Dans une longue lettre de 14 pages, propositions à l’appui, le Munci alerte le gouvernement sur les enjeux du secteur du numérique et sur ses dérives, notamment en matière de sous-traitance et de jeunisme.

 

Alors que – suite à la rencontre avec les opérateurs – les services de la ministre déléguée auprès du ministre du Redressement productif chargée du secteur numérique planchent sur l’emploi dans le secteur, le Munci vient d’adresser à Fleur Pellerin « et à ses conseillers » une longue missive de 14 pages sur les enjeux socioprofessionnels et socioéconomiques du numérique, plus particulièrement dans le domaine des services informatiques cette fois.

L’association professionnelle dénonce sous la plume de son président Régis Granarolo une mauvaise gestion des ressources humaines, le recours abusif à la sous-traitance et aux relocalisations croissantes d’activités dans les pays à bas coûts, qualifiant le secteur de « laboratoire de la flexibilité 2.0 ». Un laboratoire agité « de nombreux problèmes sociaux trop souvent ignorés par les pouvoirs publics et partenaires sociaux en raison notamment du très faible taux de syndicalisation de la branche ».

Selon le syndicat il en ressort un mal-être au travail, un taux de turnover record dans les entreprises du secteur ainsi qu’une mauvaise image et un déficit d’attractivité des SSII/SICT dont pâtissent les « vraies sociétés de service et de conseil offrant une réelle valeur ajoutée tant à leurs clients qu’à leurs salariés ». Régis Granarolo réclame donc la mise en place d’une mission d’étude sur le secteur des services informatiques en France devant déboucher sur un rapport public (IGAS, ministériel ou parlementaire).

« Ce rapport pourra conclure sur l’opportunité de mettre en place un programme d’accompagnement des SSII/SICT visant notamment à améliorer leur valeur ajoutée tant pour les salariés (GRH, GPEC, capitalisation des connaissances, encadrement technique/tutorat pour les débutants…) que pour les clients (pôle(s) de compétence(s), projets au forfait, méthodologies, certifications et normes de qualité…) », précise la missive.

 

Vieux dès la quarantaine

Celle-ci dénonce par ailleurs un certain « jeunisme » en vigueur dans le secteur du numérique, 56% des recrutements portant selon le document sur des candidats ayant moins de 5 ans d’expérience. « Avec une moyenne d’âge de 33 ans (40 ans pour l’ensemble des actifs) et l’un des taux de +50 ans les plus bas de tous les secteurs d’activité (15%, contre 25% pour l’ensemble des actifs), le numérique est en France l’un des secteurs où l’âgisme (discrimination à l’embauche sur le critère d’âge) est le plus répandu et où l’expérience est trop peu valorisée », écrit le syndicat. « On devient « vieux » dès la quarantaine dans l’informatique, voire même avant pour les profils techniques (essentiellement les développeurs) qui représentent la très grande majorité des postes d’informaticiens, ce qui entraine un nombre élevé de reconversions chez les quadras et quinquas par ailleurs les plus frappés par les licenciements (pour laisser la place aux jeunes recrues…). »

Le Munci constate également un taux d’emploi particulièrement bas chez les femmes et les handicapés et plaide pour une plus grande diversité de l’emploi dans le secteur. Il demande en conséquence que les politiques publiques favorisent les entreprises  « qui démontrent de réels efforts en termes de RSE, GRH (management, gestion des carrières et des compétences), GPEC et surtout d’emploi des seniors ».

Le président du Munci fait également des propositions en matière de formation, de régionalisation de l’emploi, de fausse sous-traitance, d’immigration économique etc.

Il termine par des recommandations intéressant cette fois le consommateur, concernant notamment la lutte contre le spamming, la sécurité informatique, l’Open Data, la vente liée, la démocratie numérique ou encore la liberté d’expression en ligne, plaidant notamment pour la légalisation de l’appel au boycott via Internet.