Hughes Meili, patron de la société de services rennaise Niji réagit aux récents déboires de BT dans les services informatiques, une activité incompatible selon lui avec le métier d’opérateur.

Channelnews.fr : Vous avez déclaré que les pertes récemment annoncées par BT et ayant entraîné le départ de son patron jeune patron François Barrault étaient prévisibles. Pourquoi ?

 

Hughes Meili : En effet, BT perd beaucoup d’argent. Je pense que le problème vient des trop nombreuses acquisitions de sociétés de services informatiques que cet opérateur a opéré au cours des dernières années. Ce fut à mon avis une erreur stratégique. Certes, leurs clients ont besoin de services d’accompagnement pour mettre en œuvre et comprendre les offres d’opérateurs. Mais BT a confondu services télécoms et services informatiques. Les opérateurs comprennent mal le métier des services informatiques, dont les unités d’œuvre, les modes opératoires et les interlocuteurs dans les entreprises sont différents. Surtout, les niveaux de profitabilité des SSII, même très bien gérées, sont bien inférieurs à ceux des opérateurs. En intégrant en masse des sociétés de services informatiques, BT a donc doublement dégradé sa profitabilité : il s’est diversifié dans un métier qu’il comprenait mal et il a dilué ses marges.

 

BT a peut-être tout simplement mal géré ses acquisitions. Qu’est ce qui vous fait penser que les modèles économiques des opérateurs et des SSII sont incompatibles ?

 

Hughes Meili : Prenez l’exemple de Sema Group, qui fut l’un des premiers à développer cette stratégie, en se positionnant comme le « SAP des télécoms » : il n’a pas survécu. Et les divergences qui ont opposé ces derniers mois les actionnaires d’Atos Origin et la direction de l’entreprise, découlent à mon avis de la même cause. L’activité provider d’Atos, regroupée dans l’entité Atos Worldline, concurrence l’activité services traditionnelles. L’arrivée de Thierry Breton va certainement conduire à scinder les deux entreprises.

 

Quid d’Orange et de SFR neuf-Cegetel ?

 

Hughes Meili : Les acquisitions d’Orange dans le domaine des services jusqu’à présent ont été plutôt pertinentes. L’opérateur a récupéré des compétences et l’intégration s’est plutôt bien passée. Mais Orange n’a racheté que des intégrateurs réseau et télécoms, pas des sociétés de services informatiques à proprement parler. Quant à Neuf, il a plutôt fait le choix de fédérer autour de lui un réseau d’intégrateurs labellisés.

Pour autant, il y a incontestablement convergence entre les services réseaux et les services informatiques. Quelle est la solution ?

 

Hughes Meili : D’une manière générale, les opérateurs n’ont pas assez exploré la voie des partenariats. Pour Orange, ce serait à mon avis une erreur d’intégrer des SSII pour apporter à ses clients la valeur ajoutée applicative à ses clients. Il a, à mon avis, plus intérêt à fournir aux fournisseurs d’applicatifs hébergés des API permettant de se greffer à ses offres de communication. Le marché est en attente de schémas de coopération entre les opérateurs et les spécialistes de l’informatique.