Les partenaires de Sun voient leur business se réduire de mois en mois. En cause : la volonté d’Oracle de reprendre les ventes en direct mais aussi de nouvelles procédures inadaptées à la réalité de Sun.


Désemparés, furieux, résignés. Tels sont les qualificatifs qui résument le mieux l’état d’esprit des revendeurs Sun vis-à-vis de leur partenaire. Deux mois après le feu vert de la commission européenne pour la fusion Sun-Oracle, non seulement les choses ne se sont pas arrangées mais, de l’avis général, elles ont empiré. La situation serait même critique selon certains partenaires.

Le directeur technique d’un des plus grands revendeurs français n’essaye même pas de le dissimuler : « nous constatons que notre chiffre d’affaires Sun diminue de mois en mois. Les clients ouvrent grand la porte au changement et prêtent une oreille attentive aux plans de « WinBack » (reprise de l’existant) qui prolifèrent chez les concurrents ».

Aussi sidérant  que cela puisse paraître, un an après l’annonce officielle du rachat par Oracle, les commerciaux de Sun n’ont toujours aucune roadmap à présenter à leurs clients notamment sur les gros serveurs, confesse un avant-vente Sun. Une absence de visibilité sur l’avenir du plus mauvais effet.

Les clients repris en direct sans égard pour les partenaires historiques


Par ailleurs, Oracle a commencé à reprendre, comme il l’avait annoncé, l’adressage des clients en direct. Une politique commerciale qui là aussi pousse les partenaires Sun dans les bras des concurrents. « Le canal historique des revendeurs de Sun se fendille chaque jour un peu plus lassé par l’attitude agressive et brutale de Sun à son égard », témoigne l’un d’eux. Ce dernier confirme au passage que les brebis égarées sont accueillies à bras ouverts par les IBM, HP et autres Fujitsu.

Plus anecdotique mais symptomatique du malaise ambiant : Oracle a imposé un nouveau système pour piloter le business Sun. Mais la fusion juridique entre les deux sociétés n’étant pas effective, très peu de salariés Sun sont autorisés à y accéder directement. Ils doivent passer par les fourches caudines d’« approbateurs » Oracle.

 

Résultat : les revendeurs dénoncent « de nouveaux process inadaptés à l’environnement Sun qui complexifient la relation commerciale et rallonge de plus en plus le temps de traitement des commandes ». Quant aux salariés Sun, ils ont l’impression d’être « empêchés de travailler ». L’exaspération est telle que les appels au débrayage se multiplieraient actuellement.

Des process inadaptés et un management flou


Le même flou continue de régner concernant le management. Le dernier plan social (140 licenciements) s’est terminé fin décembre sans qu’aucun organigramme ne soit annoncé. Les salariés ont juste reçu un mail il y a moins d’un mois leur annonçant que leur président France n’était plus Susan Oliva (pourtant officiellement investie en mai 2009) mais le DG d’Oracle, Pascal Dumontet. Accessoirement, il n’y a plus d’interlocuteur presse depuis des mois.

Seule certitude : la fusion juridique ne pourra se faire avant le 1er juillet. Et dès lors, tout restera à faire : il faudra harmoniser les conventions collectives (Métallurgie pour Sun, Syntec pour Oracle), les jours de congés, le temps de travail, etc. mais surtout, syndicats et direction ne s’en cachent plus, il faudra enclencher un énième plan social (le dixième en dix ans). La situation actuelle risque donc de durer encore des mois avant de se normaliser. Avec toutes les conséquences que cela suppose en termes d’érosion de la base installée et du réseau commercial.

Un nouveau plan social d’ores et déjà à l’étude


Pour tenter de calmer les esprits, Oracle a décidé d’organiser la semaine prochaine une réunion avec ses grands clients et partenaires dans ses locaux de Colombes (92). Une initiative qui laisse de marbre les-dits partenaires : « nous en sommes à la troisième réunion Oracle-Sun depuis six mois, sans qu’aucune nouvelle information relative à l’intégration de Sun dans Oracle, à la roadmap produit ou à l’organisation managériale ne soit divulguée », ne peut s’empêcher de soupirer l’un d’eux. Qui vivra verra !