Le site de commerce high-tech a créé la surprise la semaine dernière en annonçant le développement d’un réseau de 40 franchisés en cinq ans. Entretien avec son Pdg, Laurent de la Clergerie.


Quelle marge pourront espérer faire vos franchisés ? Quand on voit ce qui est en train d’arriver à Surcouf, la plus emblématique, et probablement la dernière, enseigne spécialisée en France, on se dit qu’il n’y a plus vraiment de viabilité possible pour la vente de détail de produits IT en boutique.

Laurent de la Clergerie : Nous n’avons pas encore tout à fait finalisé cette question de la marge des points de vente physiques. Cela dépend évidemment de nombreux paramètres, à commencer par l’investissement de départ, le montant des royalties, etc. Mais nos magasins existants (de Lyon et de Paris) sont la preuve que notre modèle est rentable. C’est vrai qu’en France, la distribution spécialisée a quasiment disparu. Mais ce n’est pas le cas chez nos voisins européens où les enseignes spécialisées, mieux organisées, plus intégrées et plus déployées géographiquement, ont mieux résisté au e-commerce. Voyez Media Markt en Allemagne ou PC City en Grande-Bretagne. Ce vide en France est une opportunité. Le groupe LDLC a aujourd’hui les volumes d’achat qui ont peut-être manqué aux spécialistes français. La proximité reste un atout. Cela rassure les clients. On le constate tous les jours dans nos magasins de Lyon et Paris. En associant la proximité aux ventes en ligne, on est deux fois plus fort.

De fait, votre taux de marge milite pour vous. À plus de 17% du chiffre d’affaires, vous affichez l’une des marges brutes les plus élevées de votre secteur. Mieux : alors que tout le marché se plaint de sa baisse inexorable, vous avez réussi l’exploit d’augmenter le vôtre au cours de votre dernier exercice. Et votre rentabilité nette explose (+55%). Quel est votre secret ?

Laurent de la Clergerie : il n’y a pas de secret. On achète comme les autres avec certes les avantages inhérents notre taille (remises, marges arrières…). Mais on vend surtout plus cher. Nos principales armes sont la qualité de service et la disponibilité. Nous avons réellement en stock les 18.000 références que nous annonçons sur le site. Et nous tenons les délais de livraison que nous annonçons. Même exigence pour le SAV, qui est traité en moins d’une semaine. C’est d’ailleurs cette qualité de service que plébiscite la clientèle professionnelle qui représente désormais 40% de nos facturations. Nous avons aussi développé toute une offre à notre marque que nous avons progressivement réussi à faire monter en gamme. Et nous nous appuyons sur des vendeurs experts pour conseiller et accompagner la clientèle. Quant à notre rentabilité, elle s’explique par le fait que nous avons appris à travailler dès le départ à bas coût. Notre point mort est parmi les plus bas du secteur.

Le PC et son univers restent au cœur de votre modèle. Ne craignez-vous pas qu’avec l’avènement des tablettes et des smartphones le PC soit passé de mode et qu’à terme votre activité décline ?

Laurent de la Clergerie : Certes le PC souffre de la concurrence des smartphones et des tablettes qui ont tendance à siphoner le budget high tech des clients. Mais il ne disparaîtra pas car il restera irremplaçable pour un grand nombre d’usages. Dès lors que les consommateurs seront équipés en smartphones et tablettes, ils reviendront vers le PC. Pour autant, nous avons des gammes de smartphones et de tablettes à notre catalogue. Mais c’est vrai que ce n’est pas notre cœur de métier. Du reste, ces produits ont tendance à tirer les marges vers le bas.

Passer de 176 M€ à 500 M€ en cinq ans, est-ce vraiment réaliste, sachant que votre chiffre d’affaires a quasiment stagné pendant sept ans ?

Laurent de la Clergerie : C’est vrai que nous avons eu une période difficile suite à l’implémentation catastrophique de notre nouveau système de gestion intégré en 2005. Pendant trois mois, nous n’avons plus été en mesure de sortir les commandes des stocks. La dégringolade a été brutale. Outre les 4 M€ que l’accident nous a coûté, il nous fallu deux ans pour revenir au niveau de chiffre d’affaires que nous réalisions jusque là et trois années supplémentaires pour reconstituer notre trésorerie. Mais depuis deux ans, nous sommes de nouveau en croissance trimestre après trimestre (mis à part le trou d’air de décembre 2011). Bien sûr, l’objectif des 500 M€ n’est atteignable que si nous réussissons à ouvrir nos 40 franchisés. Mais le projet crée une vraie dynamique en interne, de même que l’arrivée de Philippe Sauze [ex-Electronic Arts], venu renforcer la direction en novembre dernier.


Quand serez-vous prêts ?

Laurent de la Clergerie : L’appel à candidatures est lancé. Le concept, le contrat, les logiciels internes et les modifications du site seront finalisés d’ici à septembre. Le magasin de Lyon (qui réalise près de 10 M€ de CA annuel) va fermer deux mois cet été pour être refait au standard de la franchise. Nous espérons donner le feu vert aux premiers dossiers avant la fin de l’année pour des ouvertures dès l’année prochaine.