-memory, du machine learning, de l’analyse sémantique ou cognitive et de la data visualisation apportent de nouvelles capacités de traitement inimaginables il y a quelques années, explique en préambule Deloitte. Des outils qui permettent de raffiner et de distribuer des données assimilée à un nouveau pétrole. Mais Deloitte note que peu d’organisations ont déjà investi dans un modèle permettant « d’industrialiser leur approche et de dépasser le cadre de l’expérimentation ». Deloitte recommande aux entreprises de se tourner vers les approches prédictives et de repenser leurs modèles de déploiement et de gestion. L’approche traditionnelle consistant à « identifier les besoins ; construire un modèle de données ; mettre les données dans un entrepôt de données ; les nettoyer, les normaliser et finalement les analyser », ne répond plus aux besoins d’analyse de volumes croissants de données non structurées, réparties sur toute la chaîne de valeur de l’entreprise. Deloitte conseille également de mettre en œuvre un plan de développement et de rétention des talents, dans la mesure où « il reste toujours compliqué de recruter ou de former les profils nécessaires ». Les équipes de développement doivent notamment se familiariser avec de nouveaux langages d’analyse, comme R, Python et les routines de machine learning.

La RSE. Pour Deloitte, les questions d’impact social prennent de plus en plus de place dans les réflexions stratégiques des entreprises et peuvent même devenir un axe stratégique. « Aujourd’hui, certaines entreprises intègrent la réflexion « impact social » pour concevoir des produits différenciés, explorer de nouveaux marchés, sécuriser une chaîne d’approvisionnement durable, attirer et retenir les talents parmi la génération Y, et transformer les relations réglementaires litigieuses », écrit ainsi Deloitte. Dans cette optique, Deloitte conseille par exemple de recourir à l’innovation frugale en mettant à profit les nouvelles technologies pour inventer directement des produits et services abordable et répondant à des besoins de base. Deloitte recommande également aux entreprises de mettre en place des partenariats non seulement avec des concurrents, mais aussi avec des ONG et le secteur public ; de changer d’état d’esprit, de donner plus de pouvoir aux individus, de mettre l’éthique au centre de leurs préoccupations…