Cisco a acquis hier Whiptail, l’un des pionniers des baies de stockage 100% Flash. De quoi plomber un peu plus le climat entre EMC et Cisco après le rachat de Nicira par VMware et l’alliance Lenovo-Extreme Networks.

 

Officiellement, c’est « business as usual ». Mais dans la pratique, le feu semble couver au sein de l’alliance VMware, Cisco, EMC. Depuis le rachat par VMware de Nicira et de sa technologie de virtualisation de réseau, et depuis le partenariat signé entre EMC et Lenovo, on savait Cisco un tantinet agacé, un point confirmé à demi-mot par plusieurs responsable de Cisco au MagIT lors de CiscoLive en juin dernier. 

La tension entre les partenaires du ménage à trois VMware, Cisco, EMC est sans doute montée d’un cran supplémentaire hier, lorsqu’EMC a découvert que son partenaire dans les réseaux venait de faire un accroc massif à l’alliance qui les lie. Cisco a en effet annoncé avoir mis la main pour 415 M$ sur Whiptail, l’un des pionniers du stockage Flash, basé à Whippany dans le New-Jersey (à l’Est de New-York).

Whiptail dispose d’une offre complète en matière de baies de stockage 100% Flash avec ses gammes Accella et Invicta (baie de stockage Flash en cluster). Son rachat devrait fournir à Cisco le dernier élément qui lui manque encore pour compléter sa pile technologique : une brique de stockage moderne et performante. Avec Whiptail, Cisco va pouvoir bâtir seul ses propres systèmes intégrés sans avoir à recourir aux équipements d’EMC. 

Une annonce qui intervient alors qu’EMC lance ses propres baies Flash


L’annonce est sans doute d’autant plus vexante pour EMC, que ce dernier à récemment annoncé ses propres baies de stockage Flash en cluster, les baies XtremIO, et qu’il vient tout juste de rafraichir le cœur de son offre, la gamme hybride VNX pour lui permettre de mieux tirer parti de la Flash.

Pire pour EMC, Cisco n’a pas vraiment fait mystère de ses intentions d’intégrer en profondeur les offres de Whiptail au sein de piles d’infrastructures optimisées. John Chambers a ainsi expliqué que « Whiptail renforcera la stratégie UCS de Cisco et améliorera la performance des applications de nos clients en intégrant une architecture évolutive à base de mémoire Flash à la « fabric » UCS ». 

L’intégration entre les systèmes de Whiptail et ceux de Cisco, couplée à l‘usage  de cartes Flash PCI-express devrait notamment permettre au numéro un mondial des réseaux de concevoir ses propres systèmes intégrés à base de stockage Flash pour les applications exigeantes et le VDI. L’objectif est aussi de simplifier la gestion de l’ensemble pour ses clients en unifiant le tout sous un parapluie d’administration unique (une chose qui était plus délicate à réaliser dans le cadre du partenariat avec EMC et qui était en partie la raison d’exister de VCE, la filiale commune à VMware Cisco et EMC).

 

Après la drôle de guerre, la guerre ouverte ?


En acquérant Whiptail, Cisco vient de lui ouvrir l’ensemble de son réseau de distribution et de doper sensiblement ses capacités marketing. Si EMC ne réagit pas rapidement, il court le risque de voir Cisco venir démarcher agressivement leurs comptes communs (et ils sont nombreux) pour leur proposer une alternative à ses propres produits.

De facto, l’alliance entre EMC et Cisco a donc du plomb dans l’aile et il y a fort à parier qu’elle pourrait ne passer l’année prochaine (on se souvient que l’alliance entre Dell et EMC avait volé en éclat pour moins que cela). La nature ayant horreur du vide, la vraie question est désormais de savoir comment EMC va réagir. Quel sera notamment le devenir de la co-entreprise VCE en cas de divorce entre les membres de l’alliance. EMC détient ainsi 58% de la société contre 35% pour Cisco (le solde étant entre les mais de VMware et Intel). En cas de fâcherie, on voit mal comment les deux constructeurs pourront aisément se partager les miettes de VCE, sachant qu’aucun d’entre eux n’a d’intérêt à voir l’autre partir avec le tout. VCE pourrait donc être la première victime collatérale de la brouille.

Si VCE venait à éclater, EMC pourrait encore une fois tenter de se tourner vers un nouveau partenaire pour proposer à ses clients des piles intégrées. Le constructeur dispose déjà d’une alliance avec Lenovo, avec lequel il a récemment entamé une collaboration industrielle, mais aussi une collaboration commerciale (notamment en Asie). Mais l’offre du constructeur chinois est loin d’être aussi innovante et reconnue que celle de Cisco dans les serveurs. Et elle manque aussi d’une vraie dimension réseau (Lenovo a récement noué un partenariat avec Extreme Networks pour tenter de combler ses failles).

Un autre scénario serait pour EMC d’achever la transformation entamée depuis l’arrivée de Joe Tucciet de devenir lui aussi un acteur intégré de l’infrastructure. Pour cela, il lui faudrait développer une activité serveurs en propre ou acquérir l’activité d’un acteur respecté (la division serveurs x86 d’IBM serait à vendre) et acquérir des compétences réseau. Si une telle stratégie venait à être retenue, EMC pourrait  être tenté de faire coup double en rachetant Brocade. Un tel rachat lui permettrait à la fois de mettre la main sur le marché des équipements Fibre Channel (en quelque sorte le retour de Mc Data au bercail) et de mettre un pied sur le marché des réseaux Ethernet pour datacenters et réseaux d’opérateurs avec une offre fort respectable, l’occasion au passage de faire un joli pied de nez à son ex-partenaire, mais aussi de géner ses concurrents comme Hitachi et Fujitsu, grands partenaires de Brocade sur les réseaux Ethernet. Pour l’instant, ce scénarios relève encore de la science-fiction, mais on n’imagine pas EMC rester de marbre face au mouvement de Cisco.La réaction de la société d’Hopkington devrait à n’en pas douter être intéressante à suivre…

 

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