La filiale de Bull, qui était alors contrôlée par Crescendo Industries (l’actionnaire de référence du constructeur), aurait avec d’autres entreprises IT équipé le centre de surveillance des opposants libyens.

 

Décidément Amesys est une pilule bien amère pour Bull. Le rachat en novembre 2009 par le constructeur français du spécialiste du traitement des signaux en temps réel, opération voulue par celui qui était alors le PDG de Bull, Didier Lamouche, avait finalement porté malheur à ce dernier. Elle avait en effet permis à la holding contrôlant Amesys, Crescendo Industries, de faire son entrée au capital de Bull, devenant même son actionnaire de référence avec 20% des parts. Il n’avait pas fallu longtemps pour que le nouvel actionnaire entre en conflit avec Didier Lamouche pour des questions de stratégie. Exit donc ce dernier, remplacé bientôt par Philippe Vannier, qui n’est autre que le président du directoire de Crescendo Industries.

 

Or on vient d’apprendre par le Wall Street Journal qu’Amesys faisait partie des entreprises ayant prêté main forte au régime du colonel Kadhafi. Deux envoyés spéciaux du quotidien économique, Paul Sonne et Margaret Coker, ont en effet découvert en visitant le centre de surveillance mis en place par le dictateur et installé dans son QG pour espionner les opposants, des brochures en anglais provenant d’Amesys. La société française, dont le logo figure sur la porte d’entrée, a semble-t-il équipé en 2009 le centre avec son système d’interception Eagle qui permet notamment de traquer en temps réel des emails dans Google, Hotmail et Yahoo et de suivre les chats en ligne sur MSN et AIM.

Au cours de leur visite, les deux journalistes ont d’ailleurs découvert des fichiers contenant des conversations entre des opposants, notamment un dialogue en ligne de 16 minutes entre un homme et une jeune femme.

Amesys ne serait pas la seule société étrangère à avoir signé des contrats de ce type avec le régime du dictateur. Selon nos confrères, une filiale de Boeing, Narus (éditeur du Semantic Traffic Analyzer), le spécialiste de la gestion d’équipes VasTech, et l’équipementier chinois ZTE, figurent également, parmi les fournisseurs ayant équipé le centre.

Bien que choquantes, ces ventes n’étaient pas contraire à la réglementation, le régime libyen ne faisant pas à l’époque l’objet d’un embargo.