Le principal revendeur premium d’Apple joue son va-tout. Constatant l’échec de ses négociations avec son fournisseur de référence, il annonce sa cessation de paiement et la relance de son offensive judiciaire.


Le scénario de l’affrontement entre Apple et son principal revendeur premium français se précise. Faute d’avoir obtenu les compensations financières demandées, eBizcuss (15 magasins dont 7 en France) a décidé de se déclarer en cessation de paiement dans les jours qui viennent et de demander sa mise en redressement judiciaire, nous a indiqué un dirigeant de l’entreprise. Parallèlement, le revendeur entend relancer son offensive sur le terrain juridique en portant plainte pour concurrence déloyale, abus de dépendance économique et abus de position dominante.

En rendant ainsi publiques ses intentions, eBizcuss entend montrer sa détermination et faire pression une dernière fois sur Apple avant que la procédure ne devienne irréversible. Mais si le revendeur veut croire qu’il reste une chance de négocier, il semble bien que les dés soient jetés.

Car des négociations, il y en a bien eu, comme le confirme le dirigeant de l’enseigne. Depuis deux ans, le revendeur essaye d’attirer l’attention d’Apple sur ses difficultés, notamment sur ses difficultés d’accès à certains produits. Mais devant l’intransigeance de ce dernier et face aux résultats catastrophiques du troisième trimestre marqués par une baisse de 30% de son chiffre d’affaires, eBizcuss avait déposé un premier référé fin novembre auprès du tribunal de commerce pour obliger son fournisseur à l’approvisionner correctement. 

S’estimant incompétent, le tribunal avait renvoyé l’affaire sur le fond fin janvier laissant un répit supplémentaire aux deux parties pour relancer leurs négociations. Cette fois, les discussions ont porté sur les dédommagements qu’Apple était susceptible de lui verser, explique en substance eBizcuss.

Car en obligeant ses partenaires à se conformer à des exigences toujours plus élevées, en modifiant constamment ses conditions contractuelles à leur désavantage, en leur demandant de réinvestir dans de nouveaux aménagements coûteux alors que les précédents ne sont pas encore amortis, en ouvrant des points de vente directement concurrents des leurs, et en les empêchant de se réimplanter où bon leur semble, Apple les condamne ni plus ni moins à la disparition, estime eBizcuss. D’où les dédommagements. Pour rappel, au-delà des intérêts légitimes des actionnaires, il y a plus de 200 emplois en jeu.

Un raisonnement auquel Apple semble n’avoir pas été totalement hermétique puisqu’une reprise d’eBizcuss par un investisseur « agréé » a même été envisagée, a indiqué l’enseigne dans un communiqué publié dans la soirée pour préciser les raisons de la suspension de son cours de bourse mardi.

Pour beaucoup, en se lançant dans une telle procédure judiciaire, eBizcuss signe très probablement son arrêt de mort. Apple ayant la haute main sur la répartition de ses produits, l’enseigne pourrait malencontreusement venir à manquer de marchandises comme elle l’a déjà expérimenté au troisième trimestre et au mois de janvier dernier.

À moins que cette procédure ne devienne son assurance tous risques contre les pénuries et les difficultés d’approvisionnement. Car il est désormais clair que la justice va décortiquer dans les moindres détails les conditions commerciales et les contrats d’Apple vis à vis de ses partenaires. Le constructeur pourrait ainsi juger utile de rompre avec certaines des pratiques qui lui étaient jusque là reprochées.